Comment faire salon ?

par C’est Nabum
vendredi 4 mars 2016

L'exemple vient d'en haut

Notre bon et inénarrable président a inauguré le salon de l'agriculture. Les poules, les cochons, les canards, les oies lui ont fait le meilleur accueil même si quelques vaches indélicates ont levé une queue désinvolte à son passage. Ce n'est pourtant qu'à la fin de la foire qu'on comptera les bouses et toutes ne seront pas attribuées à notre monarque.

Notre homme était dans ses petits souliers ; il n'a pas compris que pour tenir le cap avec la colère paysanne, il faut être mieux botté. Il n'était pas dans les papiers de la profession ; il y a comme une fracture entre le monde paysan et le pouvoir. Les éleveurs lui battent froid, les céréaliers ont envie de le moudre, les laitiers font la soupe à la grimace et l'opposition boit du petit-lait !

D'autres vont prendre le relais. Si les noms d'oiseaux ont fusé pour le locataire de l'Élysée, celui de Matignon a dû subir les même quolibets : il n'y a pas de raison. Celui qui sème le vent doit récolter la tempête, tout comme son camarade de fiasco. Puis ce sera au tour des prétendants de venir mesurer leur popularité parmi l'électorat qui fait les présidents.

Le vote des agriculteurs est flatteur : il permet de se prévaloir de racines authentiques, de valeurs issues de la France éternelle. Nous verrons ainsi qui a le vent en croupe, l'oreille d'âne ou bien le coup de pied asin. C'est le salon qui ouvrira la course des primaires ; normal, puisque c'est précisément le secteur de la filière agricole.

D'autres se contentent de faire banquette. Ils regardent de loin les agitations de l'heure, ils se frottent les mains, en attendant des jours meilleurs. Dans leur salon, trône désormais le téléviseur, cet objet incontournable des foyers qu'on ne pense même plus à éteindre quand un visiteur survient. C'est la loi du genre : il faut que le bon peuple soit collé à cette lucarne abrutissante.

C'est ainsi qu'ils peuvent admirer en direct les tracas de François le mal aimé, de Manuel le petit roquet, de Nathalie la prétendante ou bien les exploits de nos sportifs : les nouveaux dieux de l'Olympe. C'est ainsi qu'on fabrique des gens sans opinion, de futurs abstentionnistes ou pire encore, des inciviques notoires. C'est ainsi encore qu'ils vivent par procuration et ne se déplacent jamais quand un événement culturel est proposé près de chez eux.

Quant à moi, je m'évertuais à faire le pitre dans un salon du livre. N'y voyez aucune relation de cause à effet ni même de comparaison déplacée. C'est parce que j'avais mon béret vissé sur le crâne, mon bâton à la main, mes pieds nus et ma biaude que quelques visiteurs me prirent pour un berger en mal de moutons à tondre. Ils firent là fâcheuse confusion avec le premier nommé. Ce n'étais certes pas flatteur pour votre serviteur.

Fort heureusement, les moutons vinrent paître devant mes livres après avoir apprécié mes contes dits à la cantonade. Ils eurent plus la curiosité de feuilleter mes Bonimenteries que de lire les professions de foi des candidats. Si je suis doué pour la parole, je ne dois manifestement pas l'être pour la politique, malgré mon recours fréquent au mensonge conscient et réitéré ; voilà un mystère qui m'interroge. Je fais sans doute preuve de trop de sincérité pour espérer figurer dans la cohorte des représentants du peuple.

Si François fit un flop au salon de l'agriculture, Nabum connut meilleur sort au salon de la culture. Il faut se faire une raison : le temps est à ceux qui inventent de vrais contes, des fables crédibles et des sornettes amusantes. François va devoir retourner à ses chères études, cultiver son jardin et trouver d'autres légumes qui ne soient pas des navets. Pour notre ami le Président, les fans se font de moins en moins nombreux et il risque fort de finir son mandat sans avoir fait germer l'espoir. Il peut venir chercher conseil auprès d'un Bonimenteur.

Nous avons fait salon, chacun de notre côté. Le résultat pour l'un ne fut pas à l'aune de l'autre . Qu'importe cette farce ! elle m'aura permis de me moquer des faiseurs d'histoires et de mensonges. C'est bien la dernière fantaisie que je puisse m'offrir. L'humour est la meilleure recette qui soit pour oublier la dureté des temps. Le conteur guidera les pas de ce pauvre Président qui a au moins la délicatesse de ne pas insulter ceux qui l'ont agressé. C'est bien le seul progrès notoire avec le précédent.

Si comparaison n'est pas raison, ce billet n'a que peu de chance de trouver grâce à vos yeux. Les poules, les cochons, les canards, les oies vont rentrer sagement dans leurs demeures. Ce n'est pas encore cette fois que François regagnera le cœur de ses électeurs. Il n'a qu'à écrire des contes pour éviter de se retrouver le bec dans l'eau. Pourvu que ce ne soit pas dans la fosse à lisier !

Salonnement vôtre.


Lire l'article complet, et les commentaires