Le mariage des nano-bio-info-cogno

par Anne-Caroline Paucot
vendredi 29 juin 2007

Avec le mariage des nano-bio-info-cogno-technologies (les fameuses NBIC), les nouvelles technologies embarquent dans un train qui roule à très grande vitesse. Quelques prévisions pour une journée 2020 montrent que ce tsunami technologique va bouleverser nos habitudes et nos manières de vivre notre quotidien.

1. La proximité sera lointaine. Bien qu’étant à des milliers de kilomètres de nous, notre amour nous tirera des bras de Morphée.

On assiste au développement des murs de téléprésence qui donnent l’illusion du contact physique grâce à un mur d’image et des enceintes au rendu très réaliste. Ce dispositif peut, par exemple, relier en permanence, via l’Internet, deux sites distants et favoriser ainsi les contacts entre collègues.

On peut imaginer que le système se démocratise et qu’il soit utilisé par les particuliers. Si c’est le cas, n’oubliez pas d’enlever votre patron et votre belle-mère du carnet de connexion, sinon le réveil risque de manquer de chaleur.

2 Nous enfilerons des vêtements intelligents qui thermoréguleront la température de notre corps, diagnostiqueront notre état de santé, prodigueront un traitement médical, nous permettront de communiquer et changeront de couleur selon nos humeurs.

Jogging autoventilant, tee-shirt diffuseur de parfum, collant amaigrissant, foulard changeant de couleur, costume capable de transmettre des informations au médecin ou encore veste permettant de communiquer à l’autre bout du monde...

Qu’ils diagnostiquent, soignent, subliment ou communiquent, les vêtements intelligents sont l’objet de recherches par des nombreux industriels et pourraient bientôt envahir nos armoires et nos penderies. Enfin, rien ne nous empêchera d’être assez intelligent pour choisir ceux qui nous apportent un réel plus.

3. Nos bureaux auront pignon sur le Net, on ira travailler en se connectant depuis chez nous à un univers virtuel.

Les entreprises flirtent avec les univers virtuels. Elles sont chaque jour plus nombreuses à s’installer dans Second Life et certaines ne lésinent pas sur les moyens. IBM a acheté 12 îles virtuelles dans cet univers virtuel et 250 personnes travaillent à leur développement.

Sun propose des applications destinées à un usage interne, où le virtuel devient l’extension naturelle du travail. Dans MPK20 les employés du groupe peuvent échanger des documents, organiser des réunions, converser... (Confère magazine de vulgarisation sur le Virtual business).

4 Notre provatar rougira lorsque notre patron touchera notre point sensible.

Gartner Group affirme qu’en 2011, 80 % des internautes et les 500 premières sociétés mondiales auront une vie virtuelle. On peut en déduire que nous serons nombreux à avoir des avatars professionnels (des provatars).

Avec le développement de logiciels comme FaceCommunicator d’Oki qui capte les expressions du visage et les transmet au double numérique, l’avatar pourra communiquer de manière non verbale. Enfin, rassurez-vous, les vendeurs de technologie toujours soucieux de nous inciter à l’achat, nous permettront sans doute de filtrer ce clone de bits et d’octets. On pourra lui enlever rides et kilos et autres dommages commis par le temps sur notre être réel et le rendre apte à encaisser toutes les remarques déplacées.

5. Notre travail ressemblera de plus en plus à un jeu vidéo et on passera des tests de jeu lors de l’embauche.

Selon un article du New York Times intitulé pourquoi le travail ressemble de plus en plus à un jeu vidéo, les salariés ayant un profil de joueurs seraient plus loyaux envers leur entreprise, plus autonomes, capables d’innover ou encore de travailler en réseau que les autres... Comme le souligne Jane McGonigal, créatrice de jeu et chercheuse à l’Institut du futur, c’est à croire que “les talents que l’on développe dans les mondes virtuels permettent de régler des problèmes du monde physique“. Une donnée à prendre en compte lorsque vous tenterez de limiter la frénésie ludique de vos adolescents !

6. A midi, les robots-serveurs refuseront de nous servir la pizza demandée sous prétexte que notre taux de cholestérol est trop élevé.

Enfin, si nous insistons, ils nous obligeront à souscrire à une assurance complémentaire !

Si la commission Informatique et liberté veille au grain et limite les dérives, les assureurs seront assez malins pour nous faire des offres alléchantes nous incitant à donner notre accord pour que nos données personnelles soient croisées. On aura au début une assurance à un euro si l’on accepte un contrôle de notre alimentation. Ensuite, quand la pratique sera rentrée dans les mœurs, les prix grimperont. Enfin, rien n’empêche que l’on refuse ce futur à la mode Big Brother.

7. Nous enverrons un bouquet de fleurs virtuel à nos meilleurs clients.

Les chiffres de vente de biens virtuels sont hallucinants. Chaque année plus de 1,5 milliard de dollars sont dépensés dans des biens virtuels. Tencent, l’un des plus grands portails internet en Chine, a généré plus de 100 millions de dollars, dont 65 % proviennent de biens virtuels. Habbo Hotel a plus de 75 millions d’avatars enregistrés dans 29 pays. La vente de bien virtuels génère environ 60 millions de dollars.

HotOrNot propose des fleurs virtuelles à 10 dollars, donc plus chères que des fleurs réelles. Selon, James Hong, son fondateur, le service a trois composants : « Il y a l’objet en lui même, représenté par l’icône d’une fleur. Il y a le geste d’envoyer une fleur à sa dulcinée en ligne, et enfin il y a l’effet de trophée consistant à montrer à tous que l’on a reçu une fleur. Si la fleur en tant que telle n’est pas très importante, les deux autres le sont. » A fur et à mesure que les barrières entre vie réelle et vie virtuelle vont tomber, le marché des biens virtuels va exploser.

8. Les clients nous remercieront en nous envoyant la maquette de six verres en cristal que nous imprimerons et utiliseront sur-le-champ.

Peut-être le plus troublant. Je veux un sac à main. Je me branche sur le site d’un créateur. Je trouve un modèle qui correspond à mes aspirations. Je le personnalise en modifiant la couleur et la texture de mon choix et j’imprime.

Dans un avenir proche, ce scénario ne sera plus de la fiction. Les prix des imprimantes en 3D sont en train de diminuer. La société Desktop Factory prévoit de lancer sur le marché une imprimante 3D à un prix abordable, soit tout de même 5 000 dollars ! Si les objets demandés à l’impression et en relief sont assemblés par couche d’environ 0,2 mm, des nano-imprimantes vont permettre des impressions d’objets extrêmement subtils. On pourra par exemple imprimer chez soi son ordinateur. Imaginez la révolution dans les chaumières, quand cela sera le cas. Comme l’industrie de la musique, du logiciel et du film, les entreprises devront alors composer avec le piratage.

9. Après une journée chargée, on enfilera des lunettes qui nous permettront de voir la ville en rose.

Steve Mann vit depuis plusieurs années en portant des lunettes de son invention, connectées sans fil à l’Internet. Grâce à elles, il aménage la réalité en remplaçant par exemple les panneaux publicitaires dans la rue par des images de son choix. Le principe est nommé réalité augmentée. On ajoute des éléments virtuels dans le réel. Par exemple, on photographie un bâtiment et l’on a sur son téléphone une série d’informations pratiques ou touristiques. Le mouvement « Réalité augmentée » étant enclenché, les frontières entre le réel et le virtuel vont devenir de plus en plus floues.

10. Toutes ses techno-salades ne nous empêcheront pas d’aller arroser nos vraies salades avec de la poussière intelligente.

Quand elles auront soif, elles enverront un SMS au tuyau d’arrosage qui se mettra en marche. C’est ce type de perspective qu’offrent les NEMS (Nano Electro-Mechanical Systems) ou des minuscules microcapteurs capables d’envoyer des informations. Ces nanopuces formeront une poussière intelligente (Smart dust) capables de recueillir et communiquer des informations de toute nature. On pourrait, par exemple, en jeter sur quelqu’un pour, à son insu, suivre en direct sa vie privée. Des perspectives cauchemardesques qui donnent envie de passer rapidement son diplôme de femme de ménage intelligente.


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