L’émeute zéro bobo, cela n’existe pas !
par Alain Hertoghe
mercredi 22 mars 2006
Cyril Ferez, 39 ans, employé d’Orange et membre du syndicat Sud-PTT, blessé samedi dernier en marge de la manifestation parisienne contre le CPE, se trouvait toujours, ce mercredi matin, entre la vie et la mort. Les médecins de l’hôpital Henri-Mondor, à Créteil, réservaient encore leur pronostic. S’il survit, il pourrait souffrir de séquelles neurologiques.
A ce stade des enquêtes en cours et sur la base des informations disponibles, impossible de connaître les causes précises du coma du syndicaliste (dépêches AFP, AFP bis, AP, Reuters). Ce qui n’a pas empêché Sud-PTT de conclure que le gouvernement tente de couvrir une bavure policière. Le ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy s’est d’ailleurs senti obligé de recevoir sans tarder une délégation du syndicat au sein duquel milite ce célibataire, père d’un enfant de dix ans. Libération n’hésite pas à déjà évoquer l’ombre d’une bavure. Des sites Internet d’extrême-gauche se sont empressés de faire du militant de Sud-PTT un martyr de l’Etat policier...
Dans une démocratie, aucune lutte politique ou sociale ne vaut qu’un homme meure ou soit même blessé. Et le drame qui frappe Cyril Ferez, sa famille et ses amis nous afflige tous. Dans les circonstances actuelles, l’entêtement du Premier ministre à prolonger son bras de fer avec les syndicats est porteur de nouvelles tragédies potentielles. François Hollande a raison de se demander si Dominique de Villepin est un dirigeant responsable. Le premier secrétaire du Parti socialiste pose tout haut la question qui taraude un nombre grandissant d’élus de la majorité... et de plus en plus de Français.
Au-delà du cas de Cyril Ferez, et en attendant les résultats des enquêtes en cours, il faut toutefois raison garder. Tous les témoins directs des affrontements avec les forces de l’ordre provoqués par des casseurs, à la fin de chaque manifestation anti-CPE, ont noté l’impressionnante retenue des CRS et des gendarmes mobiles. Pendant des heures, ces derniers subissent sans broncher la violence extrême des émeutiers. Jusqu’à présent, les forces de l’ordre ont eu à déplorer plus de blessés que les voyous qui les agressent systématiquement après l’ordre de dispersion d’une manifestation. En fait, l’étonnant, c’est qu’il n’y ait pas eu de blessé grave plus tôt...
Pas plus qu’il n’y a de guerre zéro mort ou de société zéro risque, il n’existe de manifestation zéro bobo et, encore moins, d’émeute zéro hématome. Ceux qui participent aux scènes de guérilla urbaine post-manifestation et ceux qui viennent y assister comme au spectacle (certains avec des enfants...) ne peuvent pas faire semblant d’ignorer qu’aucun principe de précaution ne leur garantit de rentrer sains et saufs chez eux. Tôt ou tard, pour rétablir l’ordre public face à des enragés qui ont pour seul but d’en découdre avec eux, CRS et gendarmes mobiles doivent faire usage de la force. Et l’usage de la force peut entraîner des accidents plus ou moins graves. Un simple coup peut tuer un être humain. C’est une évidence, mais il semble malheureusement nécessaire de le rappeler...