Entre ses lignes

par C’est Nabum
jeudi 6 février 2025

 

Elle fait selon son bon plaisir …

 

Il fut un temps jadis durant lequel l'éducation était effectivement une priorité nationale, exercée sur tout le territoire par des hussards noirs de la République qui avaient le métier et la conviction chevillés au corps. Ils avaient tous un merveilleux dessein : instruire les enfants de ce pays, leur donner les outils pour s'élever dans la société. Ils étaient respectés et plus encore considérés pour cet objectif qui ne supportait aucune contestation.

Durant des années, des enfants qui avaient bénéficié des bienfaits de cette éducation nationale, fortement influencés par ceux qu'on nommait alors Instituteurs et Institutrices, n'avaient d'autres désirs que de reprendre le flambeau pour à leur tour, poursuivre cette noble mission. Ils n'étaient pas forcément bardés de diplômes mais ils avaient un plan de carrière comme on dit aujourd'hui. Ils devinrent moniteurs de colonie de vacances, animateur dans des clubs sportifs ou culturels avant que de ce lancer dans un métier qui ne leur était pas tout à fait inconnu.

Puis des hauts fonctionnaires, certains de leur importance et aveuglés par des conceptions élitistes ont modifié la donne. Instituteur n'était plus un terme acceptable, il convenait de singer l'étage supérieur en faisant des maîtres et maîtresses des Professeurs d’école. La belle étiquette que voilà à laquelle il importait d'associer des diplômes universitaires de si peu de rapport avec le métier pratiqué.

Ce fut alors la venue des seconds de classe, les premiers visant les étages supérieurs. Ceux-là ignoraient tout des enfants difficiles, des gamins qui n'étaient pas de leur monde. Surtout, ils avaient passé le début de l'existence sans jamais se confronter à la jeunesse en dehors de leurs camarades de classe. Ils débarquaient en territoire inconnu avec un immense savoir de bien peu d'utilité.

Très vite, il se trouva des gens pour comprendre et entrer dans la carrière comme l'avaient fait auparavant leurs aînés, avec ce qu'on nomme à juste titre une vocation. Mais pour d'autres, leur tâche fut vécue comme une activité alimentaire possédant l'avantage non négligeable des congés. Ils s'installèrent dans un confort et des certitudes qui les éloignaient considérablement des exigences d'une activité toujours remise en question.

Avec ces derniers, le coup de Trafalgar se transforme en arrêt de travail, un réflexe jadis impensable. Les conflits qui se multiplient prennent alors des proportions d'autant plus dramatiques que les parents, nourris aux mêmes attendus éducatifs qu'eux, entendent donner toujours raison à leurs chers petits. L'école est devenue un lieu de friction entre des egos et des projets contradictoires.

C'est ainsi que dans une belle petite école, une jeune enseignante en mal d'autorité se trouva débordée par une classe chahuteuse. Le chahut survient toujours quand on lui ouvre grands les portes, la règle ne connaît pas d'exception. Dépassée par des enfants de 9 ans, la jeune femme colla une punition collective à toute la classe et puisant dans un arsenal obsolète leur imposa de copier cinquante fois une très longue phrase moralisatrice.

Incompréhension des familles devant une sanction stupide d'un autre âge et surtout totalement prohibée par les usages contemporains. Si quelques élèves parvinrent au bout de ce pensum, d'autres durent abandonner en cours d'écriture et à bout de fatigue. Des mots et des maux furent échangés et la dame de se mettre immédiatement en arrêt de maladie. La fuite a toujours été l'arme des pleutres.

Désormais, elle se refuse à reprendre cette classe dont les familles ont bafoué son autorité. Caprice surprenant auquel un environnement éducatif semble donner écho. Cette enseignante n'ira plus dans cette classe pour y dispenser son savoir. Fermez le ban, si son autorité est sabordée, celle de l'institution en prend elle aussi un coup devant l’oukase de la dame. N'ayant pas l'intention de mettre de l'huile sur ce feu qui couve un peu partout, je vous laisse juge de ce phénomène sans vous donner plus de détails. Il montre bien à mon sens qu'il n'y a plus de capitaine sur le rafiot et que la navigation se fait à vue en bien des endroits.


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