L’Arménie se distancie de la Russie et opte pour l’armement indien

par Patrice Bravo
samedi 26 avril 2025

La politique de Nikol Pachinian, qui se distancie de plus en plus clairement de la Russie, affiche de nouvelles nuances. La ligne de l'Arménie visant la "substitution" de la Russie dans tous les domaines a également touché la coopération militaro-technique. 

L'Arménie est devenue le plus grand acheteur d'armes indiennes, selon un rapport économique du ministère indien des Finances au parlement. Selon le ministère indien de la Défense, le montant des contrats signés pour l'achat d'armements et d'équipements militaires par Erevan auprès de New Delhi pour les années fiscales 2024-2025 a atteint 600 millions de dollars. 

En 2022-2024, l'Arménie a acheté en Inde 43% des armes qu'elle a importées, écrit Reuters citant l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri). Sachant qu'entre 2016 et 2018, ce chiffre était presque nul. 

Le partenariat entre les deux pays dans le domaine militaire a commencé encore plus tôt. En 2018, peu après l'arrivée au pouvoir de Nikol Pachinian, le journal Times of India écrivait qu'une délégation arménienne en visite en Inde s'était rendue sur le polygone militaire de Pokharan dans l'État du Rajasthan, où les militaires arméniens avaient assisté à des tirs de systèmes de missiles Pinaka. 

En 2020, ce même journal a rapporté que l'Inde avait conclu un accord avec l'Arménie pour lui fournir quatre stations radar de contre-batterie Swathi, le montant de la transaction étant estimé à environ 40 millions de dollars. Comme alternatives, des analogues russes Zoopark-1M et polonais Liwiec avaient été envisagés, mais la préférence a été donnée à l'offre indienne. 

En octobre 2022, le ministre arménien de la Défense, Souren Papikian, s'est rendu à New Delhi. Et en novembre 2022, les médias indiens ont publié des informations selon lesquelles la société privée de défense indienne Kalyani Strategic Systems (KSSL) "avait reçu une commande d'exportation pour des plateformes d'artillerie de 155 mm, qui seront fabriquées dans un délai de trois ans" pour un "État étranger ami" anonyme. Le contrat s'élevait à 155,5 millions de dollars. La société n'a révélé ni le client ni la quantité d'armements commandés, mais a déclaré que la commande était destinée à une "zone non conflictuelle". 

Cependant, les médias ont appris de sources au ministère indien de la Défense que ce client dans le cadre d'un accord intergouvernemental était l'Arménie. 

En outre, en 2022, l'Arménie a passé commande en Inde pour l'achat de 15 unités de systèmes de défense aérienne Akash-1S pour 720 millions de dollars, devenant ainsi le premier acheteur étranger de ces systèmes. 

En 2023, l'Arménie a témoigné de l'intérêt pour les systèmes de défense antiaérienne israélo-indiens MR-SAM (le piquant de la situation est qu'Israël est un partenaire stratégique de l'Azerbaïdjan), ainsi que pour les drones de combat Tapas-BH-201 (Rustom-II). 

En novembre 2023, un autre journal indien, The Eurasian Times, a rapporté la signature d'un contrat pour l'achat du système de lutte anti-drones ZADS (Zen Anti-Drone System) pour 41,5 millions de dollars. Le site Business Insider a titré son article sur ce contrat et d'autres contrats d'armement de l'Arménie de manière assez explicite : "L'achat d'armes françaises et indiennes par un allié russe est un autre signe que Moscou perd de son influence dans les pays voisins." 

En février 2024, Souren Papikian a cité l'Inde et la France comme étant parmi les principaux partenaires de l'Arménie dans le domaine des fournitures d'armements. En juillet, les médias indiens ont rapporté que l'Arménie était devenue le plus grand importateur d'armement en provenance de l'Inde. 

En février 2025, le Indian Defence Research Wing, citant le ministère indien de la Défense, a indiqué qu'"en 2023-2024, les trois principales destinations d'exportation des produits de défense indiens étaient les États-Unis, la France et l'Arménie." 

En mars, une délégation militaire arménienne s'est à nouveau rendue en Inde et des négociations ont eu lieu avec le commandement de l'école d'entraînement en haute montagne High Altitude Warfare School et une unité des forces spéciales, la brigade d'élite indienne Shatrujeet. Au cours des négociations, le sujet de la formation des soldats des forces spéciales arméniennes à la base de la HAWS a été abordé, où des militaires de plusieurs puissances de l'Otan avaient auparavant suivi une préparation aux opérations de combat en haute montagne. 

Tous ces contacts et contrats ainsi que le renforcement de la coopération déjà étroite entre l'Arménie et la France, aussi bien que les tentatives d'établir des liens militaro-techniques avec la Bulgarie et la Belgique, semblent précisément être une prise de distance vis-à-vis de la Russie.

Alexandre Lemoine

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