Les espagnolades de l’Elysée

par Voris : compte fermé
lundi 28 mai 2007

Le mercredi 16 mai, jour de l’investiture officielle de Sarkozy, c’est aussi le compositeur espagnol Isaac Albéniz qui entrait au palais de l’Elysée. L’orchestre de la Garde républicaine jouait « Asturias », une pièce tirée de sa Suite española pour piano, dans un arrangement pour orchestre à cordes. Cécilia Sarkozy est l’arrière-petite-fille du célèbre compositeur Isaac Albéniz (1860-1909) dont le centenaire de la mort sera célébré le 18 mai 2009.

Wolfgang Amadeus... Albéniz  !

Personnage haut en couleur, Isaac Albeniz fut aussi un musicien très précoce, au point que son père voyait en lui un génie comparable à celui de Mozart. Mais contrairemenet à ce dernier, le petit Isaac n’a pas de père musicien. Il ne vient pas au monde non plus dans un pays d’essor musical. Né le 29 mai 1860 à Camprodón, dans la province catalane de Gerona au nord-est de l’Espagne, il naît dans une Espagne où la création authentiquement espagnole se trouve à l’état embryonnaire. Le jeune Isaac se produit en public dès l’âge de quatre ans. Il donne son premier concert à Barcelone au théâtre Romea et suscite une vive admiration.

C’est ensuite que cela se gâte. Après avoir ébloui le jury du Conservatoire de Paris, il s’en voit interdire l’entrée pour avoir fait voler une vitre en éclats. Il part en tournée dans toute l’Espagne d’abord sous la conduite de son père, puis en solitaire, à la suite d’une série de fugues qui vont le conduire jusqu’en Amérique du Sud. Il va ainsi errer en Argentine, au Brésil, en Uruguay, puis aux Etats-Unis avec sa famille. Il a quatorze ans quand il part pour Leipzig afin d’améliorer sa technique pianistique auprès de Carl Reinecke et Salomon Jadassohn. Il passe quelques mois avec Franz Liszt, à Weimar, en 1878. Il a alors 18 ans. Il sera l’élève de Liszt. En 1894, il côtoie Dukas, Debussy, Fauré. De toute son oeuvre, c’est sa "Suite espagnole" qui sera la plus populaire. La suite "Iberia" fut admirée par Debussy et Messiaen : "Jamais l’écriture du clavier n’a été poussée aussi loin", dira ce dernier.


Isaac Albéniz mourra le 18 mai 1909 de la maladie de Bright, une affection rénale, à Cambo-lès-Bains, non sans avoir été honoré de la Grande Croix de la Légion d’honneur.

Renaissance à l’Elysée.

Cécilia Sarkozy est elle-même pianiste. Elle a remporté à quinze ans le premier prix de la Ville de Paris, et continue à jouer sur le piano d’étude de son illustre ancêtre. Des œuvres de Chopin, Fauré, Poulenc mais pas d’Albéniz : « Je l’abîme », avouait-elle en avril 2005 lors d’un entretien au Monde de la Musique. Son fils Louis s’est mis lui aussi au piano. Loin des Doc Gynéco, et autres Johnny, Enrico Macias, Mireille Matthieu et Faudel, c’est un autre style de musique qui se fait entendre à l’Elysée. Comme une renaissance. Rien de plus normal : Albéniz est considéré comme un pionner de la renaissance espagnole.

Ce sont les transcriptions pour guitare par Francisco Tárrega d’un grand nombre de ses pièces qui firent en grande partie la renommée d’Albéniz. Ce qui fait que les guitaristes classiques le fréquentent, en particulier à travers le célèbre "Asturias" dont certains passages techniques sont difficiles à négocier et font souffrir les poignets !

Peut-on dire que l’interprétation d’Asturias par Andrés Ségovia ou Alexande Lagoya s’efface aujourd’hui devant celle des guitaristes contemporains comme John William, Julian Bream ou Emmannuel Rossfelder  ? Pas vraiment, quand on sait qu’Emmannuel Rossfelder, notre ambassadeur français de la guitare, fut l’élève de Lagoya. Prix des Victoires de la musique 2004 (catégorie "révélation soliste instrumental"), il est sans conteste un guitariste français de talent exceptionnel qui a su donner à cette composition une interprétation de virtuose. Mais il y a plusieurs manière de vivre cette oeuvre où la vitesse d’exécution joue une place prépondérante mais pas la seule.

Avec Granados et de Falla, Albéniz est le meilleur représentant de l’âme musicale espagnole, d’une nouvelle façon de sentir, mélodiquement et harmoniquement, l’hispanisme. En mai 2009, la France fêtera-t-elle à sa manière le centenaire de la mort du compositeur faisant ainsi entrer l’âme espagnole à l’Elysée et dans le coeur des Français ?

"Asturias" joué par :

Andrés Segovia

John Willams

Emmanuel Rossfelder


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