La comédie ridicule de Macron sur la compétitivité
par Laurent Herblay
samedi 25 mai 2024
La France N°1 de l’attractivité en Europe, 15 milliards d’euros de nouveaux investissements : le cirque de l’horriblement nommé sommet destiné à vendre notre pays aux investisseurs étrangers à Versailles a pu compter sur le relais trop souvent bien servile des éléments de communication du gouvernement. Mais le nuage de fumée cède rapidement pour qui analyse la réalité des chiffres.
Une foire aux infox
Décidément, cet exécutif est passé maître dans la manipulation des statistiques, trouvant toujours les moyens de trouver un chiffre anecdotique pour défendre son bilan, alors qu’un examen sérieux démontre son échec. C’est ce à quoi s’est attelé Lucas Chancel dans le Monde, quand le Figaro relaie bien trop complaisamment la communication du gouvernement, même si le quotidien de droite pointe ailleurs quelques limites. La fameuse première place de la France dans le baromètre d’EY repose sur… le nombre de projets ! Pour Lucas Chancel, « ce chiffre n’a guère d’utilité : le nombre de projets importe moins que les emplois directs ou indirects générés par ces derniers ». En fait, ce chiffre, dont on se demande même pourquoi il est suivi, n’a qu’une utilité : permettre à une macronie aux abois devant l’échec de sa politique de pouvoir brandir une statistique, aussi ridicule soit-elle, où la France est la première en Europe.
Mais dès que l’on analyse les chiffres, le masque tombe. Comme Lucas Chancel le pointe, si l’on regarde le nombre d’emplois créés, alors la France tombe en 3ème position, derrière le Royaume Uni (le Brexit n’était pas sensé être un échec ?) et l’Espagne. Pire, si on rapporte les emplois créés à la taille de la population, nous passons alors en 8ème position, derrière également le Portugal, la Serbie, l’Irlande, la Hongrie et la Grèce… D’ailleurs, si on regarde le montant des investissements étrangers réalisés en Europe, on constate, là encore, que la France ressort derrière la Grande-Bretagne et l’Espagne, mais aussi l’Irlande et l’Allemagne… Bref, toute la communication sur la pseudo première place de la France est vraiment ridicule car l’indicateur choisi n’a quasiment aucune valeur par rapport à des indicateurs bien plus concrets, comme les montants investis ou les emplois créés. Et là, notre position est juste moyenne.
Pire, il y a encore beaucoup d’angles morts dans l’analyse. D’abord, se pose la question de la réalité et du délai des investissements annoncés, certains n’étant pas confirmés dans le temps, et d’autres s’étalant d’une manière extrêmement longue (comme les annonces sur la revalorisation dérisoire des enseignants, étalée de 2020 à 2037, et largement inférieure à l’inflation). Pire, on peut aussi se poser des questions sur la qualité et l’intérêt des investissements réalisés. L’investissement de McCain, auquel Macron a fait honneur, ne créera que… 5 emplois. Et que dire de la qualité des investissements d’Amazon : la plupart sont pour des centres de données, pas vraiment une activité qui va générer des exportations… Bref, plus on analyse les annonces du sommet, plus on se rend compte qu’il s’agit d’une immense entourloupe. Les investissements ne sont pas si importants, et leur qualité n’est pas non plus exceptionnelle.
Après plus de dix longues années passées à faire de la compétitivité de notre pays l’objectif ultime des politiques publiques, avec le rapport Gallois qui avait structuré la politique économique de Hollande, alors que Macron en était le conseiller, le bilan est calamiteux. Des dizaines de milliards ont été investis, d’innombrables lois, toutes favorables au monde des affaires (multiples déconstructions du droit du travail et des droits des chômeurs, secret des affaires), il serait normal que notre pays soit la première destination des investissements étrangers. Que nous ne le soyons pas du tout après plus de dix années de politique favorisant cela (pour ne pas dire plus de quinze si on remonte à la commission Attali) montre que cette politique est une impasse. Car dans un espace sans frontière où tous les pays se battent pour attirer les entreprises, c’est une quête très coûteuse et sans fin. Ces chiffres montrent la faillite de Macron.
Ce sommet est avant tout une immense campagne de relation publique pour le président. Et il est tellement mensonger dans le discours qu’il devrait non seulement subir les affres de tous les journalistes qui prétendent combattre les infox, mais aussi être imputé dans les comptes de campagne de Renaissance. La politique de Macron ne marche pas, et ce ne sont pas des statistiques médiocres ou dérisoires qui le protègeront de l’échec à venir lors des élections européennes, si ses opposants se mobilisent.