Homo politicus, drôle de corps !

par Fergus
lundi 27 décembre 2010

Du côté de l’UMP, on commence à se faire des cheveux, à grincer des dents, voire à se mettre la rate au court-bouillon ou à se faire un sang d’encre. Il se murmure même qu’ici et là l’ambiance du moment serait à la tempête sous les crânes. La montée en puissance de Marine Le Pen n’est en effet pas à prendre par-dessus la jambe dans les rangs de la droite. Forte de ses bons sondages, la frontiste se pousse du col et prend son pied à faire trembler le pouvoir en place. Inquiets, certains caciques du parti présidentiel en sont – et plus seulement mezzo voce – à préconiser de prendre langue avec Marine Le Pen pour, bras dessus bras dessous, sceller un pacte en vue de l’élection présidentielle de 2012. Une perspective qui fend le cœur des gaullistes et qui interpelle les centristes de la majorité, inquiets de la réaction d’un ventre mou de l’électorat qui pourrait prendre ses jambes à son cou pour fuir la mésalliance. Mais que pèse le Nouveau Centre ? Á l’évidence, il n’a pas les reins assez solides pour tourner le dos à l’UMP et doit se contenter de marquer son hostilité à un tel projet d’union par d’impuissants haussements d’épaule.

D’ailleurs, si certains dans la majorité haussent les sourcils de réprobation, d’autres – plus pragmatiques ou moins scrupuleux – se disent d’ores et déjà prêts, parfois avec le sourire aux lèvres, à tendre la main au FN pour assurer la réélection de Sarkozy, fustigeant d’avance les mous du genou qui, à l’UMP, refuseraient de franchir le pas. « La fin justifiant les moyens, il faut se serrer les coudes et, dans une conjoncture difficile, accepter désormais le coup de pouce du FN  » plaident-ils avec une bonne dose de cynisme. « Coup de pouce, mon œil ! » protestent avec vigueur ceux qui ont l’héritière du sulfureux Jean-Marie dans le nez ou qui se font de la bile à l’évocation d’un tel accord : « Prenez garde, la Marine n’a pas une cervelle d’oiseau, vous lui donnez la main, elle exigera le bras » pronostiquent-ils. Avant d’ajouter : « Il est évident qu’elle ne nous soutiendra pas à l’œil avec ses troupes. Et une fois dans la place, vous n’aurez plus assez d’estomac pour vous opposer à ses exigences et ses coups de menton martiaux. Ne vous faites pas d’illusions, les frontistes ne se contenteront pas de quelques menus os à ronger, ils voudront être payés rubis sur l’ongle. Au final, un tel accord nous coûterait les yeux de la tête, et même la peau des fesses dans les circonscriptions modérées, bref il se révèlerait à coup sûr notre talon d’Achille électoral, au risque de voir le nombre de nos élus réduit comme peau de chagrin. »

Dans ce concert discordant, seul l’homme dont les chevilles ont démesurément enflé un soir de mai 2007, celui qui bombe le torse et roule des épaules en toutes circonstances, bref l’autoproclamé nombril du monde ne s’est pas exprimé. Mâchoires serrées et bouche cousue, lui habituellement si prolixe reste obstinément muet. Cela dit, s’il a une dent contre l’égérie frontiste, pas sûr qu’il ne soit disposé, par pragmatisme électoral, à prêter l’oreille au chant de la sirène du FN. Une éventualité qui inquiète de plus en plus de monde chez les modérés de son camp, et notamment les transfuges de l’ex-UDF : « Prêter l’oreille, c’est aussi tendre la joue  ! » fulminent les opposants internes à ce scénario en pointant du doigt le discours anti-établissement récurrent des caciques du Front National. Mais Sarkozy, sourd aux états d’âme de ces couilles molles, n’en a cure, persuadé que ceux-là ont une bite dans le cerveau : s’il le faut, il pactisera, persuadé que tous les moyens sont bons pour décrocher un second mandat. Après tout il n’en serait pas à son premier coup de poignard dans le dos de ses propres amis. Quant à l’électorat, il suffirait une fois de plus de lui faire prendre les vessies pour des lanternes pour le reprendre en main.

Marine Le Pen sera-t-elle maintenue à l’index de la droite de gouvernement ? Oui si l’UMP à les reins assez solides pour l’emporter seule, peut-être pas si la conjoncture socio-économique risque de la mettre cul par-dessus tête en 2012. Quoi qu’il en soit, dans l’hypothèse où Sarkozy déciderait de franchir le pas, au risque de se trouver pieds et poings liés par une alliance délétère, Marine Le Pen est prête à affronter les résistances des récalcitrants. Mieux : l’idée de se crêper le chignon avec l’adjudant-chef Alliot-Marie, gardienne de l’orthodoxie, n’est pas pour lui déplaire car, comme on dit au Québec, celle-là, la cheftaine frontiste aimerait bien « lui faire passer les amygdales par les narines », moralement cela va de soi.

En attendant, si un nombre croissant d’élus dans la majorité se prennent la tête et commencent même, ici et là, à perdre leurs nerfs à la lecture des sondages, la dame du Front National, quant à elle, rit à gorge déployée en se tenant les côtes, ravie du bon tour qu’elle est en train de jouer. Quant à son père, c’est bien simple, un verre de saint-émilion en main – du bon, long en bouche et pourvu d’une belle cuisse  ! –, il s’en tord carrément les boyaux car si un tel scénario devait voir le jour, pense non sans raison cette vieille barbe du FN, l’UMP n’aurait pas le cul sorti des ronces !

Marine et Nicolas croqueront-ils la pomme à belles dents ou se boufferont-ils le nez sous l’œil goguenard de leurs adversaires ? Affaire à suivre, mais les éditorialistes en ont déjà l’eau à la bouche...


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