Mahomet, Bouddha ou Jésus-Christ
par Geneviève
lundi 6 février 2006
Je me permets de réagir à la polémique soulevée par l’histoire des caricatures de Mahomet. J’ai vu prendre le feu de toutes parts sans vraiment comprendre la raison d’une telle violence. Vrai que je n’étais pas au balcon lorsque cela s’est produit, ce qui n’a fait qu’accroître ma surprise et mon étonnement. Je me suis donc documentée, et j’ai lu, sur Internet et dans la presse locale : Le Parisien du Val d’Oise du 3 févirer, le site très complet du Nouvel Observateur...
Tout d’abord, un rapide coup d’oeil sur l’objet de la polémique : douze caricatures, dénotant par elles-mêmes violence et mauvais goût. Elles ne m’ont pas amusée, non. Pourtant c’est souvent l’objet des caricatures : croquer à l’excès avec humour, provoquer, amuser, interpeller. Pour la provocation, oui, c’est réussi. L’humour ? J’ai bien cherché, j’y ai trouvé de la haine, de l’irrespect, du déni, un certain manque d’imagination en général, et des formulations tordues manquant de simplicité et de lisibilité. Bref, toutes les chances pour que les messages que l’on a voulu véhiculer par ces images, s’il y en avait, puissent être incompris par de nombreux citoyens de tout bord, de toute culture et de tous horizons. Au fait, quel message ?
Difficile à saisir, de source danoise apparemment, un message émis à un moment que j’ignore, pour des raisons que j’ignore. Oui, parce que lorsque je vois la tournure des évènements, puisque les drapeaux de l’Union européenne brûlent à Gaza, puisque le monde entier réagit à ces publications, puisque des menaces ont cours, au moins faut-il nous dire clairement d’où est parti le feu, et quand. Dans sa déclaration du vendredi 3 février sur France 2, Madame Elisabeth Guigou se demande pourquoi cette affaire explose quatre mois après la publication des dessins. Pourquoi cet effet journalistique à retardement sur un évènement déjà ancien ? La coïncidence est étrange avec un autre évènement, celui de Viterbo au Nord de Rome, en Italie (www.libération.com). Un prêtre est accusé par un athée d’abuser de la crédulité des gens sur l’existence même de Jésus. La question est posée : Jésus-Christ a-t-il vraiment existé ? Que veut-on nous dire au juste ? D’une part, des caricatures font un amalgame fulgurant et déplacé entre Islam et terrorisme. D’autre part, un procès digne de Don Camillo, sur une question qui n’est pas nouvelle (Paul Lapeyre, 1936 ; Prosper Alfaric et Michel Onfray, 2005...), a eu l’antériorité de quelques jours seulement par rapport aux caricatures de Mahomet. Et je ne peux m’empêcher de faire le lien entre les deux affaires. Ceci étant, la caricature du procès d’un prêtre pour avoir abusé de la crédulité des catholiques aurait peut-être pu faire bondir les Européens pratiquants hors de leurs gongs, mais il est vrai que cela n’est pas arrivé, tout du moins ne l’ai-je pas entendu autour de moi, ni lu avec autant de débordements dans la presse. Dans l’approche culturelle européenne, nous avons peut-être déjà fait quelques concessions sur certains aspects d’une religion, mais je rejoins en cela Mgr Philippe Barbarin, archevêque de Lyon, qui affirme, comme le rapporte le site www.permanent.nouvelobs.com : "Je n’aimerais pas qu’on fasse cela avec le visage de Jésus. Si je vois cela dans une publication à propos de Jésus, je reconnais que cela me blesse".
Bouddha n’a pas encore été cité, mais peut-être, d’ici quelques jours, aurons-nous droit à une remise en question profonde de la philosophie de cet homme, qui d’ailleurs, n’a peut-être pas existé, qui sait...
Au-delà de l’offense que chaque individu peut ressentir à la présentation de ces caricatures, je me sens, on l’a vu, manipulée par l’évènement et les médias qui l’ont retransmis. La liberté d’expression de la presse, la solidarité entre les organismes de presse du monde entier, la dénonciation des excès de toutes parts, oui, sans doute. La liberté du lecteur, j’en doute. En tous cas, une façon toute particulière de lutter contre la menace terroriste et pour la paix dans le monde. À méditer.