Ségolène, reine de la communication

par jean charles espy
vendredi 7 avril 2006

Vous ne pourrez pas la rater en cette fin de semaine. Chez d’Arvor, en couverture de quatre hebdos, en librairie pour la sortie de son livre, et bien sûr sur Internet. La communication, ça marche bien, Madame Royal !

Le 17 mars 2005, la une de Paris Match montrait côte à côte François Hollande et Nicolas Sarkozy. A l’époque (juste avant les européennes) on évoquait un face à face présidentiel entre les deux hommes. Un an après, si Nicolas Sarkozy reste le candidat de la droite préféré des Français, c’est Ségolène Royal, à gauche, qui caracole, à 14 mois de l’élection présidentielle, en tête des médias.

Elle est partout (voir l’article de jeudi du monde.fr). Selon le dernier sondage CSA-Le Parisien du 6 avril, 41% des Français souhaitent que la présidente de la région Poitou-Charentes soit la candidate du PS en 2007, le sondage LH2 pour Libération (février 2006) la juge, au-delà de la popularité, à la fois compétente (62%) et « capable de représenter la France à l’étranger » (53%). Cette ascension et cette proximité dans les sondages avec Nicolas Sarkozy n’a rien de surprenant. Si le discours est différent, candidature de gauche oblige, Ségolène Royal applique, dans la méthode, des approches en communication que le président de l’UMP ne désavouerait pas.

Même positionnement générationnel, même langage proche des préoccupations des Français, même exposition de la vie privée, même tactique de coups médiatiques, même opposition des ténors de son parti, même art d’occuper le terrain, même pugnacité, même manière de s’exprimer simplement et concrètement, même ambition élyséenne ouvertement affichée .

Madame Royal irrite ou fascine, mais elle intéresse, y compris à droite.
Nicolas Sarkozy ne cache d’ailleurs pas son admiration pour elle : « J’ai toujours dit qu’elle était la personnalité la plus intéressante du PS... Nous sommes tous les deux des atypiques qui se ressemblent ». Deux différences majeures, cependant, entre les deux postulants : Ségolène Royal ne « verrouille » pas le PS, et elle ignore tout du monde économique. En fine tacticienne, elle contourne les obstacles. De tous les présidentiables du PS, elle est la seule à ne pas s’être exprimée au congrès du Mans en novembre dernier. Elle est également la seule à ne pas être présente aux cérémonies commémoratrices de François Mitterrand, préférant aller soutenir, accompagnée d’une vingtaine de journalistes, la nouvelle présidente chilienne socialiste Michelle Bachelet, tout un symbole !

Ségolène Royal sait très bien qu’elle bénéficie de peu de soutiens au sein de l’état-major de son parti, et que la seule manière d’être en tête des présidentiables PS est de s’imposer auprès des militants dans un premier temps. « Si l’élan se poursuit, ce que je crois, si les électeurs de gauche me demandent, ce que j’espère, alors les autres n’auront pas le choix, ce sera moi », déclarait-elle dans Le nouvel observateur qui déjà, le 15 décembre, lui consacrait sa couverture (au moins le NO ne cache pas son jeu).

Sa seule chance réside dans la poursuite de son échappée solitaire.
Pendant que les six autres présidentiables font campagne auprès des sections locales PS, en vue de primaires prévues en novembre 2006, Ségolène Royal joue habilement la carte des sondages, se positionne en vrai phénomène d’opinion, rassembleur, répondant à l’inquiétude d’une grande partie des électeurs de gauche pour cette élection de 2007, encore sous le coup de l’échec de 2002. A François Hollande et Julien Dray de faire le boulot de soutien au sein du parti.

En incarnant une gauche innovante, moins parisianiste, moins conservatrice, plus jeune, plus dynamique, plus charismatique, plus « famille » et féminine (le précédent d’Angela Merkel en Allemagne facilite la démarche), Ségolène Royal est en train de réussir une campagne auprès de l’électorat de gauche. Mais réussira-t-elle à franchir l’obstacle des primaires ?
Réponse en novembre.


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