La légion est à l’honneur

par Félicien Arcuel
jeudi 3 janvier 2013

La promotion publiée au Journal Officiel du 1er janvier 2013 manie la dérision avec talent.

Bedos (l’humoriste, pas son fils Narcisse) disait que « la légion d’honneur pour un humoriste était une faute professionnelle ». Mais il n’y a pas que des rigolos parmi les 125 000 décorés vivants de l’ordre. Avant toute chose, il faut rappeler que, contrairement aux idées reçues, la Légion d’Honneur ne se réclame pas. Elle est proposée par les Ministres (en général de tutelle) à la grande chancellerie de la Légion d’Honneur qui instruira le dossier avant de proposer les noms au Président de la République.

Les noms qui nous interpellent sont en général les acteurs, people ou sportifs ce qui représente environ 5% d’une promotion mais qui sont sujets à discussions, polémiques, voire railleries (le cas Daniela Lumbroso en est un exemple parmi d’autres).

La promotion de ce 1er janvier n’y fait pas exception.

On y trouve tous les cas de figures parmi lesquels trois sont remarquables : deux sportifs (le tennisman Jo Wilfried Tsonga et le perchiste Renaud Lavillenie) et un artiste : l’auteur de bande-dessinée Jacques Tardi.

Le cas Jo Tsonga : l’ironie veut que cette décoration soit remise à un célèbre exilé fiscal (Tsonga habite en Suisse depuis de nombreuses années) à un moment de notre histoire où les polémiques enflent à ce sujet depuis l’affaire Depardieu. On pourra objecter que le numéro 5 mondial paie des impôts en France puisque les gains obtenus dans les tournois français comme Roland Garros sont taxés à la source. Des impôts oui, mais pas ses impôts…

L'autre cas d’école sportif, celui de Renaud la Villenie, ne fait qu’illustrer un point de règlement. Le champion olympique à la perche aurait dû comme Tony Estanguet, Yannick Agnel, Camille Muffat, Florent Manaudou et les autres médaillés des Jeux de LOndres 2012 recevoir la légion d’honneur des mains de François Hollande. Mais las. Il a appris que son nom ne figurait pas dans le Journal officiel en raison d’un casier judiciaire non vierge (une condamnation pour un accident de moto dont il a été jugé responsable en 2007).

Une immense déception déversée ce matin dans l’Equipe qui tranche singulièrement avec le bras d’honneur lancé aux gens de ladite légion par le dessinateur Jacques Tardi.

L’auteur d’Adèle Blanc Sec a rejoint en deux communiqués lapidaires les illustres rebelles de la légion Aragon, Camus, Sartre ou Beauvoir : "J'ai appris avec stupéfaction par les médias, au soir du 1er janvier, que l'on venait de m'attribuer d'autorité, et sans m'en avoir informé au préalable, la Légion d'honneur !"… "Etant farouchement attaché à ma liberté de pensée et de création, je ne veux rien recevoir, ni du pouvoir actuel ni d'aucun autre pouvoir politique, quel qu'il soit. C'est donc avec la plus grande fermeté que je refuse cette médaille".

La légion, un honneur voire un bonheur donc, mais pas pour tout le monde…


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