« Venez vite, Amélie n’attend que vous ! »
par C’est Nabum
jeudi 7 novembre 2019
Étrange message …
Arrivé à destination, aucun signe de la donzelle. La maison était vide, rien ne présageait qu’un comité d’accueil était prévu. Je m’enquis autour de moi et à certains sourires narquois des autochtones, je me rendis compte qu’ils étaient de mèche, qu’ils avaient eu vent de son arrivée. Ils me conseillaient tous de l’attendre calmement, sans oublier de prendre mes précautions car elle arriverait au milieu de la nuit.
J’avoue ma grande surprise. Une intrusion nocturne tout autant que le conseil de me munir d’un chapeau de pluie, la dame serait-elle une courtisane monnayant ses charmes ? Pourquoi moi et en un tel lieu, habituellement si paisible ? Je me couchai, plein d’appréhension. Comment allait-elle venir jusqu’à moi ? Lui ferai-je bon accueil ? Serai-je à la hauteur de ses attentes ? Autant d’interrogations qui prouvaient que j’étais pris dans ses rets.
Quand elle surgit, il me faut bien l’admettre ce fut une tornade, un tourbillon. Elle venait ici, me souffla-t-elle à l’oreille, en coup de vent, désireuse qu’elle était de faire ma connaissance. J’étais flatté avant que d’être emporté par cette furie. Une bourrasque venait de pénétrer dans mon intérieur. Tout était sans dessus dessous.
La belle avait une énergie qui décoiffe. Pas moyen de rester tranquille, elle balayait tout sur son passage, emportant mes réserves et bien plus encore. Rien ne lui résistait. J’étais incapable de rester debout, elle me plaquait au sol, furieuse et hurlante, faisant dans le voisinage si grand vacarme que j’en étais gêné.
Dois-je vous le confier ? Elle fit voler tout ce qui passait à sa portée. Rien, non vraiment rien n’était de nature à pouvoir la calmer. Elle m’emporta dans un flot tumultueux. Je voguais sur une mer tempétueuse, plongeant dans des creux profonds avant que de ressortir à peine la tête de l’eau et retourner ainsi sans cesse dans ses bras.
Amélie était une furie, une diablesse qui me laissa pantois. Après son passage, j’étais épuisé. Jamais je n’avais connu dame plus fougueuse. Je reprenais tout juste mes esprits, la belle ayant filé sans crier gare, un vrai courant d’air… C’est alors que je découvris qu’elle m’avait laissé d’étranges souvenirs : un amoncellement de sable fin à l'imitation des congères de neige, des arbres arrachés, des tuiles envolées, des flots d’eau impétueux…
Me serais-je fourvoyé ? La susdite Amélie n’était-elle donc pas une femme, une chimère magnifique, une rencontre magique à moi seul destiné ? En ouvrant les yeux, je compris ma méprise. On m’avait leurré, me vendant pour une charmante dame, une tempête qui n’avait rien de paisible. Mais pourquoi donc donner un si joli prénom à une telle tornade ? Les météorologues se jouent de notre naïveté avec délectation, je m’étais laissé prendre à cette facétie indigne.
Non seulement il me fallait retrouver mes esprits mais qui plus est, réparer les dégâts de la méchante Amélie. Pire encore, elle avait profité de son passage pour démonter l’Océan, je n’avais pas même le loisir de me réconforter par une promenade sur la plage. Me voilà bien puni de mon présomptueux désir de succomber à une sirène de passage.
Retiendrais-je la leçon ? Je m’étais laissé entraîner les yeux fermés dans le grand tourbillon de l’envie. Soudain, Amélie est revenue toquer à ma porte. Sottement je l’ai à nouveau invitée à me rejoindre :
Alors tous deux on est repartis
Dans le tourbillon de la vie
On a continué à tourner
Tous les deux enlacés
Tous les deux enlacés
Tous les deux enlacés
Tumultueusement nôtre.