Julien Doré, un Charlot ŕ la « Nouvelle Star »

par Philippe Sage
mercredi 13 juin 2007

Il est formidable, André Manoukian.
Juré-"crashé" - à La Nouvelle Star, il trouve le moyen de citer Deleuze, Kierkegaard ou Flaubert pour qualifier, et par là même réhausser, les prestations des apprentis-chanteurs de ce karaoké de la chaîne M6, karaoké légèrement supérieur à son avatar de TF1, la sinistre et sinistrée "Star Academy".
J’attends ce jour béni - et il n’en reste qu’un, c’est mercredi qui vient - où Dédé nous dégainera Arthur Schopenhauer.
Par exemple ce passage de "A soi-même" :

"L’homme vrai doit s’éloigner des hommes."

Ce compliment serait destiné à Julien Doré.
Et Dédé ajouterait :

"Et tu es si vrai, Julien, que tu nous éloignes des hommes, oh ! c’est un vrai bonheur de t’avoir rencontré."

Julien le probable successeur de Christophe Willem, à ce jour seule star certifiée platine (et même diamant) à s’être sortie de la nasse de ce télé-crochet surestimé, Julien que le jury de la Nouvelle Star porte aux nues, n’est certes pas un imposteur, mais il ne mérite assurément pas les qualificatifs outrancièrement positifs dont les quatre jurés le gratifient chaque semaine.
Heureusement, il se trouve que, sans le vouloir vraiment - Ah ! inconscient quand tu te manifestes, quel régal ! - c’est Dédé qui, jeudi, a démythifié Julien, mieux il l’a démasqué.
Alors que Manu Katché venait de traiter Julien de Bernard Menez suite à son interprétation-pastiche de "Vanina" du Franco-Néerlandais Dave, Dédé s’inscrivit en faux, en citant ... Gérard Rinaldi.
Gérard Rinaldi, c’est le fameux Marc de la sitcom "Marc & Sophie" mais c’est aussi (et surtout) l’ancien membre des Problèmes (groupe accompagnant Antoine, aujourd’hui promoteur infatigable mais fatigant d’une marque de lunettes), puis des Charlots.
Oui, les mêmes qui, plus tard, feront l’Espagne, ou finiront de se compromettre en Bidasses.


Comparer Julien Doré à Gérard Rinaldi n’est pas infâmant, ni pour l’un, ni pour l’autre.
En fait, c’est impeccablement pertinent.
Car au fond, que nous offre chaque semaine Julien Doré, sinon des parodies (de chanson) ?
Le jury de la "Nouvelle Star" a beau se pâmer devant le Gardois, se convainquant qu’il est à ce jour le meilleur candidat jamais entendu dans cette émission - ce qui est scandaleusement faux ! - Julien ne donne que dans la parodie.

Qu’est-ce d’autre que son interprétation des "Bêtises" de Sabine Paturel, sinon une parodie digne des Charlots ?

Et il en va de même pour son interprétation "décalée" de "Vanina".

Ca ne fait pas pour autant de lui un Tartuffe, tant il en faut du talent - mais aussi de l’habileté au sens Brélien du terme - pour déconstruire une chanson.
Mais ça ne fait pas de lui la synthèse - comme j’ai pu l’entendre, jeudi - de Johnny Rotten et Frank Sinatra.
Dire cela est tout aussi ridicule que grotesque.
Mais je comprends fort bien que les jurés de la "Nouvelle Star" ne puissent admettre "en direct" devant nous autres que cette édition est celle de trop.
Quand bien même Dédé nous citerait Goethe, Foucault ou Stendhal, histoire de faire diversion...

La vérité c’est que Julien est un "Charlot" plus qu’honorable, un Rinaldi "bobo", cette émission étant d’ailleurs une émission pour "bobos".
Ce qui n’est pas une insulte.
C’est juste la vérité.

Mercredi, c’est donc la finale.
En face de Julien, Tigane, un interprète timoré, originalité zéro, mais honnête, gentil quoi. Trop gentil, même.
La seule interrogation, c’est de savoir quels titres Julien va pasticher lors de cette finale.
Jusqu’où va-t-il aller ?
Va-t-il assumer son statut de "Charlot" ?

Si oui, tant mieux.
Et dans ce cas, je lui suggère d’enfoncer le clou en reprenant du Guy Marchand.

S’il décide de la jouer petit-bras, alors ce sera "Moi, Je Suis Tango".

S’il veut prendre tous les risques, et la jouer "couillue" à barrettes dans les ch’veux, alors il choisira plutôt "La Passionata".

Et après ça, fais-nous plaisir Dédé, quitte définitivement ce jury, reprends ta liberté, quand bien même Schopenhauer disait :
"L’Homme est certes libre de faire ce qu’il veut, mais il ne peut vouloir ce qu’il veut."
Ce qui en bon français veut dire :
Démerde-toi ...


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