Étrennons la nouvelle année !
par C’est Nabum
lundi 4 janvier 2016
Le jour d'après …
La fête fut belle, agitée, gourmande. Les amis étaient présents, du moins ceux qui avaient échappé aux mauvaises surprises de la vie. Nous avons payé un lourd tribut à la vie qui va. Chacun s'évertue à ne pas songer aux absents. Il convient d'aller de l'avant, de jouer le jeu de l'optimisme de saison. « Bonne année à tous ! »
Nous avons veillé plus que d'habitude, prolongeant alors, dans le calme revenu, ces instants qui nous réunissent ainsi depuis plus de 35 ans. Ce fut le temps des histoires, des récits partagés. La musique et le tumulte avaient laissé la place à la confidence ou au conte. Les yeux se fermaient de-ci de-là ; il était temps d'aller se coucher.
La nuit fut courte. Le premier jour de l'année est une curieuse hébétude, une longue avancée à tâtons vers l'année à venir. On se retrouve presque tous pour prolonger la soirée de la veille. En attendant de retourner à l'assaut des reliefs, chacun s'ébroue à sa manière. Tandis que les dormeurs profitent de ce petit matin sans obligation pour récupérer complètement, certains s'agitent, incapables de rester au lit.
Il y a celui qui doit se lever comme chaque jour de l'année. Les bêtes ne connaissent ni dimanche ni jour férié. Il va affronter le froid et la brume pour se rendre dans son étable. Il n'a pas à se poser de questions ; son métier ne supporte ni maladies ni festivités, les veaux réclament leur mère :il part au petit matin, la tête pleine des vapeurs de la soirée.
Votre serviteur est aussi sur le pont. Il offre à ceux qui l'attendent, un conte pour commencer l'année en songe. L'histoire d'un petit prince qui n'en finit pas de chercher son étoile. Je respecte ce défi absurde, ce rendez-vous que je me suis donné à moi-même depuis si longtemps ! En toute circonstance, un billet doit scander la journée de mes lecteurs.
Je réponds aux commentaires, aux messages. Le temps passe, la maisonnée semble prendre vie. Le temps que chacun émerge et l'heure est venue de retourner à nos agapes interrompues. Le trajet se fera à pied, malgré ce vent d'est à décorner les bœufs (voilà une expression qui mérite conte ;je devrais m'y pencher)
Ces quatre kilomètres dans la campagne font un bien fou. Les idées retrouvent leur place, le corps réclame à nouveau quelques nourritures terrestres. Le froid a ragaillardi les naufragés du réveillon. Ils sont tout disposés à remettre le couvert, façon imagée de parler car dans ce groupe, on ne se met jamais à table, on converse et on grappille en passant de l'un à l'autre, le verre à la main.
On devine que la gourmandise n'est plus au rendez-vous. C'est le bonheur de prolonger, d'entrer dans cette nouvelle rotation terrestre avec ceux qui sont devenus, au fil des années, la famille de cœur qui prend le dessus. Pourtant les têtes sont lourdes, les estomacs tout autant. Quelques-uns s'assoupissent, certains s'offrent une sieste. Le temps n'est plus à la folle énergie des jeunes années.
L'après-midi s'étire. Les uns et les autres songent à ce retour qui se profile. Une dernière promenade redonnera un peu de couleurs aux joues. Il va falloir songer à se séparer. L'année va s'écouler. Nous retrouverons-nous tous le 31décembre prochain ? Personne n'ose y songer vraiment ; il manque déjà trop de bons compagnons …
Cette fois, on se sépare. Chacun rentre chez lui ou bien dans son lieu d'accueil. Le sommeil gagne la partie. Les corps vieillissants réclament ce repos qui ne leur a pas été octroyé la veille. Le jour d'après s'achève. S'il est le premier jour de l'année, il semble être davantage le dernier de la précédente qui refuse de s'achever. Demain, il en ira tout autrement, ce sera vraiment le premier jour, une nouvelle aventure qui, finalement, ne sera que la répétition à l'identique de ce qui se passait auparavant.
Les vœux et les espoirs, les souhaits et les rêves tombent d'eux-mêmes. La réalité reprend ses droits, le travail, les obligations et les soucis, la maladie et les douleurs, les craintes et les espoirs. Rien ne changera vraiment en dépit de cette célébration païenne qui a donné, quelques heures durant, cette belle illusion d'un renouveau possible. À l'année prochaine si je suis encore là !
Sylvestrement leur.