Ukraine : Gabriel Attal attaque durement le RN et Marine Le Pen !

par Sylvain Rakotoarison
mercredi 28 février 2024

« Vous m’interrogez sur l’hypothèse d’un déploiement de soldats français ou européens sur le sol ukrainien. Quand on lit les enquêtes, notamment celle du "Washington Post" le 30 décembre dernier, il y a lieu de se demander si les troupes de Vladimir Poutine ne sont pas déjà dans notre pays, grâce à vous et à vos troupes, madame Le Pen ! » (Gabriel Attal, le 27 février 2024 dans l'hémicycle).

Les propos du Président Emmanuel Macron lors de sa conférence de presse du 26 février 2024 à l'issue de la conférence internationale de soutien à l'Ukraine à l'Élysée a fait beaucoup réagir. En effet, en n'excluant pas la possibilité de troupes européennes au sol ukrainien, le chef de l'État voulait faire réagir, amener tous les pays à se positionner et menacer la Russie, car depuis deux ans, la Russie n'a jamais fait que cela en évoquant son armement nucléaire ou d'autres éventualités. Car l'objectif d'Emmanuel Macron était le sursaut. D'un point de vue diplomatique, l'objectif est donc atteint.

D'autant plus que jamais Emmanuel Macron n'a indiqué vouloir envoyer des troupes sur le front ukrainien, il a simplement laissé entrevoir la possibilité future de le faire : « Il n’y a pas de consensus aujourd’hui pour envoyer de manière officielle, assumée et endossée des troupes au sol. Mais en dynamique, rien ne doit être exclu. Nous ferons tout ce qu’il faut pour que la Russie ne puisse pas gagner cette guerre. (…) Beaucoup de gens qui disent “Jamais, jamais” aujourd’hui étaient les mêmes qui disaient “Jamais des tanks, jamais des avions, jamais des missiles à longue portée” il y a deux ans. (…) Ayons l’humilité de constater qu’on a souvent eu six à douze mois de retard. C’était l’objectif de la discussion de ce soir : tout est possible si c’est utile pour atteindre notre objectif ! ».

Naturellement, cela a ébouillanté la classe politique française et la séance des questions au gouvernement du lendemain, mardi 27 février 2024 à l'Assemblée Nationale, a été l'objet de six questions sur le sujet dont deux avec une réponse du Premier Ministre Gabriel Attal qui s'est attaché à défendre très fermement la position du Président de la République. Chaque fois, en réponse à un président de groupe.

La première question a été posée par Marine Le Pen, présidente du groupe RN. Commençant son intervention par une citation de François Mitterrand contre l'envoi de troupes en Bosnie, Marine Le Pen s'est interrogée sur la pensée présidentielle : « À l’heure où tant de personnes, y compris des responsables politiques, parlent de la guerre avec une telle désinvolture, la cheffe de l’opposition que je suis ne peut rester silencieuse devant les propos d’une extrême gravité qu’Emmanuel Macron a tenus hier soir. (…) En affirmant que l’envoi de troupes au sol n’était pas exclu, Emmanuel Macron a franchi une étape supplémentaire vers la cobelligérance, faisant planer un risque existentiel sur soixante-dix millions de Français, et plus particulièrement sur nos forces armées, déjà déployées à l’est de l’Europe. ».

Le problème, c'est que le RN est peu qualifié pour parler de la Russie et de l'Ukraine avec une certaine crédibilité, et c'est ce que lui a répondu le Premier Ministre sans prendre de gants : « On a failli y croire : à vous entendre, vous donniez l’impression de dénoncer l’agression russe contre l’Ukraine, alors que vos députés européens ont systématiquement voté contre toutes les sanctions proposées contre la Russie ou contre les oligarques. On a failli y croire quand, avec le plus grand des cynismes, vous avez rendu hommage à la mémoire d’Alexeï Navalny, alors que vos députés ont refusé de voter les textes proposés au Parlement Européen visant à soutenir cet opposant russe mort dans les geôles de la Russie. En réalité, madame Le Pen, vous attendiez la première occasion de rappeler vos vraies fidélités. Vous attendiez la première occasion de montrer votre vrai visage, celui d’une responsable politique qui refuse tout simplement de reconnaître que cette guerre est le fait d’un pays autoritaire, un pays où les opposants meurent dans des geôles. Ce pays, c’est la Russie, qui a imposé une guerre à l’Europe et qui frappe une démocratie, l’Ukraine. Et, visiblement, vous refusez d’admettre que ce n’est pas seulement une guerre contre l’Ukraine qu’a engagée Vladimir Poutine, mais aussi une guerre contre des valeurs qu’il exècre, celles de la démocratie et de la liberté. ».
 

Et Gabriel Attal d'insister sur la menace majeure que représente la Russie d'aujourd'hui pour l'Europe : « Cette guerre, c’est celle de la Russie pour imposer la loi du plus fort, pour déchirer les règles internationales, pour remettre en cause la souveraineté des États. Si nous l'acceptons, si nous nous résignons, si nous détournons le regard, personne ne sait où la Russie s’arrêtera. Ce n’est pas un hasard si des pays historiquement neutres, comme la Suède et la Finlande, font le choix de rejoindre l’OTAN. Ce n’est pas un hasard, madame Le Pen ! Ce n’est pas un hasard si, comme le rappelait le Président de la République hier, ce qui paraissait impossible pour l’Europe il y a encore deux ans, livrer des armes à l’Ukraine, est finalement devenu une réalité. La Russie pensait écraser l’Ukraine en quelques jours ; elle s’est heurtée à la résistance exceptionnelle du peuple ukrainien. Si nous vous avions écoutés, nous n’aurions pas accompagné les Ukrainiens face à cette agression. La Russie imaginait que les démocraties étaient faibles. Nous l’avons surprise par la force de notre réaction et de notre soutien aux Ukrainiens. Oui, le Kremlin mise sur la lassitude et sur l’usure, sur l’oubli, et sur la complaisance de ceux qui l’ont soutenue, défendue, voire idolâtrée. Oui, la Russie durcit le conflit en Ukraine, mais aussi sur son territoire, avec une oppression de plus en plus forte. C’est aussi le cas vis-à-vis des autres nations : si cette guerre frappe durement l’Ukraine et les Ukrainiens, la Russie a également choisi de s’en prendre à la France et aux alliés de la démocratie par des manœuvres de déstabilisation informationnelle. Vous le savez très bien, sans jamais les dénoncer, des opérations d’ingérence et des interférences ont été révélées ces dernières semaines sans que cela ne vous pose aucun problème ! Cette entreprise de déstabilisation massive ne s’arrêtera pas si nous ne réaffirmons pas notre soutien plein et entier aux Ukrainiens. C’est ce qu’a fait le Président de la République hier. ».

Enfin, le chef du gouvernement a ciblé au cœur plus particulièrement le RN : « Madame Le Pen, vous défendiez une alliance militaire avec la Russie. Ce n’était pas il y a cinq ou dix ans, mais il y a seulement deux ans, dans votre programme pour l’élection présidentielle. Si vous aviez été élue en 2022, nous ne serions pas en train de fournir des armes aux Ukrainiens pour qu’ils se défendent, mais à la Russie pour écraser les Ukrainiens ! C’est la réalité ! Relisez votre programme ! Vous m’interrogez sur l’hypothèse d’un déploiement de soldats français ou européens sur le sol ukrainien. Quand on lit les enquêtes, notamment celle du "Washington Post" le 30 décembre dernier, il y a lieu de se demander si les troupes de Vladimir Poutine ne sont pas déjà dans notre pays, grâce à vous et à vos troupes, madame Le Pen ! ».
 

Ce qui a fait tweeter Fabien Léger ceci : « Je crois que MLP va hésiter longtemps avant d'oser lui reposer une question... ? » ou encore : « Ça, ce sont les visages des députés insoumis juste après l'uppercut. Aux dernières nouvelles, ça va pas fort. Ils n'ont plus qu'à se noyer dans la vodka... », tandis que la ministre déléguée chargée de l'Enfance, de la Jeunesse et de la Famille Sarah El Haïry a lâché de son fauteuil, en plein hémicycle, presque comme une ado : « Il les a liquéfiés ! ».
 

Un peu plus tard dans cette séance du 27 février 2024, Gabriel Attal a répondu à une autre question sur le sujet posée par le président du groupe communiste André Chassaigne qui s'est, lui aussi, inquiété des propos du chef de l'État : « Cette déclaration improvisée, prononcée avec légèreté, comme si son auteur n’en mesurait pas toute la portée, sonne comme une fuite en avant militariste totalement irresponsable. (…) Les risques d’engrenage et de généralisation du conflit sont plus importants que jamais. Après certaines déclarations britanniques et allemandes qui nous demandent de nous préparer à une guerre européenne à brève échéance et la signature d’un accord militaire entre la France et l’Ukraine lourd de conséquences, cette déclaration belliciste du président, qui nous entraîne dans une escalade guerrière dangereuse pour tout le continent, ne peut que nous inquiéter. À rebours des va-t-en-guerre, nous exigeons que la France prenne, en responsabilité, la tête en Europe d’une coalition pour la paix, sous l’égide des Nations unies. Monsieur le Premier Ministre, pourquoi ne pas proposer cette voie pour mettre fin à la guerre ? ».

Gabriel Attal a répondu d'abord par un constat : « Vous nous dites qu’après deux ans de conflit, après que les pays européens et d’autres alliés ont soutenu l’Ukraine militairement pour qu’elle tienne face à la Russie, les Ukrainiens ne connaissent toujours ni la sécurité, ni la paix : c’est un fait. Mais ce qui est certain, c’est que si nous n’avions pas agi ainsi, ils ne vivraient pas non plus en sécurité, en paix ou librement, puisqu’ils n’auraient probablement pas pu tenir face à la Russie, qui aurait pris le contrôle de cet État souverain, de cette démocratie. ».
 

Il a surtout souligné la signification de cette guerre en Ukraine : « C’est aussi cela qui se joue, en fin de compte : un État autoritaire essaie de faire entrer dans nos esprits que démocratie et État de droit riment avec faiblesse et indécision. En nous battant pour soutenir les Ukrainiens face à l’agresseur russe, nous nous battons aussi pour défendre nos valeurs, notre modèle démocratique et l’État de droit. (…) Je mentionnais tout à l’heure le choix de la Suède et de la Finlande de rejoindre l’OTAN, alors que ces pays l’avaient jusqu’alors toujours refusé. C’est bien parce que chacun est convaincu que derrière l’Ukraine, c’est nous ! Si nous acceptons que la Russie prenne le contrôle de l’Ukraine, demain ce sont des pays membres de l’Union Européenne qui pourraient être visés, et peut-être le nôtre. ».

Et est venue sans doute la seconde phrase majeure de Gabriel Attal de la journée (après son attaque contre le RN) : « Je n’ai pas envie que ma génération et celles qui suivront grandissent avec l’idée que la loi du plus fort peut à nouveau s’appliquer en géopolitique. Je ne veux pas que nous nous disions qu’un État autoritaire peut prendre le contrôle d’un État démocratique par la force et par les armes. ».

D'où le soutien sans faille au Président de la République, et même sa fierté, à mon sens justifiée : « Non seulement j’assume, mais je suis même fier que la France ait un Président de la République qui, depuis le début de cette guerre, a cru aux capacités de résistance des Ukrainiens, ce qui n’était pas le cas de l’ensemble du spectre politique français à l’époque, il faut s’en souvenir : on entendait d’éminents responsables politiques nous expliquer que l’armée ukrainienne ne tiendrait pas plus que quelques semaines ou quelques mois. Nous avons cru en eux, le Président de la République a cru en eux, et nous les avons soutenus. Deux ans plus tard, la guerre est encore là, mais les Ukrainiens sont toujours debout. ».

Les Ukrainiens sont encore debout ! C'est dans les crises que les hommes (ou les femmes) d'État se dessinent... ou pas. La guerre en Ukraine démasque en tout cas ceux qui ne défendent pas les intérêts de la France, ni de l'Europe, ni certaines valeurs comme la démocratie et la liberté. Au moins, c'est plus clair, mais qu'ils ne viennent pas nous dire qu'ils sont des patriotes !


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (27 février 2024)
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