L’Europe compte provoquer une fuite des cerveaux des États-Unis
par Patrice Bravo
mercredi 7 mai 2025
Bruxelles et Paris espèrent que le mécontentement envers la politique de la Maison Blanche fera venir les scientifiques américains.
La France, conjointement avec la Commission européenne, est déterminée à faciliter le déménagement vers le Vieux Continent des scientifiques résidant aux États-Unis et mécontents tant de la politique que de la décision du président Donald Trump de réduire le financement dans plusieurs domaines. Cependant, cela ne concernera probablement pas les scientifiques engagés dans la recherche fondamentale. Et il n'est pas encore tout à fait clair comment exactement ce déménagement en Europe sera stimulé.
Le président français Emmanuel Macron a l'intention de profiter de la décision de la Maison Blanche de réduire le financement des universités. Il a organisé la conférence Choose Europe for Science avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.
Son objectif principal consiste à appeler les scientifiques américains à déménager en Europe. Le motif indiqué est idéologique. L'Élysée souligne que les libertés académiques sont menacées, et que l'Europe peut offrir une vision plus large sur la résolution des problèmes de l'humanité.
"Personne n'aurait pu imaginer que cette grande démocratie, dont le modèle économique repose si fortement sur la science libre, l'innovation et sa capacité, au cours des trois dernières décennies, à innover davantage que les Européens et à diffuser cette innovation plus largement, commettrait une telle erreur", a déclaré le président français. Et d'ajouter que le sort de la recherche scientifique ne devrait pas être sujet aux attaques du "diktat d'une minorité".
D'une certaine façon, un tel message est plus troublant qu'encourageant : il est proposé aux scientifiques de traverser l'océan et l'argument principal avancé est avant tout l'unité idéologique des valeurs européennes et des valeurs de la classe intellectuelle.
Toutefois, le choix en faveur de l'Europe pourrait effectivement devenir pertinent pour certains scientifiques. En effet, plusieurs domaines d'activité scientifique ont été reconnus inutiles par la Maison Blanche. Et les scientifiques sont confrontés à une question qui ne se limite pas à savoir s'ils vivent parmi des personnes partageant les mêmes idées ou non. Il s'agit de questions vitales liées aux finances.
Ursula von der Leyen, debout aux côtés de Macron, a annoncé que l'Union européenne allait proposer une nouvelle enveloppe de 500 millions d'euros pour la période 2025-2027 "afin de faire de l'Europe un pôle d'attraction pour les chercheurs". "Le rôle de la science à l'heure actuelle est remis en cause. L'investissement dans la recherche fondamentale, libre et ouverte est remis en question. Quelle énorme erreur d'appréciation. La science est la clé de notre avenir ici en Europe", a-t-elle affirmé, en clôture de la conférence.
Les médias notent que la France manifeste un intérêt particulier pour attirer des scientifiques engagés dans la recherche sur les maladies infectieuses, l'intelligence artificielle et le changement climatique. Paris est prêt à allouer 100 millions d'euros à ces fins.
Le processus de relocalisation des laboratoires et des écoles est déjà lancé. Cependant, pour des raisons linguistiques et en raison des liens développés, ils déménagent principalement au Canada et en Grande-Bretagne. Reste à savoir si la France ou l'UE dans son ensemble pourront s'impliquer dans ce processus, indiquent les experts.
L'Union européenne dispose de ressources limitées pour influencer la science. Premièrement, l'UE a des problèmes financiers. Deuxièmement, les établissements d'enseignement sont pour la plupart soit privés, soit nationaux, mais pas européens.
Des subventions peuvent être allouées, et Bruxelles possède une expérience pour attirer des scientifiques et des étudiants. Mais l'ampleur de la relocalisation potentielle depuis les États-Unis et la capacité de l'UE à y investir d'importantes ressources ne sont pas encore tout à fait claires. Il s'agit probablement de quelques domaines scientifiques intéressants pour les Européens, mais pas d'un déménagement des scientifiques dans l'ensemble.
Pour les États-Unis, il est important que les scientifiques ne décident pas de déménager chez un adversaire géopolitique, c'est-à-dire la Chine. En ce sens, la Maison Blanche devrait peut-être faire preuve de prudence.
Un des exemples similaires est la véritable "chasse aux cerveaux" qui a commencé dans les républiques post-soviétiques, en particulier en ce qui concerne les scientifiques nucléaires. Non seulement les pays occidentaux, mais aussi les Chinois et les Iraniens avaient essayé de les embaucher, rappellent les experts.
Alexandre Lemoine
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Source : https://pierreduval.substack.com/p/leurope-compte-provoquer-une-fuite