Le patient anglais
par C’est Nabum
vendredi 22 janvier 2021
Non ce n’est pas du cinéma.
Au début de l’histoire, le héros survole le désert avant que d’être abattu. Dans cette nouvelle version, les témoins peuvent s’interroger sur la nature même de cette métaphore. Est-ce le monde d’après que symbolise ce vaste territoire inculte ? Est-ce encore notre volonté absurde de ne pas comprendre que notre Planète court à sa perte avec ce système absurde ? Toujours est-il qu’un immense grain de sable est venu se glisser dans les rouages de l’économie capitaliste.
Juliette Binoche qui joue l’infirmière dans la fiction est submergée par les blessés. Rien de neuf sous le soleil, les hôpitaux, fidèles aux règles imposées par les tableurs excel, princes de la comptabilité inhumaine, ont fait le vide pour que cette situation soit la règle. Le flux tendu appliqué au monde médical est une hérésie dont nous mesurons les conséquences avec cette nouvelle version du Patient Anglais.
Au loin, les troupes alliées progressent. Cette fois, l’arme de dissuasion est une seringue au contenu douteux. Pour conserver son précieux contenu, il faut des congélateurs qui ne goûtent guère les chaleurs de l’Afrique. Ceci d’ailleurs n’interroge nullement nos chantres du chacun pour soi et Dieu reconnaîtra les siens. Le libéralisme a ceci de merveilleux qu’il se passe d’état d’âme, une valeur non marchande.
Le premier patient anglais avait perdu la mémoire. Cette fois il perd le goût et l’odorat. Nous passerons sur cette petite variante qui après tout en dit long sur le souci des scénaristes de se mettre dans l’air du temps. Ceux qui persistent dans le choix d’une alimentation insipide n’ont d’ailleurs plus besoin de ces deux sens. L’histoire ne manque pas de sel et il convient de la pimenter un peu. C’est vers la politique que la nouvelle mouture s’est tournée.
La départ de l’Angleterre de la Communauté Européenne justifiera de manière insidieuse le mal sournois qui en dépit des frontières arrive jusqu’à nous. Le Patient Anglais est l’innocent représentant de l’éternelle perfide Albion. Il porte un terrible mal, il a pris l’avion pour contourner les barrières tant sanitaires que sociales afin de diffuser de par le monde son arme secrète.
Le Patient anglais aurait pu s’appeler « Le Variant Anglais » mais les producteurs ont cru bon de ne pas remuer le couteau ou l’aiguille dans la plaie. Le monde se meurt au-delà des frontières artificielles et des inégalités intemporelles. C’est la mise à mort d’un système absurde fondé sur l’exploitation de la Terre et de ses habitants pour le profit de quelques-uns. Le rappeler en cinémascope semble superflu. Le gentil héros nous appelle à l’aide. Il lui faut retrouver la mémoire pour reprendre goût à une vie fondée sur le partage, la modération, la générosité. Nous sommes bien loin des nouvelles productions d’une industrie du cinéma qui n’aime que l’hémoglobine, la violence et le fric. C’est à ce titre Réalité qui dépasse les fictions, ce nouvel opus en appelle à la sagesse universelle.
Le Variant Anglais, la belle monstruosité que voilà, comme si la mutation de ce monstre n’était que de la seule responsabilité de nos amis d’outre-Manche. Une fois encore, la communication s’amuse à fausser les pistes, à brouiller les esprits pointant du doigt les individus qu’il convient de calfeutrer dans leur pré-carré tandis que les biens et les marchandises voyagent plus que jamais. Il y a une étonnante contradiction que le film met en évidence. Le variant anglais ne recevra aucune récompense. La palme reviendra à la version suivante qui est déjà dans les tuyaux. Ne vous y trompez pas, vous n’êtes pas au bout du désastre.
Pastichement votre.