Quand le breuvage sanitaire fait la roue

par C’est Nabum
vendredi 10 décembre 2021

 

Vin chaud

 

Il est désormais le marqueur de l'hiver et de ses grands rassemblements consuméristes et supposés festifs. Incontournable tout autant qu'imbuvable parfois, il vous réchauffe le corps et vous brûle le gosier. Énigmatique et fantaisiste, il se joue des saveurs et des épices, pigmente votre virée en multiples interrogations sur sa composition. Farceur et fourbe, il se fait une joie de souiller votre habit dans cette foule où vous ne manquerez pas de recevoir un coup de coude.

Mais le charmant breuvage vous libère le palais, vous donnant droit de baisser le masque le temps de le boire. Comme il vous est servi fort chaud, vous voilà disposant d'une dérogation transitoire qui peut vous faire la soirée. Ajoutons qu'il contient des ingrédients capables de vous remettre sur pied ou de repousser le vilain virus, il est un précieux allié dans ce combat sans merci.

Certains, n'ayant pas totalement assimilé la communication gouvernementale, se lancent résolument dans la seule consigne qui vaille : trois doses à chaque sortie. L'excès de sucre et d'alcool pourrait traîtreusement rougir leur face mais fort heureusement, le vent, le froid et la pluie viennent à leur secours pour leur imputer leur face rubiconde.

Certains osent l'incongru et s'offrent du blanc à la place du rouge. L'intérêt n'est pas mince, ce breuvage passe plus discrètement quand il se répand sur votre pourpoint. Par ailleurs, ce choix peut détourner l'attention en passant pour un thé. C'est ainsi qu'il attire les jocrisses, ceux qui n'assument pas leur appétence alcoolique.

D'autres encore, qui n'aiment pas boire très chaud se trouvent devant un problème insoluble. Non seulement, avec lui, ils se brûlent la langue mais plus encore, la main. Les marchands, conscients de ce désagrément n'hésitent pas à proposer des gants de laine artisanaux et régionaux, venant de lointains territoires industrieux pour que vous puissiez tenir votre gobelet.

Ce problème a été également pris en compte par les organisateurs. Refroidir le vin chaud étant un souci majeur des marchés de Noël, les grandes villes ont trouvé la parade pour satisfaire pleinement leurs concitoyens. Un vaste dispositif rotatif vous permet de prendre de la hauteur avec votre boisson fumante, augmentant singulièrement le cout de la chose qui vire au prohibitif.

L'élévation associée à un lent mouvement permettent non seulement de bien mélanger le sucre et les différents ingrédients mais plus encore, de refroidir le breuvage. C'est ainsi qu'à votre descente, si durant le trajet vous ne l'avez pas renversé, vous aurez le plaisir de boire votre vin tiède. Il y a cependant un petit risque de ne pas supporter ce procédé, surtout si vous n'en êtes pas à votre premier verre. Certains débordent durant la phase ascensionnelle, d'autres ne supportent pas la décompression et en ont des hauts le cœur.

Le retour sur terre peut vous décourager à jamais de cette boisson de saison. Les vendeurs s'élèvent avec véhémence contre l'usage de la Grande Roue pour abaisser la température de leur nectar. Ils se heurtent cependant à la complicité des organisateurs qui ne veulent pas communiquer sur ce petit désagrément.

Dans le souci de rendre service, je porte à votre connaissance plutôt qu'à vos lèvres, cet effet secondaire qui ne doit vous être dissimulé. Vous saurez, en connaissance de cause, les risques que vous encourrez lorsque vous montez sur cette attraction incontournable du Marché de Noël. N'hésitez pas à me remercier en m'offrant un verre ou deux.

Seul petit inconvénient, il vous faudra me porter cette juste récompense chez moi. Je me méfie grandement de ce curieux bouillon de culture virale qui semble attirer la foule des inconscients.

À contre-expertise.


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