Entebbe, 1976 : un coup de maître israélien contre le terrorisme palestinien
par Giuseppe di Bella di Santa Sofia
lundi 10 février 2025
Au cœur de l'Ouganda, en 1976, une poignée de terroristes détourne un vol Air France, prenant en otage des centaines de passagers. Leurs exigences : la libération de prisonniers palestiniens. Israël, pourtant loin de la scène, est au centre de l'équation. Commence alors une opération militaire audacieuse, un pari risqué pour sauver des vies et affirmer la détermination d'un peuple.
Un vol banal qui bascule dans l'horreur
Le 27 juin 1976, le vol Air France 139, reliant Tel Aviv à Paris, est un vol comme les autres. À bord de l'Airbus A300B4-203, des passagers de tous horizons, des familles, des touristes, des hommes d'affaires. Rien ne laisse présager l'effroi qui va suivre. Soudain, quatre individus, deux Palestiniens et deux Allemands, prennent le contrôle de l'appareil. Leurs motivations sont claires : obtenir la libération de leurs camarades détenus dans les prisons israéliennes.
Le détournement est brutal. Les pilotes sont contraints de dérouter l'avion vers l'aéroport international d'Entebbe, en Ouganda. Trois autres terroristes montent dans l'avion, juste après son atterrissage. Le dictateur Idi Amin Dada, tristement célèbre pour sa cruauté et son soutien aux mouvements terroristes, accueille les pirates avec une grande bienveillance. Pour lui, c'est l'occasion de se poser en champion de la cause palestinienne, de défier Israël et l'Occident. Comble de l'indécence, il va même jusqu'à souhaiter la bienvenue dans son "merveilleux pays" aux centaines d'otages effrayés.
La tension monte à Entebbe
À Entebbe, les otages sont transférés dans un ancien terminal vétuste et insalubre de l'aéroport. La tension est palpable. Les terroristes, armés et déterminés, les gardent jour et nuit. Les conditions de détention sont très difficiles, la chaleur étouffante, la nourriture rare. Les otages sont terrifiés, certains sont malades, d'autres blessés.
Les jours passent et les négociations n'aboutissent pas. Israël refuse de céder au chantage. Le gouvernement, dirigé par Yitzhak Rabin, est face à un dilemme : céder aux exigences des terroristes et risquer d'encourager de nouvelles actions ou tenter une opération de sauvetage risquée mais potentiellement salvatrice.
Pendant ce temps, le président ougandais Idi Amin Dada, qui soutient publiquement les Palestiniens, entre en scène. Il obtient la libération de 47 otages, principalement des femmes et des enfants, ainsi que des personnes âgées ou malades. Ce geste, motivé par des considérations politiques et une volonté de se donner une image de leader modéré, divise les otages et affaiblit la position israélienne.
Les terroristes, quant à eux, libèrent les otages non juifs, soit une centaine de personnes. Cette décision peut surprendre car elle contredit leurs revendications initiales. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce changement de stratégie : la pression internationale, l'isolement de l'Ouganda et la peur d'une escalade de violence.
Cependant, les otages israéliens restent aux mains des terroristes. La tension monte à son comble. Israël prépare en secret une opération militaire audacieuse pour libérer ses ressortissants.
Au milieu de cette crise, un acte de courage et d'humanité se produit. Le commandant de bord de l'avion d'Air France, Michel Bacos, refuse catégoriquement de quitter ses passagers israéliens, contrairement aux ordres de sa compagnie. Il déclare : "Je suis responsable de tous mes passagers, je ne les abandonnerai pas." Les membres de l'équipage suivront son exemple, restant aux côtés des otages juifs et en leur apportant soutien et réconfort.
Cet acte de bravoure témoigne de la solidarité et du courage dont ont fait preuve ces professionnels de l'aviation, qui ont choisi de rester fidèles à leur devoir et à leur conscience.
L'audace d'un sauvetage impossible
Le temps presse. Les otages sont en danger et l'opinion internationale s'impatiente. En Israël, les familles des otages manifestent, réclamant une action rapide. Le gouvernement, après de longues délibérations, prend une décision historique : lancer une opération militaire pour libérer les 105 otages israéliens et les membres de l'équipage français qui ont choisi de rester avec eux.
Préparer une telle opération est un défi immense. Il faut organiser une force de frappe, planifier l'itinéraire, coordonner l'action avec les autorités kényanes, dont l'espace aérien sera survolé. Mais surtout, il faut agir vite et efficacement pour surprendre les terroristes et éviter un bain de sang.
Le ministre de la Défense, Shimon Peres, travaille jour et nuit avec l'état-major de l'armée israélienne pour organiser une opération de sauvetage d'une ampleur sans précédent, au nom du droit à la légitime défense tel qu'il est inscrit dans l'article 51 de la Charte des Nations unies.
Cependant, cette interprétation du droit de légitime défense est contestée par certains, qui estiment que l'opération menée par Israël était une violation de la souveraineté de l'Ouganda et que les otages auraient pu être libérés par la négociation.
L'opération Tonnerre
Dans la nuit du 3 au 4 juillet 1976, quatre avions de transport Lockheed C-130 Hercules de l'armée de l'air israélienne décollent de deux bases aériennes en Israël, transportant environ 200 commandos d'élite des unités Sayeret Matkal, Sayeret Golani et Shayetet 13. Leur mission : libérer les otages détenus à Entebbe. L'opération, baptisée "Tonnerre" (en hébreu מבצע יונתן, Mivtsa Yonatan, "Opération Jonathan"), est un pari audacieux, une course contre la montre.
Les avions atterrissent sans encombre et sans être détectés sur l'aéroport d'Entebbe, plongé dans l'obscurité, à 23h00, heure locale. Les commandos, entraînés et déterminés, débarquent en silence et se dirigent vers l'ancien terminal, où sont retenus les otages. Ils progressent rapidement, suivant un plan méticuleusement préparé, éliminant les terroristes un par un. Les otages, pris de court, sont d'abord paniqués, puis soulagés de voir arriver leurs libérateurs.
Un succès retentissant
L'opération Entebbe est un véritable succès militaire. En quelques minutes, les commandos israéliens neutralisent les terroristes et libèrent la quasi-totalité des otages. Cependant, ce succès a un prix : des vies ont été perdues et des familles ont été brisées.
Le bilan humain de l'opération est lourd. Trois otages ont été tués lors de l'échange de tirs : une femme âgée de 74 ans et rescapée des camps de la mort, Dora Bloch, un jeune homme de 19 ans, Jean-Jacques Mimouni et une jeune femme de 28 ans, Malka Sorkin. Ils sont les victimes innocentes de la folie terroriste, pris au piège d'un conflit qui ne les concernait pas.
Un commandant de l'unité d'élite israélienne, le lieutenant-colonel Jonathan Netanyahu, frère aîné de l'actuel Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, est également tué. Son sacrifice restera gravé dans les mémoires, symbole du courage et de l'abnégation des soldats israéliens.
Du côté des terroristes, les sept pirates de l'air sont abattus lors de l'assaut. Ils ont semé la terreur et la mort et leur fin est sans appel.
Environ 20 militaires ougandais, pris par surprise, sont également tués dans les combats. Leur présence sur les lieux peut sembler incongrue, mais ils étaient là, peut-être par obligation, peut-être par conviction, et ils ont payé de leur vie leur fidélité au dictateur psychopathe Idi Amin Dada.
Malgré ce bilan tragique, le raid d'Entebbe est un succès retentissant. Il a sauvé la vie de plus d'une centaine d'otages, il a montré au monde entier qu'Israël ne cède pas au terrorisme et il a redonné espoir à un peuple meurtri par les attentats..
Les conséquences d'un acte historique
Après le raid d'Entebbe, l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP) a cessé de détourner des avions. Ce raid a été un grand succès contre le terrorisme, salué par de nombreux pays. Il a montré au monde entier qu'il était possible de vaincre le terrorisme par la force et la détermination.
Le raid d'Entebbe a eu des conséquences importantes sur la scène internationale. Il a renforcé la position d'Israël, conforté l'idée que la lutte contre le terrorisme pouvait justifier des actions militaires audacieuses. Mais il a aussi soulevé des questions sur la légalité de telles opérations et sur le droit des États à intervenir sur le territoire d'un autre pays.
Aujourd'hui encore, le raid d'Entebbe suscite des débats passionnés. Certains y voient un acte héroïque, un symbole de courage et de détermination. D'autres le considèrent comme une violation de la souveraineté de l'Ouganda, une action disproportionnée.
Quoi qu'il en soit, le raid d'Entebbe reste un événement marquant de l'histoire du XXe siècle. Il a marqué une étape importante dans la lutte contre le terrorisme et a profondément influencé les relations internationales.