Ils nous font bien marcher !

par olivier cabanel
mercredi 12 septembre 2018

La marche est à la mode...

Du mouvement macronien, aux thérapies singulières et originales, en passant par les déplacements militants, la marche est devenue un outil de propagande, ou de liberté.

Est-ce pour autant efficace ?

Des marcheurs sur le chemin de Compostelle, pour qui le chemin permettrait la guérison, (lien) aux marcheurs pour qui la marche est anti-stress et thérapeutique, (lien) en passant par la marche du Tao, qui se pratique en silence, les pratiques des marcheurs revêtent des aspects bien différents.

La marche du Tao dans l’univers du Qi Gong se pratique dans la nature, seule ou en groupe, mais sans bavardages, marche pendant laquelle il faut synchroniser le pas, le souffle et le Yi (l’intention).

Cette marche, censée calmer les émotions, se détaille en 5 pratiques : la marche du poumon, celle du cœur, celle de la rate, des reins, et du foie.

Elle permettrait de renforcer l’immunité, et a été conçue par une certaine Madame Guo Lin, atteinte d’un cancer depuis 1949, laquelle continue de pratiquer cette marche 2 heures par jour. lien

Cette pratique est à rapprocher de la marche thérapeutique, défendue par de nombreux scientifiques, dont le professeur David Le Breton.

Cet anthropologue s’enthousiasme de la marche, qui provoque une fatigue jubilatoire comme il l’a écrit dans « éloge de la marche  » (édition Metailié). lien

L’auteur a pris la clef des champs, faisant un pied de nez à la modernité, une critique de la vitesse, empruntant les chemins de traverses, bien loin du rythme insensé de nos vies, histoire de prendre de la distance, tout en parcourant des kilomètres, et d’affuter ses sens, au milieu d’une nature qui ne peut être découverte qu'en marchant.

Il profite aussi de son ouvrage pour faire l’éloge de tous ces « fous de la sandale, de ces illuminés du pataugas », qui ont décrit un jour ou l’autre ces pratiques pédestres, au cours de sa flânerie littéraire.

Ils seraient 15 millions dans le pays à se délecter des joies de la marche, affirmant qu’elle leur fait oublier les contraintes de la vie quotidienne, en le délivrant du stress, tout en retrouvant le temps de vivre.

Pour Le Breton, après quelques heures de randonnée, on a faim et soif, et l’eau parait la plus divine des boissons, les pique-niques devenant un vrai régal. lien

Pour d’autres thérapeutes, marcher aide à la guérison, et, comme l’écrit Carine Parant, guide, se remettant d’un cancer : «  la randonnée m’a permis de dépasser la fatigue des traitements et de récupérer assez vite en fait  ».

Convaincue que l’activité physique diminue les risques de rechute, elle s’est lancé un défi, avec d’autres marcheurs, d’anciens malades : parcourir 90 km en 6 jours, soit le tour de Belle-Île-en-Mer.

Ce n’est qu’au bout de plusieurs mois d’entraînement qu’ils y sont parvenus. lien

La psychanalyste Odile Chabrillac, auteure de « marcher pour se retrouver » (édition Leduc/ 2017) ne dit pas autre chose, affirmant que la marche est un vrai remède. lien

Elle marche d’abord pour s’imprégner de son environnement, puis pour se perdre afin de se retrouver...la marche permettrait aussi de libérer sa créativité, tout comme on le fait inconsciemment lorsqu’on décide de « faire un tour pour prendre l’air  » à l’instar de Nietzsche ou Kierkegaard, lesquels marchaient pour trouver de l’inspiration.

Elle encourage la marche, dans l’humilité, la joie, le partage, le dénuement...en sortant des dépendances affectives...vivant plus fort, vivant plus grand, affirmant : « la marche permet de s’engager sans s’épuiser (...) d’être enthousiaste et concentré  ».

Finalement, pour la psychanalyste, marcher est aussi une forme de méditation, à condition d’avoir débranché son iPhone, se satisfaisant de la musique de la nature, afin de réussir à être enfin « face à soi-même, et elle conclut « pour moi, la marche est moins un sport qu’une manière d’être au monde ». lien

Le philosophe Roger-Pol Droit est aussi un déambulateur, et propose dans son dernier ouvrage, « comment marchent les philosophes  », (éditeur Paulsen) la liste des marcheurs célèbres : Platon, Bouddha, Montaigne, Rousseau, Diderot, Confucius étaient du nombre, et l’auteur nous propose une définition originale de la marche : « marcher, c’est avancer debout (...) tomber sans tomber, et de recommencer, et ainsi de suite. Cela s’appelle marcher », affirme-t-il. lien

Et de conclure : « on marche dans sa tête quand on réfléchit ». lien

Evitons de parler des marathoniens qui parcourent des distances insensées, au péril de leur vie, ou des sportifs de tous poils dont l’unique but est d’arriver le premier, quitte à payer le prix fort.

Au printemps 2002, une jeune femme de 28 ans a trouvé la mort lors du marathon de Boston. lien

La marche, c’est aussi une musique, souvent militaire, comme la Marseillaise, cet hymne que critiquait Jean Jaurès, hymne qualifié de « putain » par Léo Ferré, et dont Karim Benzema, refusait les paroles guerrières.

« Marchons, marchons, qu’un sang impur... » etc.

Il y a une sorte de malentendu pour cet hymne national, puisque ce sang impur est celui des républicains, en opposition au sang pur des royalistes...lien 

Chanter la Marseillaise serait donc un éloge de la noblesse...et un mépris des républicains.

Et puis, il y a ceux qui marchent par pur militantisme, comme ceux, qui, le 8 septembre dernier, ont marché un peu partout dans le monde pour le climat, marche qui en suit tant d’autres sans que grand-chose ne change, à part les sempiternelles promesses des quelques élus, venus parfois tenter une odieuse récupération politique. lien

Alors, efficaces ces marches ?

Mao aurait répondu probablement « oui », puisque sa « longue marche » de 12 000 km à travers la Chine a bouleversé son pays, et l’a porté au pouvoir...lien

Martin Luther King, en écho, aurait peut-être répondu « oui », lui qui le 28 aout 1963, fit, à l’issue de sa « Marche sur Washington », un rêve historique. lien

Mais quid de toutes ces marches qui n’ont pas servi à grand-chose...à part user des semelles, et fatiguer les genoux.

Prenons celles destinées à lutter contre le nucléaire, l’une des 1ère a eu lieu contre la centrale de Bugey, en juillet 1971, il y a près de 40 ans, j’en ai été...et que je sache, la centrale est toujours en activité, malgré son état de délabrement avancé.

Son réacteur n°5 suscite les plus vives inquiétudes : 23 mois d’arrêt, soit une perte d’un million d’euros par jour, un colmatage au lait de chaux, des « incidents » multiples, et pourtant, cette centrale à 35 km de Lyon a obtenu l’autorisation de continuer. lien

Il y eu d’autre marches, comme celles pour la défense des retraites...la dernière en date n’a pas fait recette...et de toute façon, le « Président des riches » n’en avait cure. lien

Pour ce qui est des marcheurs « godillots » de son parti, pas sûr qu’avec le temps, ils gardent le même engagement...car les élus de ce mouvement se sont vite rendus impopulaires, à coup de « marche au pas de lois », ou d’ordonnances, avec un sens du dialogue et du débat pour le moins atrophié, forts de leur légitimité électorale.

Ceci expliquant probablement la chute spectaculaire dans les sondages du principal intéressé, lequel est au plus bas avec seulement 29 % de satisfaits...sondage d’autant plus humiliant que les autres membres du gouvernement s’en tirent un peu mieux. lien

L’affaire Benalla, encore en gestation, n’a pas fini de faire des dégâts, d’autant que l’Élysée refuse de communiquer la fiche de paie et le détail des attributions de celui qui se faisait passer pour un CRS. lien

Dans un 1er temps, l’intéressé, soutenu par la garde des sceaux, avait refusé de se rendre à l’invitation du Sénat, qualifiant le président de la commission de « petit marquis  », pour finalement s’y voir contraint. lien

Se rendra-t-il le 19 septembre prochain à l’invitation du tribunal où il doit être entendu ?...même si en haut lieu, on reste convaincu qu’il s’agit plus d’une affaire d’été, que d’une affaire d’état, ce qui reste à prouver.

En tout cas, pour ce gouvernement, la marche en avant patine, faisant même parfois marche arrière, d’autant qu’en matière de chômage, la France est maintenant 25ème sur 28, dans l’union européenne. lien

Le gouvernement de Macron 1er semble ignorer qu’à force de rater des marches, on court le risque de se blesser, car comme dit mon vieil ami africain : « la parole de l’idiot fatigue plus qu’une montagne à escalader ».

L’image illustrant l’article vient de canempechepasnicolas

Merci aux internautes pour leur aide précieuse

Olivier Cabanel

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