Le trésor des templiers

par Emile Mourey
mardi 5 août 2008

Beaucoup d’hypothèses ont été formulées au sujet du fameux trésor des templiers. Il y a la thèse très médiatisée de Rennes-le-Château, celle d’une fuite en Angleterre et plusieurs autres. On sait, grâce à un document conservé aux Archives nationales, que les archers de Philippe le Bel, lorsqu’ils investirent le temple de Paris en 1307, ne trouvèrent rien, ce qui laisse à penser que les templiers avaient été prévenus et qu’ils avaient déménagé leurs biens. Le deuxième document est une déclaration faite au pape par le templier Jean de Chalon du temple de Nemours. La veille de leur arrestation, un cortège comprenant trois charriots recouverts de paille et une cinquantaine de chevaux aurait quitté le temple de Paris sous la conduite de deux templiers, Hugues de Chalons et Gérard de Villiers, précepteur de France.

L’indice important dans ces documents saute aux yeux et je suis étonné qu’on ne s’y intéresse pas davantage. Il s’agit de ces deux hommes qui portent le nom de Chalon parfois diversement orthographié. Or, si on veut rechercher le château-mère de la grande famille qui hérita de ce nom, c’est ici, à Taisey, sur la colline qui domine la ville de Chalon-sur-Saône qu’il faut le situer, même si le puissant Jean Ier de Chalon échangea en 1237 son comté de Chalon pour d’autres terres, en Franche-Comté. Ce Jean de Chalon voulut, je cite Perry, Histoire de Chalon, page 194, que ses descendants, quoique n’étant plus possessionnés en Chalonnais, portassent le nom de Chalon, en mémoire de sa mère, la comtesse Béatrix. Comtesse Béatrix de Chalon ? Difficile de ne pas faire le rapprochement avec une comtesse Béatrice ou Béatrix de Chalon qui fut, un temps, l’épouse de Guillaume des Barres, comte de Chalon comme l’atteste l’envers du sceau de ce très célèbre chevalier. Difficile de ne pas faire le rapprochement entre le château à trois tours qui figure sur le recto de ce sceau avec la tour toujours existante qui se dresse sur ladite colline de Taisey.

 
La première démarche qui me semble la plus évidente aurait été de rechercher la trace de ces deux de Chalon cités par les textes, ce que j’ai fait. Vers ces années 1307, des années plus tard il est vrai, j’ai trouvé un Hugues IV de Chalon et un Jean de Chalon, lesquels étaient bien petits-fils de ce Jean Ier. Ces deux de Chalon avaient bien évidemment conservé des attaches en Chalonnais et des possessions en Franche-Comté même s’ils fréquentaient épisodiquement d’autres lieux. Difficile de ne pas faire le rapprochement entre ces deux templiers de Chalon, donc chevaliers, et ce chevalier Gaudin dont il est dit qu’il gardait la maison forte de Taisey. Comme je l’explique dans mon croquis, cette maison forte était l’ancien château fort de Jean Ier de Chalon avant son départ pour la Franche-Comté, ancien château des comtes de Chalon, ses prédécesseurs.


La deuxième démarche qui me semble évidente aurait été de rechercher la trace de ce chevalier Gaudin de Taisey, ce que j’ai fait. Or, je n’ai trouvé qu’un Gaudin de prénom Thibaud, surnommé Gaudino le moine. Et ce Thibaud Gaudin n’était pas qu’un petit chevalier inconnu aux ordres du duc de Bourgogne, mais l’avant-dernier Grand Maître de l’ordre du temple. Il avait déjà réussi à sauver le trésor, une première fois, après la prise de la ville d’Acre par les musulmans. Les historiens le présentent comme un personnage célèbre pour les combats qu’il mena en Terre sainte, mais pratiquement inconnu en ce qui concerne son origine et sa demeure en France. Difficile également de ne pas prendre en compte le fait que le prédécesseur de ce Grand Maître était Guillaume de Beaujeu, un voisin, et son successeur un autre voisin. Jacques de Molay qui fut brûlé sur le bûcher était en effet originaire de Franche-Comté. Il fut le dernier Grand Maître. Tout cela montre bien que le sanctuaire de l’ordre du temple se trouvait en Bourgogne et en Franche-Comté et que le dernier refuge templier était à rechercher dans les possessions de la famille de Chalon.



La troisième démarche qui me semble évidente aurait été de rechercher, après l’exécution de Jacques de Molay, qui diable avait succédé à ce Gaudin sur cette hauteur de Taisey qui, manifestement, se trouve au centre du drame templier. Certainement pas un descendant de Gaudin puisqu’il était moine. Un seigneur pro-templier ou un seigneur anti-templier ? La réponse est sans ambiguïté. Après Gaudin, c’est la famille de Montfaucon qui rend hommage pour le fief de Taisey. Or ces de Montfaucon ne sont pas des inconnus. C’est en effet un Esquin de Montfaucon qui fut l’accusateur numéro 1 des templiers. Et c’est ainsi que se retrouve la logique de l’histoire. Le roi de France ne s’est pas contenté de faire exécuter les principaux membres de l’ordre du temple. Il s’est emparé de leur château/symbole en y installant son homme lige pour reprendre en main la région. Manifestement, c’est bien dans cette région qu’il faut rechercher le trésor des templiers si trésor il y a et non à Rennes-le-Château. De Paris jusqu’à Chalon, cela fait 370 kilomètres, un parcours sans problème pour trois charriots escortés par cinquante cavaliers. Mais si trésor il y eut, pourquoi voulez-vous qu’il soit resté en terre ? Ne pensez-vous pas qu’il aurait pu repartir plus loin, vers les Pays-Bas peut-être ? La reine des Pays-Bas est une descendante de ce Jean Ier de Chalon. L’écusson des comtes de Chalon "de gueules, à la bande d’or" figure dans ses armoiries.

Les historiens peuvent bien raconter n’importe quoi, mais il y a en histoire une logique implacable. Quand un pouvoir politique veut piller un système économique - parce que tel était l’ordre du temple qui fonctionnait comme une banque - le trésor s’en va.

Béatrix, reine des pays-Bas, descendante de la comtesse Béatrix de Chalon, que savez-vous du trésor des templiers ?

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