Samy Naceri, le tirailleur tiraillé

par LM
mardi 30 mai 2006

Chauffard de taxi célébrissime, Samy Naceri n’était pas à Cannes, dimanche, pour recevoir son prix d’interprétation. Il avait préféré rejouer une fois de plus son plus mauvais rôle, au scénario factuel mais sans âme, comme un casier judiciaire.

Dimanche soir, lors de la remise des prix du venteux et rouge 59e Festival de Cannes, d’aucuns auront peut-être tiqué sur un absent de marque.

Enfin, de marque... De marque Peugeot, dirait Besson.

En effet, Samy Naceri n’était pas là pour recevoir le prix d’interprétation masculine donné à tous ses camarades de jeu pour le film Indigènes. Djamel Debbouze l’excusa, et continua ses remerciements comme si de rien n’était.

Mais pourquoi donc le taxi le plus rapide de Provence n’avait-il pas pu rejoindre la Croisette à temps pour la cérémonie de clôture ?

Problème de bouchon ? Crevaison ? Dérapage incontrôlé ?

C’est cette dernière explication qui peut être retenue. A la veille d’être distingué par ses pairs, l’acteur, lui, s’était autrement « distingué » dans une boîte de nuit cannoise. C’est Le Monde qui le raconte :

« L’acteur français Samy Naceri, récompensé par un prix d’interprétation au Festival de Cannes dimanche, est visé par une plainte d’une boîte de nuit cannoise pour des violences à la veille d’être distingué, a annoncé lundi la police. Selon les plaignants, l’acteur, connu pour ses excès d’alcool et de drogue et ses démêlés avec la Justice, s’est présenté en état d’ébriété samedi à l’aube, à l’entrée du VIP Room, un célèbre lieu des nuits cannoises. Refoulé par les agents de sécurité, il aurait vivement réagi par des insultes, dont certaines à caractère raciste. Une plainte a été déposée par la direction du VIP Room pour "incidents et violences", a-t-on précisé de source policière. L’acteur, qui a quitté Cannes samedi, n’a pu être entendu par les enquêteurs. »

Voilà donc pourquoi Samy n’a pas pu entonner l’hymne des tirailleurs sénégalais avec ses bons copains.

Simple péripétie ?

Pas tout à fait, si l’on en juge par la précédente carrière de l’acteur franc du collier, mais peut-être aussi un peu bas du front.

Wikipédia, qui fait aussi figure de Who’s who, nous résume le palmarès du conducteur de la Cannebière :

- Le 1er octobre 2000, Naceri, accompagné de sa compagne, du réalisateur Mathieu Kassovitz et de l’acteur Jean Reno, embarque à bord du vol Air France 346 à destination de Montréal, où ils doivent faire la promotion du film Taxi II. Fâché qu’une erreur de réservation le force, lui et sa compagne, à prendre place en classe économique, Naceri insiste d’abord pour bénéficier d’un surclassement en première classe, puis bombarde d’injures une hôtesse de l’air. Le commandant de bord doit quitter le cockpit pour calmer l’acteur. La 17e Chambre correctionnelle de Paris, qui a entendu l’affaire, condamne Naceri. Le jugement est maintenu par la Cour d’appel de Paris, qui impose une peine d’un mois de prison avec sursis, une amende de 3000 €, et des dommages de 6000 €, en octobre 2002.

- Le 14 octobre 2000, Naceri, qui avait passé une partie de la nuit en boîte, circule sur le périphérique intérieur entre la Porte des Lilas et la Porte de Bagnolet. Une voiture de marque Volvo le klaxonne. L’acteur, pris de rage, se lance à la poursuite de la Volvo et lui bloque le passage. Pris de panique, les trois occupants de la Volvo prennent la fuite, arrachant au passage une portière du 4 × 4 de Naceri. L’acteur se met en chasse, intercepte à nouveau la Volvo, puis réussit à mettre la main sur l’un des occupants de l’autre véhicule, qu’il passe à tabac. Lors du procès, tenu devant la 16e Chambre correctionnelle de Paris, Naceri se défend, affirmant qu’il croyait que les occupants de la Volvo étaient des paparazzi. Le 16 juin 2003, la Cour rejette les arguments de l’acteur et le condamne à huit mois de prison avec sursis, à une suspension de permis de conduire de trois ans et à une amende de 5000 €.

- Le 15 octobre 2005, Naceri participe à l’enregistrement de l’émission Tout le monde en parle. Pendant son entrevue avec l’écrivain Salman Rushdie, l’animateur Thierry Ardisson pose une question au sujet de la fatwa de 2,8 millions $ dont a il été frappé après la parution de son ouvrage Les Versets sataniques. Présent sur le plateau, Naceri aurait déclaré à Rushdie : « Pour 50 balles, moi, je te fume. ». L’extrait en question n’a jamais été diffusé sur les ondes de France 2. Interrogé à ce sujet, Ardisson confirme que Naceri a été très agressif à l’endroit de l’auteur britannique, et qu’il a coupé plusieurs extraits de la prise de bec, lors du montage de l’émission. Cependant M. Ardisson maintient que Naceri « ne l’a jamais menacé de mort ». A la suite de l’incident, l’acteur aurait adressé une lettre d’excuses à l’animateur pour son comportement lors du tournage.

- Dans la nuit du 16 au 17 novembre 2005, Naceri fracasse son « long drink » à base de vodka sur le visage d’un jeune homme de 22 ans, styliste de la marque tendance Von Dutch, venu lui livrer des tee-shirts au restaurant Le Murat, place d’Auteuil à Paris (16e)... Les blessures subies par le jeune homme nécessitent une trentaine de points de suture aux arcades sourcilières, oreilles, joues et lèvres. L’acteur est condamné à deux mois de prison pour « violences volontaires en récidive », ce qui l’a empêché de jouer le rôle titre dans la première version théâtrale en France d’Orange mécanique, qui a pris l’affiche en février 2006.

Ca vous situe un homme, à défaut d’un acteur ! A propos d’acteur, il devrait jouer dans... Taxi 4 que Luc Besson envisage de produire et de réaliser.

En recevant son prix, Djamel et toute l’équipe ont beaucoup insisté sur l’importance de la mémoire, du souvenir. Effectivement, savoir qui l’on est, ne pas oublier ce qu’on a fait, pourquoi, ou pour qui. Ne pas tourner le dos à son passé, mais au contraire, s’en affranchir, l’assumer, grandir avec. Ne pas oublier, non plus, ce que d’autres ont fait pour vous.

Bref, l’histoire des uns, l’Histoire des autres.

L’acteur humoriste a ensuite remercié son agent, qui l’a fait passer « du RMI à l’ISF ». De quelqu’un de peu remarquable, à quelqu’un d’aimé.

Samir Naceri, lui, n’était pas là pour remercier. Il était à nouveau plongé dans ses problèmes. Comme d’habitude.

Wong Kar-Wai, qui ne doit rien connaître de ses démêlés, avait décidé de le récompenser pour sa performance d’acteur. Mais il s’est trompé. Naceri n’est manifestement pas de ceux qu’on récompense.


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