Le candidat
par C’est Nabum
jeudi 2 mars 2017
Bonne Poire ? Pas vraiment !
À Saint Berdolin sur Loire, il est un candidat aux futurs législatives qui est le paradigme des petits arrangements entre fripons, membres d’une caste pratiquement assurée de ne jamais mordre la poussière dans un département totalement acquis à la réaction. Alors pourquoi se gêner ? autant mettre au premier plan un homme qui, en d’autres circonstances, ne serait d’aucune utilité.
Reconnaissons cependant à notre candidat les qualités requises pour la fonction. Il est d’abord bien né, ce qui est bien là l’essentiel. Il appartient à cette bourgeoisie indécrottable qui est restée fidèle à Saint Berdolin. Il en impose simplement par son nom, certes mieux porté par d’autres membres de la famille mais porté ! Une carte de visite, chez ces gens-là, ça ouvre bien plus de portes que les compétences et permet parfois d’accorder des subventions qui ne passent pas, tout en renvoyant l'ascenseur, à défaut de téléphérique.. ,
Il ne fera pas de vagues et occupera sans broncher un poste qui constituera son bâton de maréchal. Il ne cherchera pas à s’élever davantage ; il atteindra ainsi des sommets stratosphériques en regard de son parcours personnel. Il fut un élève discret. Je n’hésiterais pas à le qualifier de médiocre si, grâce à l’opiniâtreté de siens, à force de persévérance et après de multiples tentatives, il n’avait réussi à obtenir son baccalauréat. Mais le temps ce n’est qu’un peu plus d’argent chez les héritiers de nos moutardiers …
Comme on ne savait que faire du vilain petit canard boiteux, la politique lui ouvrit largement ses bras. Il est certain que, dans cet univers, les compétences sont des bagages encombrants et souvent dérisoires. Seules comptent la carte de visite et les relations établies ici ou là. À Saint Berdolin sur Loire, notre homme aurait pu servir de page à la pucelle, cela lui eût ouvert une voie royale ; il se contenta d’être chef scout : ce qui vous confère naturellement une fort belle stature sociale.
Mais ne tirons pas sur l’ambulance ; le candidat n’a pas que des défauts : il a la tête de l’emploi. Dans le duché de l’Orléanais, son physique bourbonien lui donne cette allure qui impressionne le bon peuple, toujours prompt à se courber devant les têtes couronnées, fussent-elles bien vides. On se prosterne devant sa majesté, on l’honore, on le distingue. Il porte haut le chapeau de marinier, lui qui a tout juste su mener sa barque. On le suppose bonne poire à observer son allure Louis-Philipparde : ce qui inspire confiance et respect.
Notre homme a aussi quelques responsabilités qu’il s’est vu confier comme on offre une friandise à un gamin, pour avoir la paix et faire plaisir. Le hasard a fait que le strapontin a pris de l’importance, qu’il l’a placé à un niveau qui n’était pas envisagé par ceux-là mêmes qui lui avaient conseillé cette formidable et si commode voie de garage. Le candidat en profite ; il use de cette exposition pour se montrer : la seule chose qu’il soit en mesure de faire sans commettre de bourdes, d’ailleurs.
Il fait comme tous les camarades, il confond les postes et les budgets pour financer le début de sa prochaine campagne. Ça ne mange pas de pain et, au pays des margoulins, qui viendrait le lui reprocher ? Le candidat s’affiche, bien aidé en cela par une presse locale si déférente pour ceux qui sont assurés de gagner ! Le candidat peut dormir sur ses deux oreilles : il va passer les doigts dans le nez …
Voilà donc cette République qu’on nous vend comme exemplaire ! La démocratie n’est qu’une farce lorsque de telles lumières viendront certainement éclairer les prochains débats à l’assemblée. Le candidat sera un élu de base, un gentil godillot toujours d’accord avec les chefs, ne venant jamais poser la question qui dérange ni même s’opposer à un vote en son âme et conscience. L’âme, je ne peux la lui contester : il est fidèle à la tradition comme il se doit dans son petit monde hypocrite, mais la conscience, je doute que ce mot ait le même sens pour lui que pour moi.
Le candidat n’aura, il doit s’en douter, ni ma voix ni mon estime. Je suppose qu’il n’en a cure ; mais qu’il sache qu’il sera toujours une de mes cibles privilégiées. Il est des désignations qui ne passent pas et la sienne est de celles-là. Mais ainsi va notre démocratie qui ne place dans l’hémicycle, par souci de conformité, que des demi-cerveaux à défaut de demi-soldes.
Impétrantement sien.