L’ascension du Mont de Vénus

par olivier cabanel
vendredi 1er avril 2016

L’histoire de l’alpinisme est constellée de victoires éblouissantes, et parfois aussi de défaites qui ont couté cher à ceux qui ont pris le risque de leur vie, mais l’exploit réalisé en début mars 2016 par le célèbre alpiniste Marc Braque restera longtemps dans les mémoires même si peu de médias l’ont évoqué à ce jour.

En effet, il vient tout juste de réussir l’ascension du Mont de Vénus par la face sud.

Tout le monde, ou presque, connait ce sommet népalais qui culmine à 6969 mètres, le Mont de Vénus, (Bhënasa kö mä’unta, son nom en népalais) et s’il est vrai que la face nord ne comporte pas de difficultés majeures, l’ascension par la face sud n’avait jamais été couronnée de succès.

Ceux qui l’avaient tenté auparavant y ont parfois laissé leur vie, ou ont du finalement renoncer à quelques centaines de mètres du sommet, tel Herbert Leigh Mallory, qui plus tard s’attaquera en vain au Chomolungma, plus connu sous le nom d’Everest.

Il y laissera sa vie un triste 8 juin 1924, à l’âge de 37 ans. lien

D’autres avaient suivi au cours des années, sans plus de succès, et c’est donc non sans une certaine appréhension que Marc Braque s’était décidé à relever le défi.

Une longue préparation pointilleuse avait précédé la tentative, et l’alpiniste avait décidé de mettre toutes les chances de son coté, attachant une importance particulière au franchissement des premières difficultés de ce sommet particulier.

En effet, à sa base, le Mont de Vénus est doté d’une végétation luxuriante et foisonnante qui freine l’avancée, et Braque savait que triompher de cette difficulté majeure lui ouvrait une voie royale vers le succès, à condition de ne pas y laisser trop de ses forces.

Ajoutons que si tôt passé cette zone complexe, une humidité foisonnante suitant des roches, s'ajoutait aux difficultés, multipliant les marécages.

Détail étonnant, une variété de persil sauvage pousse dans les anfractuosités rocheuses, persil que l’on ne trouve nulle part ailleurs.

Il savait aussi qu’à cette époque de l’année, à quelques jours du printemps, la neige est lourde, et la couche épaisse, instable, rendant encore plus difficile l’avancée, le pied s’enfonçant profondément, provoquant une fatigue prématurée qui allait puiser profondément dans ses réserves.

De plus la roche de ce Mont de Vénus est tendre, friable, et risque à tout moment de céder sous les pieds…

Mais écoutons plutôt le récit de son ascension : « après avoir franchi les premières difficultés de la base, plus facilement que je ne l’aurais craint, la suite du parcours me glace le sang. Une paroi de roc et de neige qui semble d’ici presque verticale. Le vrai problème c’est le grand couloir que l’on traverse en bas de la pente, il peut y avoir des chutes de pierres, lesquelles sont encore plus fréquentes en cette époque de l’année. L’image de rochers gros comme des voitures dévalant la pente dans ma direction me traverse l’esprit.

Quelques heures plus tard, le fameux couloir ne se révèlera pas si terrible que ça. Il s’agit de recouvrer ses esprits, et de découvrir soudain que je suis perché en plein ciel, la vallée est si loin, les montagnes autour si petites, je ne suis plus dans ce monde là, je suis dans le monde de l’altitude, beau et inquiétant.

Un vent glacial cingle le jour pointant, je ne m’attendais pas à une ambiance aussi austère, mais je continue de progresser dans cet univers inconnu et hostile.

Des rafales me bousculent à l’entrée de l’arête, la trace est étroite, les pentes fuyantes sur le côté me rappellent au danger, mais trêve d’euphorie, le sommet est encore loin, surtout que la finesse de l’arête me surprend.

Soudain une rafale me bouscule, je m’accroupis et dans un réflexe de survie, je plante la pique de mon piolet et m’accroche en attendant que le vent se calme.

Après un court passage versant ouest, l’arête s’affine encore un peu, à peine la place de mettre un pied, et de planter le piolet.

Un nuage lenticulaire s’est formé sur le sommet, et je ne vois pas à plus de 10 mètres devant moi.

Le souffle court, avec un léger mal de tête lancinant qui me descend jusque dans le ventre, je continue, même si l’altitude commence à se faire sentir.

Est-ce le mal des montagnes, en regardant au loin j’ai l’impression que les montagnes prennent des formes sensuelles…

Et puis, presque par surprise, l’arête s’élargit, le sommet est là, plat, accueillant, comme le ventre d’une belle consentante. Ça y est, j’ai vaincu le Mont de Vénus  ».

Encore bravo à Marc Braque qui pourra se flatter d’avoir enfin vaincu ce sommet qui a fait rêver tant d’alpinistes chevronnés.

Nul doute qu’après cette victoire indiscutable, son témoignage en aidera plus d’un à tenter à son tour ce sommet si convoité.

Laissons-lui le mot de la fin : « pas de doutes, l’ascension du Mont de Vénus, ça vous change un homme ».

Comme dit mon vieil ami africain : « les arêtes du poisson ne freinent pas la progression du chalut  ».

L’image illustrant l’article vient de yoga-horizon.fr

Merci aux internautes, et surtout à Jean-Pierre à qui j’ai emprunté des extraits de son récit, pour la bonne cause, celle de l’humour.

Olivier Cabanel

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