Le Mot de l’année 2020

par C’est Nabum
samedi 2 janvier 2021

à vous de jouer ...

Vainqueur haut la main, il a pris le virus à contre-pied.

Cédant comme beaucoup aux sirènes du bilan, je me dois de célébrer un MOT qui plus que tous les autres selon moi, illustre à merveille la curieuse année qui vient d’achever de détruire nos dernières illusions. Plus rien ne sera désormais comme avant, c’est du reste à travers nos corps que nous ressentons intimement ce basculement vers l’irrationnel que ce terme, en particulier, illustre à merveille.

Je me dois de vous faire languir, de repousser plus avant, le nom du vainqueur qui l’emporte, en toute logique, haut la main. Ce sera donc à vous d’émettre au fil de ce texte des hypothèses pour la simple gloire de trouver avant que je dévoile ce terme dont les annonces gouvernementales n’ont eu de cesse de vous rebattre les oreilles.

De paragraphe en paragraphe, il convient de repousser le moment fatidique de la révélation. Pour ne pas vous mettre trop vite sur la voie, il n’existe pas de liste des nominés comme on aime à le dire dans ce genre de cérémonie. En premier lieu car son évidence saute aux yeux, qu’il ne rencontre guère de postulants susceptibles de relever le gant avec lui. Puis, avouons-le, nombre d’entre vous n’ont cessé de l’avoir dans le nez depuis le mois de mars, il a donc droit à quelques égards.

Ce mot pour anodin qu’il fut jusqu’alors se mit à faire de l’huile dès que les sommités sanitaires comprirent la gravité de la crise sanitaire. Il fut immédiatement mis sur le grill, imposant à tous des contorsions inhabituelles. Se trouvant soudain projeté sous le feu des projecteurs, il prit la main pour ne plus la quitter. Le nombre de ses occurrences dans la presse écrite tout comme sur les autres médias passa de l’insignifiant à la redondance exaspérante. Lui qui n’avait rien demandé à personne en fut fort marri.

D’articulation aisée, de graphie simple et concise, il n’a jamais provoqué de difficultés orthographiques. Nous pouvons supposer que c’est à la fois ce qui justifia son choix par le comité d’experts en communication gouvernementale tout autant que son immense succès dans l’opinion publique. Curieusement, ses racines latines n’en firent pas un de ces nouveaux termes à la mode qui nous viennent d’outre Atlantique. Bien de chez nous, il joua aussi les gros bras face à tous les néologismes issus de la pandémie lexicale.

C’est donc un mot qui est toujours venu nous manger au creux de la main. Il participa du reste à notre apprentissage de l’écriture de manière bien discrète. Cette soudaine popularité lui permet enfin de s’élever dans le panthéon de la langue, lui dont habituellement, quelques personnes mal intentionnées, faisaient des gorges chaudes. Avec lui, pas de demi-mesure, le verre n’est ni à moitié vide, ni à moitié plein, il est bu, un point c’est tout.

Longtemps il fut encore sujet d’une traque impitoyable dans les repas familiaux. Il ne pouvait figurer à la sainte table même quand les convives étaient si nombreux qu’il exprimait alors une dérive aviaire. Il évoquait alors une forme de désinvolture qui ne pouvait se concevoir dans ce merveilleux rituel. Il retrouva un peu de son luxe sur les terrains de sport ou dans le monde de l’entreprise, lieux où il symbolisait plus la solidarité que l’irrespect.

Il fut des époques lointaines où il eut son heure de gloire dans la mesure où il se muait en unité. Une mesure royale en Égypte qui le prenait en point de départ pour s’achever à l’extrémité du majeur, le coude, puisque c’est de lui qu'il s’agit resta des milliers d’année une vedette incontestable avant que de sombrer dans l'anonymat. Le Covid lui a redonné ses lettres de gloire, ce qui lui est monté à la tête. Depuis ce nom fort commun ne se mouche pas du nez, il serait temps qu’il retrouve un peu plus de modestie.

Cubitalement sien.


Lire l'article complet, et les commentaires