L’Etat de Palestine, toujours pas membre à part entière de l’ONU

par Marcel MONIN
lundi 13 mai 2024

L’Etat de Palestine, toujours pas membre à part entière de l’ONU.

 

L’Assemblée générale des Nations-Unies vient de voter (1) ce 10 mai 2024, une résolution demandant au Conseil de Sécurité de se prononcer favorablement sur l’admission de l’Etat de Palestine.

Ce vote, en réalité, ne change guère la situation (2).

C’est à dire que les dirigeants israéliens continuent à avoir, dans les faits, les mains libres pour poursuivre la réalisation de leur projet (v. leurs déclarations) d’étendre les frontières de l’Etat israélien jusqu’aux limites de la Palestine. Et pour continuer à faire ce qu’ils font en ce moment sur le territoire de Gaza (qui ne leur « appartient pas ») . Les Palestiniens étant priés à terme … d’aller se faire prendre ailleurs.

 

Comme on le sait, l’Etat d’Israël a été créé (3) par l’effet de la déclaration du 14 mai 1948 de Ben Gourion ( à quelques heures de la fin du mandat britannique sur la Palestine). Cela n’a pas plu aux Etats de la région et encore moins aux populations palestiniennes qui voyaient des étrangers s’installer chez eux. Les Etats qui attaquèrent furent défaits. Les populations déménagèrent pour partie. En application de la loi du plus fort.

 

Comme on le sait moins, et comme on fait peut-être en sorte qu’on ne le sache pas, l’Etat de Palestine est né, beaucoup plus tard (quarante ans plus tard), par l’effet d’une autre proclamation. Celle faite par Yasser Arafat à Alger le 15 novembre 1988 (4). Entre 1948 et 1988, les Palestiniens ayant fini par tenir compte de la situation qui leur avait été … imposée.

 

D’un point de vue logique, les dirigeants israéliens auraient du être contents. Le fait que la Palestine soit officiellement divisée entre deux Etats, assurait à chacun d’entre eux, … d’être tranquille. Un Etat ne pouvant en attaquer un autre, sans craindre les réactions de la communauté internationale en général. Et, en particulier, sans avoir à redouter l’intervention d’autres Etats liés avec ceux-ci par des accords de défense.

Et puis le fait que ces deux Etats avaient des frontières communes, des intérêts identiques, des populations proches ou entre mêlées, annonçait le développement d’accords de divers ordres.

 

Mais, paradoxalement en apparence, les autorités de l’Etat israélien ne reconnurent pas l’Etat de Palestine. Ni les Etats-Unis d’Amérique ( qui avaient partie liée avec les Israéliens pour diverses affaires les intéressant), ni les Etats dont les dirigeants avait fait le choix de suivre les USA. Notamment les Etats des zones sous domination américaine ( de « l’Union européenne » en particulier) (5) .

 

Si l’on sait que les dirigeants israéliens ont constamment - sauf exception - poursuivi la création d’un grand Israël ( Etat unique sur tout le territoire de la Palestine), on comprend pourquoi.

Tant que l’Etat de Palestine … n’en est pas un ( au moins aux yeux des Israéliens et de ceux qui encouragent le gouvernement israélien dans son projet) les Israéliens « peuvent » grignoter le territoire palestinien, et y faire pénétrer leur troupes.

 

Faute pour les autorités de l’Etat de Palestine de pouvoir opposer - en dehors d’actions de commandos ( 6) - troupes et matériels aux troupes et matériels israéliens, il reste à attendre - si rien ne change - la rédaction d’un document transformant la situation de fait en situation « de droit ». Document écrit par ceux qui sont en position ( de force) pour tenir le porte plume. Lorsque la carte de la Palestine aura été transformée de manière telle que le territoire de l’Etat palestinien de 1988 aura été réduit à peu près à néant. La déclaration d’Alger étant alors ipso facto effacée.

 

A moins que …

 

- Des pays du « camp occidental » fassent ce qu’ils peuvent faire eux-mêmes, savoir : reconnaître l’Etat de Palestine. Sans attendre le feu vert d’autres Etats. Et se mettent à avoir des relations normales d’Etat à Etat avec l’Etat de Palestine. Ce qui annoncerait la signature de divers accords protecteurs de chacun des Etats cohabitant sur le territoire de la Palestine..

- Les USA se mettent à considérer que le fait qu’ils ont à leur disposition une partie ( l’Etat d’israël) du territoire de la Palestine peut leur suffire ( notamment pour surveiller la politique pétrolière des Etats de la région).

- Quant aux dirigeants israéliens, ils peuvent être remplacés par des personnes ne suivant pas les doctrinaires. Et qui considéreront qu’il n’est pas nécessaire, ni pour des motifs doctrinaux, ni pour des raisons de fait, que tous les membres de la communauté émigrent en Palestine.

 

A suivre …

 

 

Marcel-M. MONIN

m. de conf. hon. des universités.

 

 

(1) https://press.un.org/fr/2024/ag12599.doc.htm

(2) Pas plus, pour la France, que le vote d’une résolution en 2014 de l’Assemblée nationale française qui appelait à la reconnaissance de l’Etat de Palestine.

https://www2.assemblee-nationale.fr/scrutins/detail/(legislature)/14/(num)/981#G5

A l’occasion du vote du 10 mai 2024 de l’AG de l’ONU, le représentant de la France a déclaré que son pays était favorable à la reconnaissance de l’Etat de Palestine par l’ONU. Il eut été amusant qu’un délégué lui dise « si la France est favorable à la reconnaissance de l’Etat de Palestine, pourquoi votre président E. Macron, ne le reconnait-il pas ? » ( surtout qu’une délégation palestinienne existe déjà à Paris, et qu’il suffirait alors de lui en changer l’appellation).

(3) Pour des raisons politiques ou religieuses, divers personnages rédacteurs de textes ( Bible, …) , ont, semble-t-il, décidé que les Juifs qui vivaient dans différents pays étaient dans la situation particulière d’être un peuple, mais sans terre. Une communauté sans Etat. Et ce, après la destruction du royaume de Juda ( 586 avant notre ère) ?. Après la chute de l’ancien royaume d’Israël ( 722 avant notre ère) ? v. Sur la question, les analyses, par exemple  :

https://www.histoirealacarte.com/bible-et-histoire/les-royaumes-d-israel-et-juda-face-a-l-empire-neo-assyrien#

A l’époque moderne divers penseurs et idéologues estimèrent qu’il fallait que la communauté fut dotée d’un Etat, comme au temps jadis. Si possible sur les lieux de jadis.

Et cela fut préparé ( par l’importation de populations). Et fut fait ( par la déclaration de Ben Gourion, en profitant de ce que les Britanniques abandonnaient leur mandat).

https://mjp.univ-perp.fr/constit/il1948.htm

(4) https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMDictionnaire/1920

Lire aussi la résolution 43/177 de l’AG des N.-U. :

https://documents.un.org/doc/resolution/gen/nr0/533/87/img/nr053387.pdf?token=eTT5hap52vB031D2lw&fe=true

(5) Pays reconnaissant l’un et / ou l’autre des deux Etats :

https://www.watson.ch/fr/international/guerre/629857153-ces-pays-reconnaissent-les-etats-d-israel-ou-de-palestine

(6) avec les argumentaires habituels pour déplorer et qualifier ces actions. Évidemment, si un jour, l’Etat de Palestine était reconnu par certains autres Etats, à commencer par Israël, et par les Etats du groupe collé aux USA, le vocabulaire pour désigner les dirigeants de ce territoire connaîtrait inévitablement quelques ajustements … quasi instantanés. Quand Menahem Begin et Yitzhak Samir devinrent Premiers Ministres d’israël, on évita de leur dire, de se rappeler, et de rappeler, qu’ils furent des dirigeants, l’un de « l’Irgoun », l’autre du « Lehi ». Milices dont les activités avaient antérieurement, en raison de la nature de ces dernières (quelques massacres notamment) , été qualifiées de « terroristes ». Menahem Begin recevra même le prix Nobel de la paix. Quant aux commandos desdits mouvements, ils furent intégrés à Tsahal (nom de l’armée de l’Etat d’Israël) . Id lors du processus d’indépendance de l’Algérie. Etc…

 


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