Champignons : du comestible à l’atomique...

par olivier cabanel
vendredi 25 juillet 2014

Les champignons, c’est en automne qu’on les ramasse… opinion largement répandue, sauf que… les champignons, c’est toute l’année, et que la meilleure époque pour faire des belles cueillettes, ce n’est pas fatalement l’automne, c’est aussi l’été

Les mycophages amateurs se croisent par centaines en automne dans nos vieilles forêts, mais ils sont tout de même quelques-uns à faire leurs plus jolies récoltes en été, avec l’avantage majeur de craindre un peu moins la concurrence.

Si la lune est favorable, de belles récoltes sont à espérer dès la fin du mois de juin, pourvu que pluie et chaleur soient au rendez-vous.

J’ai pour ma part observé que les meilleures récoltes se font quelques jours après la nouvelle lune…avis partagé par de nombreux mycologues. lien

Quant aux fameux « coins à champignons », s’il est vrai que certains ramasseurs ont l’habitude de visiter toujours les mêmes endroits, il faut aussi s’aider de son intuition, observer les arbres, de préférences de grande taille, sachant que chaque arbre voisine avec un champignon particulier.

En effet le champignon vit en parfaite harmonie avec son arbre préféré, raison pour laquelle il ne faut pas écraser bêtement un champignon qualifié de toxique, ou même de mortel, car de nombreux champignons sont essentiels à la santé des arbres, vu qu’ils les débarrassent de leur exsudats racinaires (ce qu’ils rejettent par leurs racines) puis les nourrissent à leur tour lorsqu’ils arrivent en fin de vie.

Quelques autres conseils : Ne gardez pas longtemps un champignon dans un frigidaire, consommez le de préférence le jour de la cueillette, sinon séchez-le, ou faites en des conserves au vinaigre…lien

Un autre conseil que l’on peut donner au sujet de l’usage ou non d’un couteau pour ramasser le champignon est de cueillir le champignon intégralement, n’utilisant le couteau que pour nettoyer le spécimen une fois sortie du sol, afin de ne pas mettre de terre dans les lamelles, ou les tubes des exemplaires ramassés.

En effet, arracher de son site le champignon n’endommage pas les réseaux de mycélium souterrain, et couper le champignon en laissant dans le sol une partie du pied pourrait au contraire, si la lame du couteau n’est pas totalement propre, donner des maladies au réseau souterrain de mycélium, favorisant ainsi l’introduction de bactéries qui pourrait pourrir l’appareil végétatif de celui-ci. lien

Utilisez aussi un panier en osier avec des abattants (jamais de sacs plastiques dans lesquels les champignons s’abîment très vie) les abattants vous éviteront ainsi de retrouver au fond du panier brindilles et feuilles. photo

Un dernier conseil concerne la propriété d’absorption du champignon d’éventuels produits chimiques toxiques que nos industries sèment un peu partout : ne cueillez pas les champignons qui poussent le long des routes, sur des terrains traités aux herbicides, défoliants, et autres engrais chimiques.

Evitez aussi ceux qui se trouveraient à proximité de lignes THT (très haute tension), ou de centrales nucléaires. lien

Certains ont même trouvé des morilles sur un quai de gare, sur des tas de vieux papiers. lien

On imagine facilement que les produits chimiques présents dans le papier (encre, et différents adjuvants) se retrouvent fatalement dans ces morilles.

On se souvient aussi que c’est grâce aux champignons que la Criirad a pu prouver que la France, et pas seulement, avait largement été polluée par les retombées de Tchernobyl. lien

Pour ceux qui n’envisagent pas de faire des kilomètres dans les bois parfumés aux senteurs de buis pour remplir leur panier, il y a toujours la solution de facilité : cultiver des champignons dans sa cour, sur son balcon, et pour les mieux lotis, dans leurs jardins…

L’un des plus simples à produire est le Pleurote.

Pour cela, il faut un billot de Peuplier ou de Frêne relativement frais d’environ 25 cm de diamètre minimum, forer quelques trous de 9 mm de diamètre, et ensemencer ces trous avec le mycélium. Détail de cette culture sur ce lien

Encore plus simple, on peut aussi cultiver des Pleurotes sur des ballots de paille en suivant la méthode proposée dans cette vidéo.

On peut aussi produire des « rosés de prés » (agaric) appelé aussi « champignon de Paris » plutôt que de les acheter dans un magasin, sachant que ce qui vous est proposé est parfois traité chimiquement.et que 70% de ceux que l’on trouve sur nos étals viennent de Chine. lien

Toute l’explication de cette culture facile dans cette vidéo.

Quand aux Morilles, nombreux sont ceux qui en ont déjà fait pousser, et Zhiu, un professeur Chinois a mis au point un brevet, grâce auquel Christophe Perchat, savoyard à la tête d’une petite entreprise s’est lancé dans la production de ce champignon si recherchélien

Moins connu, mais qui mérite le détour, la délicieuse Pholiote du Peuplier (agrocybe aegerita) peut elle aussi se récolter, et sa culture est connue depuis quasi la nuit des temps, puisque Pline et Dioscoride en témoignaient. lien

Plus difficile, mais pourtant possible depuis peu, la Chanterelle, ce délicat champignon, se cultive aussi, comme on peut le découvrir sur ce lien

Le Bolet, l’un des plus recherché par les mycophages, pourrait lui aussi être cultivé si l’on veut bien en croire les expériences russes menées pendant 10 ans dans les années soixante, permettant de récolter 240 kg de Bolets par hectare en 4 ans. lien .

En France, Frédéric Placin, professeur de chimie mène depuis 1997 des expériences prometteuses, après avoir aménagé une « boletière » en plein cœur du sud-ouest. lien

Evoquons au passage la culture de la Truffe, de plus en plus pratiquée, nécessitant un sol plus ou moins calcaire selon l'espèce envisagée, et bien sur la plantation de chênes truffiers, reconnaissables par leurs feuilles persistantes jusqu’au printemps. lien

La texture du terrain doit être limono-argileuse ou sablonneuse afin de permettre une bonne circulation de l’air de l’eau, et le terrain doit être équilibré en éléments minéraux et en matière organique. lien

Aujourd’hui il y a au moins une trentaine de variétés de champignons qui peuvent être cultivés : du Pied bleu (lépista nuda) au Coprin (coprinus comatus) en passant les Collybies à pied velouté et beaucoup d’autres. lien

Les champignons réservent aussi d’autres surprises : des étudiants de l’université de Yale ont ramené d’une mission en forêt amazonienne un spécimen appelé Pestalotiopsis microspora, champignon qui serait capable de survivre en se nourrissant de polyuréthane, ce pourrait donc être bien pratique pour nous débarrasser de ces plastiques qui nous envahissent tous les jours un peu plus. lien

Quittons ce domaine pour celui de la santé : ils peuvent aussi soigner des maladies particulièrement préoccupantes de nos jours, comme le VIH, ou le cancer.

Le Lentinus Edodes (appelé aussi Shiitaké) la Grifola Frondosa, délicieux comestible appelé aussi « poule des bois  » et le Ganoderme Luisant sont connus pour leurs propriétés immunostimulantes. lien

Ce dernier appelé « Ling Zhi » en Chine, et Reishi au Japon est aussi appelé le champignon de l’immortalité…lien

Utilisé comme fortifiant et stimulant immunitaire depuis 4000 ans en Chine, certains chercheurs affirment aujourd’hui qu’il serait un remède efficace pour soigner certains cancers.

Autre avantage, il peut se cultiver relativement facilement.

Thomas Falzone, président de la GFVS (société suisse pour les champignons vitaux) regrette le peu d’intérêt que l’on porte aux propriétés thérapeutiques des champignons.

« Le lentinane, substance tirée du shiitaké, est l’un des 10 médicaments les plus utilisés au Japon dans les thérapies anticancéreuses » assure Reinhard Saller, directeur de l’institut de médecine naturelle à Zurich, et il ajoute : « ces substances soutiennent le système immunitaire et peuvent ainsi restreindre la croissance de tumeurs et de métastases  ». lien

Mais le Ganoderme et le Lentinus Edodes ne sont pas les seuls intéressants pour se protéger du cancer, la plupart des basidiomycètes, (le bolet est l’un d’eux), contiennent des polysaccharides et des chercheurs ont récemment révélé de quelle façon certains polysaccharides agissent pour mobiliser nos défenses naturelles contre les tumeurs. Ils ont découvert d’autres propriétés inattendues, certaines molécules extraites des champignons interdisent aux cellules néoplasiques migrantes de se fixer sur d’autres tissus afin de former des métastases. lien

On extrait aujourd’hui du Conolus Versicolor un concentré de mycélium, le PLP, qui est largement utilisé contre le cancer, sous forme de tisane ou de gélules à prendre par voie orale sur une période d’un mois. lien

Curieux télescopage de cette situation qui nous mène d’un champignon à l’autre : celui né d’une explosion nucléaire, qui, comme on le sait, peut générer des cancers, et celui qui pousse dans les bois, lequel, dans certains cas, peut soigner, voire empêcher le cancer.

Comme dit mon vieil ami africain : « le taux de radiation est plus élevé à Fukushima qu’à pôle emploi  ».

L’image illustrant l’article vient de « nafeusemagazine.com »

Merci aux internautes pour leur aide précieuse

Olivier Cabanel

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