Chapeau !

par C’est Nabum
samedi 10 septembre 2022

 

Le port altier…

 

Il est des évènements planétaires qui modifient la face du Monde, d'autres qui provoquent l'indignation ou bien s'inscrivent durablement dans la mémoire de chacun. Il en est d'autres qui ne peuvent passer inaperçus tant le matraquage médiatique relève de la prise de tête, du message auquel nul ne peut échapper au risque de passer pour un asocial qui ne respecte rien ni personne. Je prends ici le risque de tourner autour du pot sans y toucher, ne m'en veuillez pas : « La compassion qui marche au pas, ça ne me concerne pas ! »

Si le coup de chapeau s'impose en l'occurrence c'est pour l'apport considérable de celle que nous ne nommerons pas à l'industrie chapelière. Alors que la couronne s'envole, c'est le chapeau qui porte le crêpe tant le couvre-chef avait trouvé son porte-drapeau, son symbole et son effigie. Jamais tête ne fut plus couverte d'éloges et de délicats ornements que celle-ci.

C'est à croire que celle qui a mené sa carrière comme un spectacle savamment orchestré et magistralement interprété était payée au chapeau. Il est ainsi possible de la ranger indubitablement dans la grande confrérie des artistes de rue alors qu'elle fréquentait les plus grandes salles et tous les palais de la planète. À ce titre, elle mérite qu'on s'incline devant son immense talent même si jamais elle ne fut intermittente tant son spectacle restera un des plus longs de l'histoire.

Il n'est plus qu'à lui tirer respectueusement et humblement notre chapeau même pour ceux qui restent tête nue. La dame a élevé au rang d'art de vivre et de s'habiller ce port altier de la galette, de la coiffe, de la mantille et autres galurins qui ne trouveront plus jamais aussi belle manière de briller en société. Seul le béret déplore qu'il ne fut jamais à la fête. Il est possible d'y voir un relent du vieil antagonisme avec les voisins d'outre-Manche qui ont eu l'outrecuidance de décapiter leur monarque.

Que certains mauvais esprits puissent se réjouir que la vieille dame a fini par avaler son chapeau ne peut que prouver que ceux-là ont perdu la tête. Nulle personne censée n'oserait se gausser d'une icône qui, de toute sa vie, n'apparut jamais tête nue. Elle parvint ainsi à se couvrir et se prémunir du ridicule, confiant cette fonction à sa coiffure. C'est du grand art !

Jamais la souveraine n'a songé à faire porter le chapeau à quelqu'un d'autre. Elle a toujours assumé les vicissitudes de sa charge même durant les heures les plus noires. C'est la tête haute et couverte qu'elle a toujours affronté les crises, les drames, les tragédies sans jamais manger ce fameux chapeau qui devint son alter ego. Elle aurait pu en remontrer dans ce registre aux petits roquets qui se prennent pour des monarques éclairés chez ces maudits français...

Le prince consort, quant à lui, n'a certes jamais travaillé du chapeau ce qui n'empêche nullement qu'il soit resté scrupuleusement dans l'ombre de sa reine, tête nue. S'il fut un homme de tête, il ne se plaça jamais en travers de sa chère épouse qui attirait tous les regards. Il tira sa révérence avant la vieille dame par respect et discrétion. Il ne doute pas, là où il se trouve, qu'elle ne tardera pas à le rejoindre, une aura ceignant sa royale personne.

Sa vie sur Terre ne fut cependant jamais un long fleuve tranquille. Il n'est qu'à évoquer la disparition d'une princesse s’engouffrant dans un tunnel sur les chapeaux de roue. Elle a pu un temps voir en elle une rivale qui a cherché même dans son dernier bal, à tirer la couverture à elle. Elle resta droite dans ses bottes, portant un temps une voilette noire sur sa merveilleuse toque.

Chapeau bas madame, vous avez porté haut la gloire des artisans qui œuvraient à la confection des chapeaux. Votre disparition risque fort de mettre à pied une partie de ses braves gens à moins que le peuple inconsolable, dans un immense hommage, au lieu de se couvrir la tête de cendre, vous rende hommage en portant un de vos inénarrables couvre-reine.

À contre-tête.


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