Des effets induits du blog

par Sébastien Bailly
jeudi 15 septembre 2005

Loic Le Meur voit sa personnalité réelle influencée parce qu’il tient un blog. Christophe Ginisty s’interroge sur la façon dont le blog change sa vie. Et moi-même, je ne suis pas sans me poser des questions.

La pratique du blog n’est pas anodine. J’étais hier interrogé par un journaliste de l’Express, à propos de la façon dont les blogs pouvaient entrer dans une stratégie de recherche d’emploi. Rien de tel que de s’entendre poser des questions pour s’obliger à trouver des réponses. Si le blog peut avoir une influence sur la vie professionnelle (néfaste ou bénéfique), c’est qu’il a une importance qu’on ne soupçonne pas toujours lorsqu’on se lance dans ce qu’il faut bien, avec le temps, considérer comme une aventure humaine inattendue.

Ramener le blog personnel à un journal intime et à un déballage public de sa vie privée est évidemment réducteur. Ce blog, par exemple, n’est pas cela. Néanmoins, l’écriture quotidienne, ou presque, ou plus, de billets n’est pas sans effets sur ce qu’on est.

J’ai de nombreux clichés en tête, sur le fait qu’on n’est que ce qu’on fait, et qu’on n’est jamais tout à fait le même d’un moment à un autre. Renvoyé, sans cesse, dans un mouvement de balancier, entre ses propres contradictions.

Le blog transforme celui qui l’écrit. Qu’il ouvre des portes, qu’on ne franchit pas toujours, qu’il trace des perspectives qu’on n’aurait pas imaginées, qu’il provoque des réactions qu’on n’aurait pas attendues.

Le blog change la vie parce qu’il transforme non seulement la personnalité de celui qui écrit, renvoyé sans cesse à lui-même, mais aussi parce qu’il tisse de nouveaux réseaux relationnels qu’on n’aurait pas envisagés.

J’ai rencontré des gens, parlé avec des gens, échangé des points de vue avec des gens... Des gens que je n’aurais peut-être jamais croisés sans mon blog. Et rien que cela est épatant.

Cela change ma vie, évidemment. Et pourrait peut-être la changer encore plus à l’avenir. Cette possibilité-là modifie beaucoup de choses, en ce qui me concerne, et explique sans doute pourquoi le blog est addictif à ce point : aujourd’hui, demain, dans une heure peut-être, quelqu’un viendra sur mon blog, rentrera en contact avec moi, et me fera une proposition qui modifiera ma vie. Un truc auquel je n’aurais pas pensé, mais qui tombera pile poil.

Pas forcément un job, mais pourquoi pas ? Juste une proposition : un journaliste qui voudra en savoir plus, comme celui de l’Express hier, une organisatrice de salon qui cherche un intervenant pour une table ronde, comme c’est en train de se faire, un blogueur qui voudra mes billets sur son blog, comme cela s’est déjà fait. Le blog, c’est cela : une ouverture sur des possibles que je ne soupçonne pas.

Savoir qu’ici tout peut arriver d’un instant à l’autre et faire basculer mon quotidien pour une heure, une journée, ou les années qui viennent, c’est évidemment une pression, une pression agréable. La vie se joue à chaque lecteur qui pose ses yeux sur son écran.

Et, pourtant, j’écrirais tout aussi bien que j’écris pour moi, pour garder des traces, prendre des notes, avancer des projets personnels dont je ne dis rien parce que je n’irai peut-être pas jusqu’au bout. Et je ne mentirais pas en disant que ce blog est d’abord écrit pour mon strict usage. Il l’est, aussi.

Et il me renvoie, encore, à mes contradictions.


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