Combattre la misère et le mépris

par C’est Nabum
samedi 13 mai 2023

 

Smina Kernoua

Les Colibris solidaires

 

Un parcours chaotique, des coups qui ponctuent les étapes d'une existence qui a connu un grand déracinement. Une langue et un mode de vie avec lesquels il faut composer pour s'intégrer dans une société si différente de ses racines. La galère et la souffrance pour avancer sur un chemin semé d'embûches, serrer les dents, ne rien dire, assumer sa condition de femme et victime, puisque telle est sa destinée…

Smina Kernoua aurait pu courber longtemps l'échine sous un joug imposé à toutes celles qui ont connu le même parcours. Se taire, pleurer en silence, ne rien montrer aux enfants, ne pas faire de vague, elle a tout appris de cette soumission qui engendre depuis toujours les drames du quotidien.

Un jour pourtant un récit a croisé sa vie. Une fable venue des amérindiens qui a fait écho en elle. Elle n'est pas la première ni ne sera la dernière à être touchée par ce petit oiseau qui dans la tourmente, fait sa part, aussi modeste soit-elle, pour tenter d'inverser le cours du destin. De cet instant, elle a cessé de subir, elle a refusé d'accepter l'inacceptable, elle a appris à lutter.

La femme battue a appris à se battre, non pas avec les armes de ces lâches, de ces faibles qui profitent d'une supériorité physique pour taper toujours plus fort, non, elle a découvert la puissance des mots, la force du refus, le pouvoir de la solidarité. Elle a fondé une association : « Les colibris solidaires » pour que d'autres, comme elles, se relèvent les manches et se serrent les coudes.

Elle s'est surtout appropriée une arme redoutable, une arme terrifiante pour les bourreaux et les tyrans, une arme à la portée de tous ceux qui laissent parler leur cœur : l'écriture. Elle a couché sur le papier des mots pour oser rester debout, pour relever la tête, pour repousser le tourmenteur, pour s'affirmer dans sa dignité d'être humain.

Des mots simples qui lui ont ouvert les portes de ce monde souterrain de ceux qui tendent la main, refusent les injustices, se dressent contre une société qui a besoin de briser les humbles pour que perdurent les inégalités les plus honteuses. Elle ne pouvait que croiser la route de Jean-François Chalot dont j'ai maintes fois évoqué l'infatigable combat.

De cette rencontre, celui qui sème des petits ouvrages sur son parcours, l'a invité à oser ce marqueur d'un monde où elle n'était pas invitée : « Le livre ». Elle s'y livre, se raconte, se dévoile, s'efface devant un combat qui n'est pas que le sien. Cinq parties nous font passer du factuel, du témoignage poignant à l'expression la plus intime.

 

DE LA KABYLIE À FONTAINEBLEAU

 

 

Ne désirant rien dévoiler pour vous inciter à découvrir par vous même ce témoignage poignant, je me retire sur la pointe du clavier pour laisser les derniers mots à Smina, puisqu'elle a su si merveilleusement se les approprier.

 

 

Ma vie…

 

 

Ma vie est un chemin de petits cailloux 

que j’ai semés par et pour vous 

pour ne jamais me perdre ou le risquer

Et malgré ses virages, continuer toujours d’avancer.

Certains cailloux ont gêné mes chaussures

me faisant cloquetiquer ou m’ont blessée.

Mais au lieu de vite les enlever

ils ont servis à ne jamais renoncer.

L’important est chaussures à trouver.

Et sur les braises de la vie, prouver

que plutôt que sur les marchés

on trouve moyen à plutôt les aimer.

 

Peu de personnes m’ont accompagnée

Certains m’ont soit ignorée

soit non comprise ou même se sont risqués à me draguer.

On ne construit pas que sur le physique

La beauté rend jaloux ou même amnésique.

Moi je préfère une relation au fantasmagorique.

C’est ma seule façon d’être catégorique.

J’ai appris sur moi grâce à vous

J’ai repris de moi comme un goût

qui fait qu’un bon repas sans loup

est un partage que sert de Nous.

 


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