Les inscriptions d’Asoka, traduites et commentées par Jules Bloch
par Catherine Segurane
mercredi 30 juin 2010
L’empereur Asoka, qui régna sur la majeure partie de l’Inde, fut sacré vers 273 avant Jésus-Christ. Les inscriptions sur pierre, qu’il fit graver sur tout le territoire indien pour diffuser le bouddhisme, sont une source majeure pour l’archéologue, le linguiste et l’historien, et bien sur pour celui qui s’intéresse au bouddhisme, car il s’agit des seuls textes figurant sur un support matériel ancien. Nous voilà donc dans le domaine de l’histoire des débuts du bouddhisme et non de sa légende.
L’empereur Asoka, qui régna sur la majeure partie de l’Inde, fut sacré vers 273 avant Jésus-Christ. Il appartient à la dynastie Maurya, en contact avec le monde grec depuis les conquêtes d’Alexandre le Grand. Souverain longtemps légendaire, Asoka est aujourd’hui bien connu, car l’archéologie a mis au jour de nombreuses inscriptions sur pierres qu’il a fait graver pour diffuser le bouddhisme. Conquérant, connu au début de sa vie comme "Asoka le cruel", il est transformé par une crise de conscience qui en fait le propagateur d’une morale de la bienveillance ; bouddhiste, il prône et exige la tolérance religieuse.
Jules Bloch nous offre une édition in extenso des inscriptions d’Asoka, et il nous met ainsi en prise directe avec le bouddhisme tel qu’il existait au lendemain des conquêtes d’Alexandre le Grand.
Toute recherche sérieuse sur les débuts du bouddhisme doit commencer par les inscriptions d’Asoka. Ce sont les premiers écrits dont le support matériel est d’époque et dont la date est certaine. C’est par eux qu’il faut commencer si nous recherchons l’histoire, et non la légende, des premiers temps du bouddhisme. Or, ces écrits nous montrent une doctrine bouddhique encore extrêmement malléable à l’époque de cet empereur, puisqu’il nous dresse une liste de textes bouddhiques qui ne correspondent à ceux d’aucune école actuelle.
Nous allons de surprise en surprise, découvrant un empereur qui connaissait fort bien le monde culturel grec, et dont certaines inscriptions sont d’ailleurs en grec et en araméen.
Nous ne nous étonnerons donc pas de trouver des convergences entre bouddhisme et philosophie grecque : même objectif de recherche d’un bien-vivre sans vulgarité (ou de suppression de la souffrance, ce qui est la même chose) ; même énergie dans la maîtrise des passions, désir ou colère ; même reconnaissance distanciée de l’existence du monde des dieux (sans majuscule) : on ne nie pas qu’ils existent, mais on n’en attend pas son salut ; même recherche de la tranquillité d’âme et de la sérénité, sous le nom d’ataraxie pour les différentes philosophies grecques (tant disciples d’Epicure que Stoïciens ou Sceptiques) ou sous le nom d’équanimité pour le bouddhisme.
Après Asoka, le Gréco-Bouddhisme se continue jusque vers le cinquième siècle après Jésus-Christ, ce qui fait donc un total de plus de sept cents ans ; voilà qui laisse le temps de quelques interactions ; ce sera le temps des fameuses Questions du Roi Ménandre (Milindapanha) et du dialogue quasi-socratique qu’elles suscitent, de l’art du Gandhara ... encore toute une histoire. Et elle n’est pas terminée, puisque les Occidentaux que nous sommes gardent le même intérêt pour cette religion/philosophie si proche de la pensée grecque qui nous a formés intellectuellement.
Références :
Les inscriptions d’Asoka, traduites et commentées par Jules Bloch ; éditions Les Belles lettres ; 2007 ; édition bilingue magadhi/français.