Il faut sauver le soldat critique

par pad
lundi 31 mars 2008

Nauleau, Zemmour, une espèce en voie de disparition.

L’heure est au pouvoir d’achat, l’heure est au règne du toujours plus vite, du toujours moins cher, l’heure est à la consommation à marche forcée.

Après le droit opposable au logement, au travail à la santé, à une vie décente en somme, je revendique un droit opposable à la consommation de masse, un droit opposable à l’écran plasma, un droit opposable au câble, à la télé par satellite, par Internet sur mon portable, qui que je sois, où que je sois, quoi que je fasse. Le métro, boulot, dodo est mort, vive le métro, boulot, télé, dodo.

À la lecture de ces quelques lignes, certains verront en moi un alter mondialiste, un anarchiste, un hypocrite, un fou et à part peut-être sur ce dernier point, ils auraient tort. Je vis dans ce système, je profite de ce système, ce système qui fait de moi un privilégié, et pourtant je critique ce système. Je le critique car il est seul et unique, parce qu’il ne nous laisse pas le choix, n’admet aucun contre-pouvoir, parce qu’il promeut l’individualisme tout en enlevant à cet individu raisonnable l’envie et bientôt la capacité de le faire par lui-même. Dans cette société de l’ « ouverture facile », du « mettez-le cinq minutes au micro-ondes et dégustez », cette société du pré-mâché, pré-digéré, pré-pensé et réfléchi la télévision fait figure de précurseur et de vecteur.

Un service public sans publicité, un service public de « qualité », le sujet fait débat en ce moment. Mais plutôt que de l’entracte, c’est du spectacle que nous devrions parler. En effet, quelle que soit la chaîne, privée comme publique, à large audience comme à public plus limité, intellectuelle comme populaire, jamais l’invité n’est remis en question, le producteur est devenu publicitaire, le présentateur promoteur, la critique potiche.

Substituant au logos un pathos plus vendeur, les chaînes continuent dans leurs programmes l’oeuvre publicitaire, après le textile et la métallurgie c’est la critique qui est délocalisée, le « grand journal » qui s’est généralisé. Pour s’en convaincre il suffit de regarder le « treize heure » de TF1, le six minutes de M6 ou toute autre émission de « divertissement ».

Mais plus grave encore, l’art, qui de tout temps a lutté contre le conformisme, les abus du pouvoir en place, s’est fait une place au soleil dans ce système. A ce titre, les récents clashs entre les chroniqueurs Naulleau, Zemour et des artistes que j’admire (Cali, Zazie...) et d’autres que j’abhorre (Cauet, Youn...) sont révélateurs.

Ainsi, tous autant qu’ils sont, habitués aux éloges faciles, à l’échange de leur présence qui crée de l’audience contre une promotion aveugle qui augmente leurs ventes, satisfaisant ainsi producteur et ego, n’admettent aucun débat, aucune remarque et rétorquent par des « vous pouvez aller prendre l’air, prendre une pause, parce que sinon, c’est moi qui le fait parce que franchement vous me cassez les couilles...  » ou encore « ça me saoule un peu. C’est très pénible. Probablement qu’ici les gens rient à vos papiers ou oublient à vous apprendre la politesse  » ou bien « je vous redis les yeux dans les yeux, juste, qui êtes-vous pour me balancer ça ? C’est tout... Pour moi, un type qui est sur la fin de sa carrière en radio, qui démarre un truc, et je ne sais pas qui vous êtes  » et le dernier, juste pour rire « si vous n’aimez pas mes émissions (si vous n’aimez pas les strip-teases à répétition de stars du porno, l’humour gras, le vulgaire...), retournez lire des livres !  »

On dit merci Sébastien Cauet.


Lire l'article complet, et les commentaires