Bientôt la fin du YouTube game français ?

par MathildFRW
mardi 14 mars 2023

Mcfly et Carlito, Norman, Cyprien, Mastu, EnjoyPhoenix… Ça vous a peut-être échappé, mais depuis quelques mois, ces youtubeurs, autrefois très actifs, se font de plus en plus rare. À l’apogée de leur art il y a quelques mois, chaque vidéo cumulait des millions de vues instantanément, les plateaux télé se les arrachaient, même les politiciens les réclamaient. Mais alors, que leur arrive-t-il ? Burn-out, dépression, lassitude ou laisser-aller. Comment expliquer ce phénomène de désertion qui touche de plus en plus de youtubeurs ? Essayons de décortiquer ce phénomène ensemble.

2010 - 2020 : l’apogée du YouTube game français

Créé en 2005, YouTube a véritablement explosé au cours des années 2010 en France. Pendant ces années de gloire, des centaines de créateurs de contenus sont apparus. Tous proposaient des courtes vidéos, parfois instructives et parfois funs, voire parfois un peu débiles. Mais qu’à cela ne tienne, elles appâtaient des milliers de viewers chaque jour. Chaque soir après les cours, on se ruait sur l’écran familial, posé en plein milieu du salon (toi-même, tu sais !). Pour beaucoup de « millenials », ces vidéos étaient un parfait moyen pour apprendre à se maquiller, se coiffer, se raser proprement ou s’habiller à la mode de chez nous.

Au fil des mois, on s’est attaché à ses youtubeurs. Les voir tous les jours nous amenait à les considérer comme des amis. Rapidement, les contenus se sont professionnalisés et les marques ont commencé à débarquer. Est alors venue l’heure des meet-up et des conventions spécialisées. Entre 2010 et 2015, le nombre de vidéos a explosé. Certains sont devenus de vrais dieux de YouTube avec un nombre d’abonnés faramineux : Cyprien, Norman, Enjoyphoenix, Tibo in shape sont ainsi devenus les « goats » de YouTube en quelques mois. Plus tard, les ont rejoints les désormais mythiques Mcfly et Carlito, Léna situations ou Michou.

2020 : la fin d’une ère

Pendant des années, ces créateurs de contenus nous ont habitués à un certain rythme de vidéos (samedi : EnjoyPhoenix, dimanche : Mcfly et Carlito…). Oui, mais voilà, leur calendrier de publication a commencé à voler en éclat après 2020 (je ne vais pas te refaire le topo “à cause de la pandémie de la covid-2019, blablabla, on a assez lu et entendu cette satanée phrase). D’autres Youtubeurs ont suivi le même chemin dans le même laps de temps, comme s’ils s’étaient tous passé le mot. Adieu les vidéos hebdomadaires et bonjour aux vidéos « spontanées ». Depuis, certains ne publient plus qu’une fois tous les mois, quand d’autres décident de faire une pause à durée indéterminée. Mais… pourquoi ?

Une ambiance morose

Ça ne vous sûrement pas échappé, il y a un avant et après covid. L’ambiance est d’une tristesse à faire faner des marguerites, les jeunes préfèrent traîner dans les bars, les actifs remettent toute leur vie professionnelle en question, et les personnes âgées se demandent si elles auront la chance de pouvoir partir en retraite. On ne va pas parler des prix qui s’envolent, de la guerre, du changement climatique… C’est bon, vous êtes assez déprimés ? Il semble que vous n’êtes pas les seuls. Les Youtubeurs aussi, semblent avoir été touchés par cette morosité générale.

Des concepts trop audacieux

Vous pensez qu’être créateur de contenu, c'est avoir la belle vie ? Alors, oui, ils voyagent partout dans le monde, le plus souvent gratuitement, ils rencontrent leurs idoles, passent leur après-midi à rire devant une caméra, font des expériences que la plupart d’entre nous ne réaliseront jamais… Mais la réalité comporte une part d’ombre :

Pendant des années, les vidéastes ont passé sous silence des points négatifs de peur de paraitre trop prétentieux. Ils ont enchainé tournages, montages, voyages, publications et autres conventions. Mais, ils ont commencé à repenser ce mode de vie durant les confinements. Depuis, il n’est plus question de s’acharner à la tâche, le plus important, c'est leur santé et leur famille.

Pour contrer le manque de vidéos, ils ont donc décidé de lancer des projets toujours plus fous : inviter des guests de plus en plus nombreux et de plus en plus prestigieux, privatiser des lieux de plus en plus grandioses, proposer des idées toujours plus originales. Bref, une course à la perfection qui commence à leur bruler les ailes.

Un algorithme décevant

Vous vous êtes déjà rendus sur la page d’accueil de YouTube récemment ? Rien ne vous choque ? Avec l’explosion de Tik Tok, toutes les plateformes réclament leur part du gâteau. Toutes mettent en avant de courtes vidéos qualifiées de « divertissantes ». Ce qui semble plaire, en 2023, ce sont les vidéos snack que l’on peut consommer en moins d’une minute et les vidéos aux titres et miniatures toujours plus putaclics. Les vidéastes qui n’en proposent pas sont rapidement mis au rebut et leurs vidéos se retrouvent rarement en tendance.

Les youtubeurs qui ont passé des jours, voire des semaines pour créer un contenu de qualité, ne sont alors plus récompensés par la plateforme qui les a vus naitre. Avouez que ça doit être assez rageant !

Des haters trop virulents

Ah ! Les haters ! Le phénomène n’est pas nouveau. Des lois et des structures sont mises en place contre le harcèlement, les influenceurs s’en font eux-mêmes les porte-parole sur leurs réseaux, mais rien n’y fait : les « rageux » sont toujours là et les vagues de haine ne faiblissent pas.

Chaque vidéo peut être sujette à des vives critiques. Vous allez me dire : « C’est le jeu ma pauvre Lucette. » Mais est-il vraiment nécessaire de tacler gratuitement une personne juste parce qu’elle s’expose sur le net ? Dix minutes de vidéo ne peuvent pas être représentatives de l’entière personnalité d’un être humain, mais dix minutes de harcèlement peuvent suffire à le marquer à vie. Pensez-y !

Une ambiance nationale déprimante, des concepts ambitieux, des haters virulents et un algorithme décourageant ; ce n’est pas pour rien que les youtubeurs soient de plus en plus nombreux à jeter l’éponge et à vouloir faire une pause. Après des années à nous avoir habitués à leur présence régulière, il va falloir faire le deuil de cette époque révolue. Une chose est sûre, les vidéastes vont devoir se réinventer et trouver de nouvelles façons de nous divertir et de nous fidéliser, tout s’octroyant des moments « off » pour protéger leur santé physique et mentale.


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