Focus sur le 3919 : un dispositif essentiel et des enjeux d’extension
par Fabien Wald
jeudi 20 mars 2025
Le 3919, numéro national d’écoute destiné aux femmes victimes de violences, constitue un outil essentiel dans la lutte contre les violences conjugales. Accessible gratuitement et géré par la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), il a reçu plus de 112 000 appels en 2023. Cependant, alors que la question de l’égalité entre les sexes est au cœur du débat public, une proposition visant à étendre ce dispositif aux hommes victimes de violences a été rejetée, malgré des soutiens politiques notables. Entre engagements non tenus, censure des débats et contradictions gouvernementales, retour sur une controverse qui interroge sur la réalité de l’égalité dans la prise en charge des victimes.
L'origine du 3919 : un numéro historique pour les victimes de violences
Le 3919, officiellement baptisé « 3919 - Violences Femmes Infos », est un numéro d’écoute national mis en place en 1992 par la Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF). Ce service a été créé dans le but d’apporter une écoute et une orientation aux femmes victimes de violences conjugales.
Depuis 2014, il est devenu un service téléphonique gratuit, assurant une prise en charge anonyme et confidentielle. Avec l’aggravation des violences domestiques lors de la crise sanitaire, son accessibilité a été renforcée en 2021 : il est désormais disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.
Quelques chiffres clés sur le 3919
L’importance du 3919 dans la lutte contre les violences conjugales est indéniable. En 2023, ce numéro d’écoute a enregistré :
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112 593 appels,
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un taux de réponse de 86,5 %,
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près de 74 % des appels concernaient des violences faites aux femmes.
Ces données illustrent le rôle crucial du dispositif dans l’accompagnement des victimes.
Une extension aux hommes : la proposition de Mme Le Nabour (députée bretonne)
Dans le cadre du projet de loi de finances 2025, Mme Le Nabour a déposé un amendement visant à élargir l’accès du 3919 aux hommes victimes de violences conjugales. Cet amendement prévoyait une augmentation des crédits alloués afin d’assurer un accueil adapté pour tous les publics concernés.
Malheureusement, cet amendement n’a pas été retenu à la suite du passage en force du gouvernement via l’article 49 alinéa 3, empêchant ainsi son adoption.
Une prise de position politique qui n’a pas abouti
L’ancienne ministre de l’Égalité, Salima SAA, s’était pourtant exprimée favorablement à cette extension du 3919 aux hommes victimes de violences. Son soutien est illustré dans ce document :
Cependant, suite à la chute du gouvernement par une motion de censure fin 2024, cette volonté politique n’a pas été suivie d’effet, et aucune mesure concrète n’a été adoptée en faveur de cette extension.
Un ministère de l’Égalité silencieux et une censure sur les réseaux
Depuis la nomination de Mme Aurore Bergé en tant que ministre déléguée à l’Égalité entre les femmes et les hommes et à la lutte contre les discriminations, le sujet de l’ouverture du 3919 aux hommes semble être mis sous silence.
Le collectif "Défendre les enfants", à l’origine de l’amendement, constate que tous leurs commentaires abordant ce sujet sont systématiquement supprimés des réseaux sociaux officiels du ministère, comme l’attestent plusieurs captures d’écran.
Des contradictions entre les discours et les actes
Lors d’une visioconférence avec le collectif "Défendre les enfants" à la rentrée 2024, Mme Bergé avait pourtant affirmé sa volonté d’aborder cette question avec sérieux et équité. Cependant, les communications officielles de l’État sur ce sujet révèlent une incohérence frappante, tandis que les décisions prises par son ministère contredisent ses engagements, illustrant un double discours qui ne se traduit pas dans les actes.
Lien vers le Compte-rendu de la visioconférence
En conclusion
Le 3919 joue un rôle fondamental dans l’accompagnement des victimes de violences conjugales. Si son efficacité n’est plus à prouver, la question de son extension aux hommes victimes de violences reste en suspens. Malgré des soutiens politiques notables et une tentative législative avortée, le silence du ministère de l’Égalité laisse planer le doute sur la réelle volonté d’inclure toutes les victimes dans ce dispositif.
L’évolution de cette situation mérite une attention accrue et un engagement fort de la part des pouvoirs publics pour garantir une égalité de traitement à toutes les victimes, sans distinction de genre.