Il faut oublier …

par C’est Nabum
lundi 17 mai 2021

Un mot talisman et ça repart.

Notre merveilleux et si précieux Boris Cyrulnik doit s'en mordre les doigts. En voulant nommer l'innommable, en glissant une étiquette sur un phénomène complexe qu'il a emprunté à la biologie, afin de désigner la capacité humaine à tirer un trait sur un épisode tragique, il a ouvert la boîte à Pandore des usages abusifs qui permettent de noyer le poison (un seul s).

Il n'est pas une émission relatant un épisode douloureux, pas un débat évoquant le terrorisme ou les différents maux de notre société, pas une loi désormais sans qu'on nous le sorte du chapeau en faisant abstraction de son acception exacte. Il est devenu, par usage abusif, le fort commode synonyme d'oubli, d'effacement, de liquidation des terreurs, dans la bouche de personnages qui profitent de sa dimension mystérieuse, pour se gargariser de leur importance.

On n’oublie rien, messieurs les imposteurs. L'injonction à l'amnésie que vous semblez réclamer doit servir vos intérêts. En cas de malheur, il convient de déléguer une cellule psychologique, de proposer une écoute bienveillante et d'y ajouter la visite d'une délégation ministérielle pour que d'un coup de baguette magique, le problème soit réglé. Une bonne indemnisation par-dessus le marché (puisque ces tenants du libéralisme considèrent que tout s'achète, y compris la mémoire) et le tour est réglé.

La résilience fera son œuvre. Le mot est lâché, il doit porter en lui cette aura mystérieuse qui transformera une plaie, un choc, une blessure en un nouveau chapitre. Il suffit de tourner la page pour que tout recommence comme avant. Ne voyez-vous donc pas que c'est ainsi qu'ils envisagent d'ailleurs l'après crise du Covid. On ne change rien, on oublie tout et roule ma poule !

La Résilience c'est la capacité que le sol met en œuvre après un cataclysme naturel pour repartir, lentement certes, sur une toute autre base. À la fois la faune et la flore subissent une transformation radicale, de nouvelles plantes, de nouveaux animaux ont pris la place de ce qui a été éradiqué par une coulée de lave, un incendie, une déflagration.

Faire preuve de résilience c'est partir sur de nouvelles bases sans oublier les blessures. En faire une forme d'oubli commode, de page blanchie par les vertus de divers conditionnements est une hérésie. C'est pourtant ce qu'ils nous servent à longueur de temps, travestissant le réel pour le plier à leur volonté de ne jamais plus changer de mode de vie.

Prenez donc garde à cette loi sur l'environnement qui évoque la Résilience. Il y a une anguille sous la roche, un lézard ou bien un coup foireux. Nulle loi ne peut se prévaloir de ce phénomène dont les adaptations, les manifestations échappent par définition à la prévision, à la logique même, à la volonté.

L'humain se prend pour ce Dieu qui paraît-il l'aurait fait à son image. Il s'imagine toujours être en mesure de maîtriser l'effroi, les calamités, les catastrophes dont il est souvent en partie ou totalement responsable. L’apocalypse est hors de son système de lecture des conséquences qu'ils entraînent. Il a d'ailleurs raison du point de vue biologique puisque la vie trouvera d'autres voies pour s'exprimer.

Mais ce qui est certain, c'est que si rien ne change fondamentalement, l'espèce humaine fera partie du long cortège funèbre qu'elle a provoqué. Leur loi Environnement, climat et Résilience est l'expression même de la totale incompétence de ces gens, vaniteux diplômés des grandes écoles, qui manient des concepts ronflants sans jamais en saisir le sens. N'oubliez pas leur immense responsabilité et pour appliquer à la lettre la Résilience, si chère à leurs yeux, faisons table rase du passé et inventons une nouvelle civilisation.

Amnésiquement leur.


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