Le peuple n’a plus de prix

par C’est Nabum
vendredi 17 mars 2023

 

La valeur n'attend pas le nombre des damnés.

 

Le diable ne fait dans le détail et nous accorde même un fort modeste prix de gros. Nous faisons tous partie, peu ou prou, de ce petit peuple au rabais qui n'a plus droit à la parole. Le temps des ventes à la criée est révolu du reste, nous devons nous contenter d'être bradés pour solde de tout compte.

La valeur est à la baisse pour les damnés de la terre, les humbles, les manants. Nous ne vallons rien qui vaille, le grand Prince sur son trône nous le fait si bien sentir. Le dédain est la marque de fabrique d'un souverain au-dessus de la mêlée. Est-ce ce qui justifie qu'il soit ainsi si hautain ? Une simple posture due à la fonction ou bien un travers inscrit totalement dans sa manière de considérer les autres.

Il est vrai que chez les banquiers, ses pairs et ses semblables, le jugement d'un individu est souvent purement comptable. Le bilan est financier ; dis-moi combien tu gagnes et je te placerai dans mon panthéon. La carte de visite se limite à la ligne crédit chez ce premier personnage, ivre de son sommet.

Alors, tout naturellement, puisant dans des ressources insoupçonnées de compétence étymologique, ce triste sire se sachant au-dessus du panier, considère tous les autres et surtout son peuple comme des moins que rien. Lui seul a un prix à ses yeux tandis que les gens des communs, les gueux et les humbles sont totalement dévalués, souvent considérés en dessous de zéro. Il nous méprise souverainement, la belle affaire que voilà, pour le prix de son arrogance, de sa morgue et de son incomparable supériorité.

Sa personne n'a pas de prix, la nôtre n'en a plus. Et c'est ainsi que pour ses opposants, ses détracteurs, ses adversaires, ses sujets, il fixe systématiquement un prix inférieur à la valeur réelle. Nous sommes donc indignes collectivement d'égard, de considération, de respect. Le premier d'entre nous nous place tous bien en dessous de lui, sans espoir de ne jamais toucher son âme, inaccessible à cette plèbe grouillante et stupide.

Car il nous déconsidère, nous dédaigne, nous dévalue, nous ignore. Il ne s'abaissera jamais à entendre les plaintes qui remontent de son royaume. Ses valets font grand écran de fumée pour le confirmer dans la certitude que nous ne vallons rien qui vaille. Le Grand Méprisant de l'Arrêt Public n'a pas son pareil pour diminuer les taux d'estime et d'escompte.

Sa grandeur est au pinacle et qu'importe si ses sujets sont dans la rue. Ceux-ci peuvent continuer à s'agiter, s'indigner, se manifester, il restera dans son palais doré ou mieux encore, ira faire le paon à l'étranger sans un regard pour ces êtres indignes de lui. Honte à ceux qui valident pareil comportement, honte à ceux qui le confortent dans cette abolition du peuple dont il fait sa ligne de conduite.

Nos vies ont de la valeur, nos colères ne rentrent pas dans les pertes et profits, nos manifestations ne valent pas rien et méritent au moins un décompte honnête et une écoute respectueuse. Le mépris du peuple ne peut en aucun cas être une posture de gouvernance, même pour un banquier au seul service des actionnaires et des puissants.

Le peuple peut demander des comptes et bien souvent, quand la colère est le moteur de sa rébellion, la haine conduit à bien des extrémités. À jouer sans cesse les boutefeux, cette jolie clique et leur maître risquent fort de se brûler les doigts. Nous avons un prix, un besoin légitime de respect. De grâce, dites donc messieurs nos représentants, que le tiers état est à bout de nerf. Le pire est au bout de ce mépris qu'on nous sert sur un plateau d'argent depuis le premier jour de son premier mandat. Debout les damnés de la terre, boutons ce pouvoir du mépris.

À contre-respect.


Lire l'article complet, et les commentaires