David Vincent n’est plus seul

par LM
vendredi 15 septembre 2006

Plutôt que de perdre mon temps à mater sur Planète « Loose Change » le reportage pour gogos qui tente de nous persuader que les attentats du 11 septembre 2001 étaient l’ouvre de la CIAFBIBUSHDICKCHENEY Company, j’ai zappé sur Discovery, un reportage sur les Ovni et ceux qui y croient, dont un certain Erich von Däniken. Eclairant.

Stonehenge, les Pyramides, les Temples Mayas, autant de vestiges d’anciennes civilisations qu’on tarde à décrypter. Et d’abord, comment ont-ils été conçus ? Par quel incroyable force de l’esprit ou du cerveau des peuples aussi reculés dans le temps ont-ils pu élever des monuments que nous-mêmes aujourd’hui, avec toute notre technologie, notre savoir faire, et notre argent, aurions du mal à construire ? Prenez les statues de l’île de Pâques, comment les habitants de ce bout de Terre loin de tout ont-ils bien pu dresser de telles statues ? Longtemps on a cherché, avant de comprendre, longtemps on a fouillé avant de comprendre comment les égyptiens, les mayas, les pascuans et d’autres avaient fait pour réaliser de tels prodiges. Archéologues, scientifiques, ethnologues, tout ce qui compte de spécialistes du genre se sont arrachés les cheveux, bien longtemps, avant de comprendre comment de telles prouesses avaient pu s’orchestrer.

Mais, comme souvent dans l’histoire de l’Humanité, parallèlement à la quête officielle, certains officieux spécialistes, tous plus illuminés les uns que les autres, se sont mis en tête eux aussi de percer ces secrets. Moins savants, moins rigoureux, moins attachés à la vérité que les autres, ces gogos là ont vite trouvé une explication toute faite, simple et irréfutable à l’exécution des chefs d’œuvre : une intervention extraterrestre. Bon sang mais c’est bien sûr ! Les extraterrestres ! Le plus allumé (ou le plus con-vaincu) de ces agitateurs là s’appelle Erich von Däniken. Il est suisse, fondateur de « l’astroarchéologie », et créateur de la thèse des « anciens astronautes ». En 1969, en pleine guerre froide, alors que les américains cèdent à la paranoïa, voient des communistes partout et pensent que leur gouvernement ne leur dit pas la vérité mais leur cache l’essentiel (déjà), il publie un ouvrage qui lui apportera fortune et gloire intitulé « Présence des extraterrestres ». Dans le bouquin, il expose sa théorie selon laquelle en des temps reculés, les petits hommes qu’on dit verts seraient venus sur notre bonne planète et auraient construit les pyramides, auraient ordonné les pierres de Stonehenge, avant de revenir ensuite terminer quelques gros œuvres pour les mayas...

En 1969, année ésotérique, beaucoup de gens étaient persuadés qu’il y avait une bonne part de vrai dans ce livre, voir tout. Des millions de gens. Beaucoup plus (heureusement) que les quelques milliers qui cherchent dans la poussière d’amiante des tours jumelles les traces de la réserve d’or que Cheney a honteusement subtilisé pour son ami Bush et ses amis pétroliers. Von Däniken devint une star, et la bête noire bien sûr des archéologues, qui supportèrent mal une intrusion aussi grotesque dans leur pré carré. Il faut dire que l’oiseau alla jusqu’à prétendre que les pyramides étaient éclairées à l’époque... à l’électricité (si si), que les gros blocs de granit qui servaient à les construire avaient été découpés avec des... rayons lasers, que la disposition des monuments ainsi élevés correspondaient à l’intersection de lignes d’énergie qui quadrillent la surface de notre bonne planète, et que ces points d’intersection servaient en fait aux vaisseaux extraterrestres de « station service » en quelque sorte : ils ses positionnaient à la verticale des monuments et faisaient le plein d’énergie ! Fabuleux non ?

Pour appuyer ses délires, Von Däniken a évidemment trouvé un paquet de hiéroglyphes, de dessins, de peintures (et d’experts, évidemment, on trouve depuis la nuit des temps tous les experts qu’on veut, prêts à vous donner raison, suffit de demander) qui « représenteraient » des hommes venus de l’espace. Toutes ces preuves ont bien sûr depuis été totalement démonté, ou les dessins étaient mal interprétés par une méconnaissance des civilisations, ou ils étaient carrément créés de toute pièce par des artistes amateurs à l’humour douteux. Mais pourquoi me direz-vous, les extraterrestres, que l’on sait gentils, marrons, avec un gros doigt qui s’allume quand le téléphone sonne, pourquoi donc nos chers amis d’outre espace seraient ils venus chez nous faire leurs gros pâtés de sable et pas ailleurs ? Parce qu’ils avaient déjà épuisé « ailleurs » ! Von Däniken, photos de la surface de Mars à l’appui, démontre que ceux qu’on nomma à tort des « martiens » avaient quitté la planète rouge non sans y laisser quelque monument à leur gloire, en témoigne cette fameuse photo ultra connu du sol de Mars où l’on croit voir un visage...Les extraterrestres auraient fini de pomper toute l’énergie de Mars et seraient venus ensuite chez nous pour s’approvisionner. Une sorte de crise du pétrole, ce qui nous guette...

Vous riez (enfin j’espère) mais l’olibrius suisse a fait fortune avec ses thèses, et a même créé un parc d’attraction (terrestre ?) intitulé « Mystery Park » où en lieu et place de Dingo et Blanche Neige vous pouvez serrez la pogne de la créature de Roswell ou comprendre enfin comment ceux qui viennent d’en haut sont peut-être toujours parmi nous...La communauté scientifique a qualifié le parc de « Tchernobyl culturel », et il a de peu échappé à la faillite en 2006.

Pour faire grimper ses entrées, je proposerais à ce cher Erich de se pencher avec son acuité rare sur le cas du 11 septembre, et ces Tours qui n’en finissent pas de tomber sur la tête de certains internautes qui n’ont rien à envier au « astroarchéologues » du suisse. Peut-être il y a-t-il dans ce jour funeste pour l’Amérique un rôle quelconque joué par ces amis d’en haut, qui pourraient bien finir un jour ou l’autre par nous découper, à notre tour, au laser. Peut-être « Loose Change » ne va-t-il pas assez loin dans ses hypothèses, et Dylan Avery, qui a commis ce navet, devrait appeler von Däniken, qui pourrait lui donner quelque conseil sur l’art et la manière de séduire les pas très riches d’esprit de toute la planète et de leur faire cracher des billets. Tant qu’à hurler au loup, autant que ça rapporte !

Plus un mensonge est énorme, plus il a de chance de passer pour une vérité, ou pas loin. Cette vérité qui a ses négationnistes, toujours prêts quand il s’agit de jeter de l’huile sur le feu. Plus un mensonge est énorme, plus il a de chance de retourner la vérité pour la faire passer dans le camp du mensonge. Ainsi, certains osent écrire que « 5 ans après le 11 septembre, on ne sait pas ce qui s’est passé »...phrase qui laisse sans voix et n’a rien à envier, rien du tout, aux élucubrations de Von Däniken, qui s’était lui aussi glissé, à l’époque, dans les failles de la connaissance, dans les doutes qui existaient encore, dans les questions encore sans réponse, pour prétendre que lui savait, qu’il avait une explication, et puisqu’on en n’avait pas de meilleure qui fut sûre à 100% à lui opposer, elle valait autant qu’une autre.

Alors, oui, si on interrogeait ce grand suisse sur le 11 septembre, sans doute trouverait-il à Ground Zéro l’empreinte extraterrestre qui nous manque pour comprendre « ce qui s’est passé ». Une méchante soucoupe, comme dans Independence Day, déguisée en avion de ligne, avec Dick Cheney aux commandes. Parce qu’après tout, qui nous prouve que les Etats-Unis ne sont pas dirigés depuis l’Espace ? Qui nous dit qu’ILS ne sont pas déjà parmi nous ? Ben Laden, insaisissable père fouettard, doit savoir, lui, où se cache le vaisseau mère...

Un homme en tout cas, connaît la vérité, et il doit convaincre « un monde incrédule que le cauchemar a déjà commencé ». Il s’appelle David Vincent. Ils s’appellent tous David Vincent.


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