Fonctionnaires et Système Public : l’irresponsabilité structurelle

par Spartacus Lequidam
samedi 7 juin 2025

Il est urgent d’ouvrir les yeux sur une réalité inacceptable : un tabou que les interessés eux-même refusent de voir, la déresponsabilisation structurelle et intellectuelle qui gangrène la fonction publique et le service public.

Ce phénomène, loin d’être anodin, s’enracine profondément dans la structure même de notre administration. Il se manifeste par des comportements irresponsables qui compromettent non seulement l’efficacité et la qualité des services, mais minent également la confiance des citoyens.
 

Syndrome du "Ce n’est pas chez moi" ou "Ce n’est pas moi qui paye" : des exemples éloquents
Prenons l’exemple frappant d’un agent d’entretien dans une mairie qui, par manque de consignes claires et de suivi adéquat, abandonne des travaux de réparation dans une école. Les conséquences ? Un bâtiment dont la décrépitude menace non seulement la sécurité des élèves, mais aussi leur apprentissage. Cet agent ne subira aucune sanction, alors que ce sont les élèves et la collectivité qui paient le prix fort. Ce type de comportement, loin d’être isolé, révèle un management rigide qui infantilise les agents au lieu de les responsabiliser.


Autre illustration tragique : dans les nombreux services administratifs, des dossiers peuvent s’éterniser pendant des semaines, simplement parce que personne n’ose prendre d’initiative ou assumer des décisions. Un citoyen attend désespérément un document crucial ? La réponse lamentable : “Ce n’est pas de ma faute, c’est la procédure.” Cette mentalité, fondée sur le principe du “c’est le système” ou “c’est l’ordre du chef”, encourage chacun à se dérober à toute responsabilité, conduisant à une dilution insupportable de la responsabilité.

Regardons du côté des entreprises publiques comme la SNCF. Des grèves opportunément placées pendant les fêtes de fin d'année illustrent cruellement le contraste entre un salarié protégé par un statut et un petit commerçant ou un employé du secteur privé, qui n’a pas le luxe de fermer sa boutique sans risquer la faillite ou laisser tomber la satisfaction du client pour ses petits propres interets. Là encore, la logique du “ce sont les autres qui paient ou subissent” prévaut, et les usagers (qui ne sont pas considérés comme des clients) se retrouvent les grands perdants de cette irresponsabilité collective.

La critique du système public et de certaines pratiques dans la fonction publique ne se limite pas à des anecdotes sur la motivation ou la mentalité des agents. Elle s’appuie aussi sur des mécanismes structurels qui permettent à certains de profiter du système, parfois légalement, mais contestable sur le plan éthique. On peut citer le “coup du chapeau” : optimiser sa retraite sur les 6 derniers mois. Un agent public obtient, grâce à son réseau ou à l’appui de sa hiérarchie, une nomination temporaire à un poste à haute responsabilité dans les six derniers mois de sa carrière. Cette hausse de traitement, même très brève, sert alors de base au calcul de sa pension à vie, générant un avantage structurel difficilement justifiable par rapport à la logique contributive du privé.

Autre pratique : certains hauts fonctionnaires partent en disponibilité, puis demandent à être réintégrés dans la fonction publique quelques jours avant leur retraite. Cette réintégration, même de courte durée, leur permet de faire valoir leurs droits à une pension calculée sur leur dernier poste plus avantageux que leur situation antérieure.

Rappelez-vous : Dominique de Villepin, ancien Premier ministre, qui joue l'ange immaculé dans les médias en ce moment, avait quitté la fonction publique pour ses activités politiques, puis avait été réintégré brièvement avant son départ à la retraite, afin de bénéficier du mode de calcul avantageux des six derniers mois. Cette pratique, bien que légale, illustre comment certains agents peuvent "profiter" des failles du système pour maximiser leurs droits à pension. Comment en bas de l'échelle ne copierait-on pas un ministre qui en plus joue le fanfaron dans tous les medias sans que quelqu'un lui fasse remarquer son comportement individuel passé ?
 

Pour renforcer la responsabilité individuelle et garantir un service public de qualité, il faut en finir avec la gangrenne d'irresponsabilité qui affecte aujourd'hui tout le service public et donne partout des résultats si lamentables pour un coût hors de prix pour la collectivité.

-1-Payer aux résultats intuitu-personnae au lieu du statut du poste de travail, comme on le fait dans le secteur privé. Aujourd'hui le système décourage l’initiative. La tradition hiérarchique rigide et la culture du contrôle omniprésente dans la fonction publique créent un environnement où la prise d’initiative est synonyme de risque et de méfiance et même pire, de déclassement par non respect des procédures même si elles sont débiles. Les agents sont souvent cloisonnés dans un carcan de directives strictes, dépourvus de la liberté d’innover ou de résoudre des problèmes concrets sur le terrain. Résultat ? Une motivation en berne, une efficacité qui stagne et un usager qui souffre de cette inertie paralysante.

-2-En finir avec l'obsolète sur-protection statutaitre Le statut de fonctionnaire, censé garantir continuité et impartialité, est devenu un rempart contre toute forme de remise en question. Pour sortir de cette spirale de déresponsabilisation, il est impératif de se diriger vers une refonte complète du système. Cela implique de **mettre fin aux statuts indéfendables** qui protègent l'inefficacité et de remplacer ceux-ci par un système de **rémunération basé sur l'objectif et la performance**. Les agents devraient être récompensés non seulement en fonction de leur ancienneté, mais aussi et surtout en fonction de leurs résultats concrets.

Pour renforcer la responsabilité individuelle et garantir un service public de qualité, il faut :

-3-Faciliter le licenciement des agents qui ne remplissent pas leurs obligations. Le maintien en poste de fonctionnaires incompétents ne devrait plus être une option. La crainte de perdre son emploi peut inciter à un engagement plus fort et à une meilleure qualité de service. Ce n'est qu'en instaurant un environnement où chacun est tenu de rendre des comptes que nous pourrons espérer voir émerger la motivation, l’initiative et le progrès au sein de la fonction publique.

-4-Découper à la tronçonneuse le réglementarisme public C'est une nécessité de déréglementer pour moderniser et dynamiser la fonction publique. Aujourd’hui, l’excès de normes et de procédures bride l’initiative et la capacité d’adaptation des agents, qui se retrouvent souvent cantonnés à l’application mécanique de règlements sans marge d’interprétation ni pouvoir d’innovation. En allégeant le carcan réglementaire, on permettrait aux fonctionnaires de mieux répondre aux besoins concrets des usagers et d’adapter leur action à la réalité du terrain. Leur confier un rôle normatif, c’est aussi leur donner la responsabilité de proposer, d’expérimenter et d’ajuster les règles, au lieu de simplement les subir. Cette évolution favoriserait la responsabilisation, la motivation et la reconnaissance du mérite individuel, tout en renforçant l’efficacité du service public face aux défis contemporains.


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