Vers le grand effacement de la démocratie

Périodiquement les baby-boomers sont convoqués devant le tribunal de l’histoire accusés de tous les maux de notre société d’aujourd’hui, à se demander si dans 35 ans, lorsque cette génération aura totalement disparu, leurs mânes ne seront pas encore invoqués pour excuser l’immobilisme des générations suivantes.

Les fausses responsabilités

Cette défausse bien pratique et paresseuse sur les « soixante-huitards » responsables de tout, utilisée par quelques essayistes et amplifiée par certains disciples gâteux empêcherait en effet aux générations montantes de porter un regard critique sur leurs propres agissements et renoncements : puisque nous ne sommes pas responsables, continuons dans la voie tracée par nos aînés…

C’est ainsi que les tares mis au débit des soixante-huitards, de la pollution de l’air, de l’eau, des sols en passant par la destruction massive de la biodiversité, l’utilisation des pesticides ou la surconsommation avec utilisation massive du plastique, connus depuis une quarantaine d’année, ne donnent jamais lieu à des mesures correctives ni à des revirements de politique, sauf sous la contrainte des évènements et des pénuries (guerre en Ukraine, épisodes de sécheresse…).

L’arbre qui cache la forêt

Quel est donc ce pays qui ressasse sans cesse les mêmes poncifs et entretient cette passion triste et dont les composantes jouent à s’opposer sans rechercher les véritables responsabilités sur les blocages actuels ?

N’y aurait-il pas un bilan à dresser sur notre rapport à la classe politique pour l’inciter à changer de modèle afin de sortir du dogme du tout économique et obliger les acteurs de ce secteur à envisager le futur autrement qu’à l’aune des profits excessifs et des dividendes produits par une politique de délocalisation ?

Car le problème est là et ce ne sont pas les élections qui changent grand-chose au fonctionnement de notre société dans laquelle les élus, mal élus, s’effacent progressivement au profit d’une nébuleuse économique et financière exonérée de tout effort, rétive à toute contrainte et qui ne cherche pas à se corriger.

La réforme des retraites se situe bien dans le cadre de cette France de l’argent, de la défausse et de l’abrutissement qui fait sécession et laisse un Etat défaillant mettre en place les dernières mesures coercitives en enfonçant le dernier clou sur le cercueil de la démocratie.

D’autres procès à venir

Mais peut-être que, d’ici là, pour contourner les problèmes, d’aucuns instruirons d’autres procès, sur la responsabilité d’autres générations. L’acte d’accusation pourrait alors porter sur leur consommation de produits ultra transformés portés à domicile, générateurs d’obésité et de dépenses de santé futures où leur goût pour l’avion polluants pour des weekends end au soleil des séjours dans les parcs d’attraction ou l’addiction aux plateformes télé : du pain et des jeux, comme toujours… C’est simple de faire détourner le regard.

 

La France est désormais prête à accueillir les bras ouverts les escrocs de la politique, ceux qui n’auront plus aucune raison de se cacher derrière leurs déclarations populistes qui consistent à déplacer le regard vers les autres, à savoir les immigrés, seuls responsables de nos maux, bien évidemment…

Nous sommes prêts pour le grand effacement de la démocratie. Ce n’est plus qu’une question de mois.