Tu ne seras pas un homme, Monfils
par Félicien Arcuel
jeudi 16 mai 2013
L’un des plus purs joyaux du tennis français n’a plus la tête dans la raquette. Laminé par des blessures à répétition dont la plupart sont d’ordre psychosomatiques, Gaël Monfils, tombé au 119ème rang mondial donne tous les signes d’un athlète en pré-retraite. Chronique d’un champion qui est passé à côté de son destin.
Tous les sportifs vous le diront, la réussite dans le sport individuel se joue beaucoup dans « le mental ». Le tennis, discipline à la fois technique et physique recèle aussi une dimension psychologique non négligeable. Il suffit d’énumérer les bêtes noires des plus grands joueurs pour s’en persuader. Souvenez-vous simplement des étonnantes victoires du lutin Santoro contre le numéro 1 mondial Marat Safin de son époque. Mais revenons au cas Monfils, vainqueur de l’Open d’Australie Junior 2004. Il est l’un des plus prometteurs talents du tennis français à un moment où le jeune Djokovic se fait laminer en ½ finale du même open par un autre Français disparu des radars, Josselin Ouanna, actuel 159ème joueur mondial.
Gaël Monfils, un pur talent, l’une des balles les plus rapides du circuit, un physique aussi élastique que puissant qui lui permet même de glisser sur synthétique. Monté jusqu’au 7ème rang mondial, il affiche désormais des statistiques faméliques (11 victoires pour autant de défaites) et un moral en berne. Deux seconds tours perdus contre l’Allemand Daniel Brands (69ème) lors de ses 2 dernières sorties et le doute qui s’installe et pousse Monfils à jouer les tournois Challengers, la seconde division du tennis pour se refaire la cerise. Pire, une attitude sujette à caution, des 6-0 balancés la tête basse, un arrosage de bâches en règle et le grand n’importe quoi du tennis en quelques mois. Plus d’entrainement, plus de diététique et surtout plus personne pour canaliser cette énergie pure dispensée désormais devant des consoles de jeu vidéo. Exit Roger Rasheed, son entraîneur entre juillet 2008 et juillet 2011, mais aussi Patrick Chamagne viré en novembre dernier avant qu’Eric Winogradsky, mandaté en pompier par la Fédération Français de Tennis pour préparer Roland Garros ne soit remercié à son tour. Monfils est désormais seul au monde comme en 2008 où il avait atteint le dernier carré du tournoi parisien. Mais la situation est différente aujourd’hui. Le tennisman est dans une spirale négative et pire, il se ment à lui même, invoquant des pépins physiques d’ordre « privés » pour justifier un physique qui ne tient plus la cadence. Il peut raisonnablement espérer une invitation au Roland Garros 2013 (il ne peut plus accéder directement au tableau final en raison de son classement) et passer un tour sur un malentendu mais sans entrainement digne de ce niveau il n’a plus à espérer grand chose. Il nous ravira probablement d’un coup de génie ou deux dans sa partie en se frappant le coeur de gestes rageurs mais un conseil : si vous souhaitez le voir une dernière fois, ne ratez pas les premiers tours du prochain Roland Garros.
Parti faire un tour du monde en solitaire l’hiver dernier, Monfils n’est jamais vraiment revenu de ce périple loin des courts, du bruit et de la fureur du jeu. Il est désormais au crépuscule d’une carrière qui aurait pu le consacrer lors d’un tournoi du Grand Chelem. Il l’a rêvé, fantasmé et probablement gagné sur console mais la réalité est plus prosaïque : il n’a jamais atteint la maturité nécessaire pour gravir les dernières marches que d’autres comme Ferrer, Berdych voire Tsonga, plus besogneux ont grimpé sans le dixième de son talent. Le mental haut…