Danielle Mitterrand l’Insoumise en Utopie

par Sylvain Rakotoarison
mardi 29 octobre 2024

« La femme du Président de la République n’a pas de rôle. Elle a celui qu’elle veut bien se donner. » (Danielle Mitterrand).

L'ancienne Première Dame Danielle Mitterrand est née il y a 100 ans, le 29 octobre 1924, à Verdun. Cette fonction, qui peut malheureusement réduire la vie de cette femme, n'est pas officielle mais occupe une place bien particulière dans l'esprit des Français, sans doute un relent résiduel de monarchie avec l'existence de la reine (on voit d'ailleurs à quel point Brigitte Macron a des détracteurs qui pourraient la comparer à la malheureuse Marie-Antoinette). Elle-même n'aimait pas du tout l'expression Première Dame et préférait simplement épouse du Président de la République.

Malgré des détracteurs, il y en a toujours, les Français sont souvent attachés aux Premières Dames et ce n'est pas un hasard si elles reçoivent de très nombreux courriers (ce qui justifie le budget de secrétariat mis à leur disposition à l'Élysée). J'avais assisté à Nancy à une séance de dédicaces d'un de ses livres dans les années 1990, et j'avais découvert la grande ferveur que les gens avaient pour cette reine Danielle (sur une terre politiquement pas vraiment favorable à ses idées).

Parmi ses autres... collègues (?), de femmes de Président de la République (je n'ose écrire : vivement une Présidente de la République ! car politiquement, ce qui se fait sur le marché, en ce moment et probablement jusqu'en 2027, ne me conviendrait pas du tout !), Danielle Mitterrand s'est démarquée de deux manières, une dont elle n'y pouvait rien, elle a été la Première Dame à la plus grande longévité, du 21 mai 1981 au 17 mai 1995 (pendant les deux septennats de son mari), et l'autre qui est le résultat de sa propre volonté et détermination, et sans doute contre la volonté de son mari, elle a été la seule Première Dame militante politique, voire activiste, parallèlement à l'exercice du pouvoir de son mari. À leur mariage, François Mitterrand ne voulait pas qu'elle fût sa secrétaire, ni jamais sa collaboratrice. Il préférait qu'elle s'occupât des enfants, ce qu'elle allait faire. Mais pas seulement !

Et malgré son militantisme de gauche très à gauche, au point de mettre en difficulté la diplomatie française (quand, par exemple, elle cultivait des liens d'amitié avec Fidel Castro alors que son époux à l'Élysée fricotait avec Ronald Reagan), j'ai une grande tendresse pour Danielle Mitterrand, car elle synthétisait bien les paradigmes sociaux d'une femme de son temps : être à la fois indépendante et soumise, être à la fois dépendante et insoumise.

Indépendante parce qu'elle a pu agir comme elle le voulait, militer pour les causes qui lui paraissaient justes, et c'est sûrement sur ce thème de l'injustice qu'elle a trouvé la motivation pour agir et militer. Mais aussi soumise parce qu'elle était une femme de son temps, que le divorce était un traumatisme social, et plus encore politique (ce qui a participé à démotiver les électeurs gaullistes conservateurs à voter pour Jacques Chaban-Delmas), et parce qu'elle ne voulait pas empêcher François Mitterrand d'accéder à l'Élysée, et du moins, elle ne voulais pas enrayer la dynamique d'espoir qu'il a suscitée à gauche pendant toutes les années 1970, au moment même où la relation extraconjugale de son mari devenait patente avec la naissance de Mazarine le 18 décembre 1974 (qu'il a reconnue le 25 janvier 1984 et dont l'existence a été rendue publique le 10 novembre 1994 par la publication acceptée mais non voulue de photos par "Paris Match").

Elle était la femme restée stoïquement auprès de son mari, acceptant le rôle qu'il lui avait donné pendant les années d'opposition mais aussi de pouvoir, malgré cette relation et les relations extraconjugales notoires de son mari (à ce titre, François Mitterrand, comme Valéry Giscard d'Estaing et Jacques Chirac, a fait partie des grands fauves sexuels de la vie politique, il y aurait beaucoup à en dire, au contraire de De Gaulle, Georges Pompidou et Emmanuel Macron). Elle a même eu la grandeur d'âme d'accepter la présence de la seconde famille pourtant un peu concurrente aux obsèques de François Mitterrand à Jarnac.
 

Rappelons que François Mitterrand avait l'habitude de dire à ses amis, notamment Roland Dumas, que dans la vie, un homme devait avoir plusieurs femmes : une femme pour l'apparat, une femme pour être la mère de ses enfants, une femme pour la passion sexuelle, une femme pour se cultiver, etc. Le concept pouvait se décliner à l'infini et justifier intellectuellement, et sans doute a posteriori, son infidélité maladive. Danielle Mitterrand, dans ce cadre étroit, avait le plus mauvais rôle mais l'a accepté pour ne pas défavoriser politiquement et électoralement son mari.

En ce sens, malgré cette soumission d'apparence, elle était moderne. En écrivant ces lignes, je repense à ma grand-mère, née au milieu de la Première Guerre mondiale (et donc un peu plus âgée que Danielle Mitterrand ; en fait à quelques semaines près, ma grand-mère avait le même âge que François Mitterrand et elle n'en était pas peu fière !). Mes grands-parents faisaient semblant mais c'était connu qu'ils ne s'aimaient plus vraiment. Mais que faire quand la femme, avec ses quatre enfants, n'avait pas de travail ? Elle était bien obligée de rester dans le foyer avec l'argent (chichement) donné par le mari. Cela ne l'a pas empêchée, dans les années 1960 (à un âge déjà avancé pour l'occasion), de passer le permis de conduire et même d'acheter une voiture à l'insu complet de mon grand-père, grâce à la complicité de ses fistons et gendres. C'est cette dichotomie femme soumise/femme indépendante qui a caractérisé beaucoup de femmes de cette génération et qu'a illustrée avec beaucoup de grandeur d'âme (je le répète) Danielle Mitterrand.

Et elle était là, la modernité de Danielle Mitterrand, celle de vouloir agir pour des causes qui lui étaient chères. Elle n'épousait certainement pas les causes que j'aurais soutenues, mais je l'ai beaucoup admirée pour cette détermination à vouloir agir pour celles-ci, malgré toutes les barrières qui se dressaient contre elle, et en particulier le Quai d'Orsay.

Ce que j'indiquais plus haut, c'est que son moteur, sa motivation était les injustices. Et c'est dès l'âge de 6 ans qu'elle a senti sur sa famille cette injustice. Sa famille allait là où son père était affecté comme principal de collège, d'où sa naissance à Verdun (sa mère aussi était enseignante). À Dinan, la famille avait été mal reçue à cause de leur défense de la laïcité et de la gauche en général, si bien qu'il y a eu un accueil très négatif entre 1930 et 1936, du dénigrement contre la petite fille de 6 ans par sa maîtresse alors qu'elle était brillante élève, jusqu'à un incendie dans le bâtiment où vivait la famille. Elle avait 12 ans quand la famille est partie à Villefranche-sur-Saône, au nord de Lyon, soulagée de quitter cette Bretagne bien impénétrable.

Dès le début de l'Occupation, en 1940, le père de Danielle (André Gouze) a refusé les directives du régime de Pétain, ce qui l'a conduit à être révoqué. La famille s'est installée à Cluny et Danielle, à 16 ans, terminait sa Seconde à Mâcon : « J'avais 16 ans. J'ai dû sortir de l'insouciance et mesurer ma capacité de révolte devant l'injustice, celle que subissaient ces enfants, celle que subissait mon père. ». La maison de Cluny est devenue un haut lieu de refuge pour les résistants. Dans son livre autobiographique ("Le Livre de ma mémoire", sorti en 2007), elle racontait : « Très vite la maison Gouze fut un refuge pour les réseaux clandestins. Jusqu’au jour où un monsieur accompagné d’une jolie dame se présenta au portail de la cour et demande à rencontrer les hôtes de ces lieux. C’est ainsi que "Madame et Monsieur Moulin" furent les locataires de l’un des appartements aménagés dans la Maison Grise, ancienne dépendance de ROMADA (Roger, Madeleine, Danielle), notre maison d’habitation. Sous leur fausse identité, Henri Fresnay et Bertie Albrecht sont entrés dans ma vie, avec le mouvement combat. » (cité par Wikipédia).

Engagée donc dans la Résistance en aidant sa famille avec des petits actes (notamment en prévenant les uns et les autres de l'arrivée des nazis, etc.), Danielle Mitterrand a eu la plus grande frayeur de sa vie le 28 mai 1943 quand la gestapo a débarqué chez eux et qu'heureusement, elle en est ressortie sans avoir rien trouvé. Mais elle avait appris que le jour même, Bertie Albrecht, devenue son amie, avait été arrêtée à Mâcon par la gestapo qui avait retrouvé une enveloppe avec l'adresse de la maison de Cluny où la résistante avait été hébergée la nuit précédente. Bertie Albrecht est morte le 31 mai 1943 à la prison de Fresnes après avoir été torturée par Klaus Barbie à Mâcon. Pour Danielle Mitterrand, c'était l'horreur : « Lorsque j’essaie de me remémorer le cheminement de mes pensées à cet instant, l’alternative se présentait sans échappatoire possible : c’était le peloton d’exécution, là dans notre cour, l’arrestation et les camps …ou la vie. » (2007).

Le 14 février 1944, autre coup dur : Danielle et sa sœur (aînée) Christine (future femme de Roger Hanin) ont quitté la veille au soir un bal, mais plus tard dans la nuit, la gestapo a arrêté de nombreux jeunes qui furent déportés dans les camps. La question de Danielle Gouze était alors : pourquoi eux, pourquoi pas moi ? (la question que se posaient tous les rescapés des camps). C'est en avril 1944 à Paris qu'elle a fait la connaissance de François Mitterrand par sa sœur qui était sa "boîte aux lettres" de son mouvement des anciens prisonniers résistants.
 

Dans "Le Livre de ma mémoire", Danielle Mitterrand a livré sa version du premier rendez-vous avec l'ambitieux jeune homme politique : « Une soirée au restaurant Beulemans, boulevard Saint-Germain (…). Il joue de son charme comme il sait bien le faire auprès des femmes. Mais je n’étais pas encore une femme… À vrai dire, cela n’a pas vraiment bien marché ; son registre de séduction n’a pas opéré. Je n’étais pas préparée à ces jeux-là. Il a bien compris que mon adolescente simplicité dans les relations entre les êtres s’accordait mal aux exercices de son charme caustique.
Alors qu’en penses-tu, Danielle ? me dit Christine (…)


Je ne sais pas…
Ce n’est pas le coup de foudre ?
C’est un homme…
Bien sûr, c’est un homme !
Je ne suis pas sûre de peser lourd dans ses préoccupations. Pourtant, il ne m’est pas indifférent… Mais je ne vois pas où je me situe dans le rôle que vous semblez me voir jouer. ».

Un peu plus tard, selon les consignes de dirigeants de la Résistance, François et Danielle ont voyagé ensemble par le train de Paris à Cluny sous la couverture d'un couple (sa présence servait d'alibi). Ce n'était pas usurpé puisque les deux jeunes s'étaient fiancés (Danielle s'était engagée à 19 ans dans le maquis de Bourgogne comme agente de liaison) et qu'ils se sont mariés le 28 octobre 1944 à Paris, après la Libération de Paris. Les témoins du mariage étaient prestigieux : Henri Fresnay, Jean Munier, Patrice Pelat, et la sœur, Christine.

La légende voudrait que quelques mois auparavant, François Mitterrand, voyant la photo de Danielle que lui tendait Christine Gouze, lui ait dit : "Je l'épouserai !". Cette histoire a été notamment retranscrite par le journaliste politique Robert Schneider (qui a travaillé pour "L'Express", France Inter et "Le Nouvel Observateur") dans sa biographie documentée sur l'ancien Président, "Les Mitterrand", publiée le 7 avril 2011 (chez Tempus Perrin) : « Dans sa lettre du 24 juin 1944, écrite de Bourgogne où il se cache, François Mitterrand confie à Marie-Claire Sarrazin "être en compagnie d'une jolie fille dont les yeux de chat admirables restent fixés sur un au-delà dont j'ignore les bornes et les accidents"... Exceptionnellement, le propos n'est pas assorti de ses habituelles considérations sur le vide, l'inculture, la sottise des jeunes filles qu'il est amené à fréquenter. François, le beau ténébreux, le romantique, encore marqué par son échec avec Marie-Louise, agacé par les réticences d'une cousine à la fois séduite et méfiante, serait-il amoureux ? À son retour de Londres, il a fait la connaissance d'une jeune femme, Madeleine Gouze, dont la beauté l'attire [Madeleine se faisait appeler Christine, c'était la sœur aînée de Danielle]. Mais elle est déjà l'amie de son ami Patrice Pelat. Au domicile parisien de Madeleine, François aperçoit sur le piano la photographie de la jeune fille aux yeux de chat.
Qui est-ce ? demande-t-il.
Ma sœur.
Elle est ravissante, je l'épouse.
Madeleine écrit à sa sœur : "J'ai un fiancé pour toi...". Pendant les vacances de Pâques qui, en 1944, tombent en avril, Danielle monte à Paris. Elle n'a pas 20 ans. Elle fait beaucoup plus jeune lorsqu'elle débarque gare de Lyon, vêtue d'une jupe plissée et de chaussettes blanches. Madeleine la force à mettre des bas pour être plus présentable ! La rencontre a lieu chez Beulemans, un restaurant du boulevard Saint-Germain. Les deux sœurs arrivent les premières. Madeleine dit à Danielle : "Si c'est le coup de foudre, tu me fais un petit signe d'approbation ; s'il ne te plaît pas, une moue". »
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Militante, Danielle Mitterrand a ainsi fondé le 4 mars 1986 sa propre fondation (comme toutes les Premières Dames depuis De Gaulle, et même avant, car la première à créer sa fondation fut Élise Thiers, l'épouse d'Adolphe Thiers), appelée Fondation France Libertés, baptisée maintenant Fondation Danielle-Mitterrand (depuis son décès), dont le but est : « défendre les droits humains et les biens communs du vivant. Elle contribue à la construction d'un monde plus solidaire. ». En fait de création, c'est la réunion de trois associations militantes qu'elle avait déjà créées un peu plus tôt. En 1992, elle a écrit : « J’ai imaginé la Fondation avant tout comme un lieu de rencontres, croisement de messages et de langages, aire de confrontation des cultures, plate-forme d’échanges, carrefour d’expression sous toutes ses formes, tremplin pour un XXIe siècle de compréhension et de reconnaissance de l’autre ». Reconnue d'utilité publique, elle a obtenu en 1991 le statut d'organisation consultative auprès des Nations Unies, et selon sa fondatrice en 2011 : « France Libertés est essentiellement un maillon actif d’un réseau mondial qui aspire à organiser l’alternative à la mondialisation du commerce et de la finance pour une société qui donne toutes ses chances à la vie. ». Sur le site de la fondation, il est d'ailleurs précisé que son statut de Première Dame « n’a pas éteint la flamme d’insoumission qui brûlait dans son cœur et qui la poussait à prêter l’oreille aux violences du monde ! ». Parmi ses généreux soutiens financiers, on comptait Pierre Bergé, l'artiste Philippe Starck et la styliste Agnès Troublé.

Comme elle avait ses idées et ne se sentait pas gênée pour les exprimer malgré la proximité d'un Président de la République, Danielle Mitterrand a fait de nombreuses déclarations parfois polémiques et a rencontré de très nombreuses personnalités françaises et internationales pour son activité de présidente de France Libertés.

Parmi les prises de position qui ont scandalisé une partie du pays, il y a celle du 20 octobre 1989 où elle voulait dédramatiser (à tort) l'affaire du voile islamique au collège de Creil : « Si aujourd'hui deux cents ans après la Révolution, la laïcité ne pouvait accueillir toutes les religions, toutes les expressions en France, c'est qu'il y aurait un recul. Si le voile est l'expression d'une religion, nous devons accepter les traditions quelles qu'elles soient. ». On a vu à quel point cette polémique emblématique, qui a été initiée le 18 septembre 1989 par trois adolescentes en mal d'identité, a pourri le débat public et la gestion de l'enseignement scolaire pendant une quinzaine d'années et il a fallu la loi n°2004-228 du 15 mars 2004 sur les signes religieux dans les écoles publiques pour régler enfin ce problème.

Danielle Mitterrand a aussi beaucoup milité contre les lois sur l'immigration présentées par Charles Pasqua sous les deux premières cohabitations, en particulier en 1993, elle a fait des actions médiatiques pour venir soutenir des sans-papiers ni expulsables ni régularisables (des parents étrangers d'enfants français), au point que Pierre Mazeaud, avec d'autres collègues députés agacés, a publié une tribune au titre évocateur : « Qui veut faire taire Danielle ? ».
 

Mais elle se moquait de microcosme parisien. Dans "Le Printemps des insoumis" sorti en 1998 (chez Ramsay), Danielle Mitterrand concevait ainsi le racisme : « Le racisme, à l'évidence, concerne moins l'origine des êtres que l'épaisseur de leur portefeuille. Mais il a une fonction bien commode : tandis que les pauvres, étrangers ou non, s'entre-déchirent dans leur misère, ils ne se posent pas de question sur la logique qui les broie. La xénophobie, cette gangrène, nourrie par des démagogues en quête de pouvoir, gagne les esprits jusqu'au sein de l'État. ».

On lui a souvent reproché son amitié pour Fidel Castro qu'elle appréciait beaucoup et avait embrassé (notamment le 13 mars 1995 à Paris), elle refusait d'admettre qu'il était un dictateur. Elle a aussi pris position en faveur du front Polisario pour l'indépendance du Sahara occidental (au grand dam du roi du Maroc Hassan II, ami de François Mitterrand), soutenait Bernard Kouchner en 1992, et son dernier combat était pour l'accès à l'eau dans le monde, au point d'en faire la raison de son vote non au référendum du 29 mai 2005. Elle s'en est expliquée dans le "Journal du dimanche" en mars 2005 : « Si nous ne réagissons pas, cette Constitution libérale donnera définitivement le statut de marchandise à l’eau (…). Nous avons la responsabilité de nous élever contre une telle conception. ».

Parmi les très nombreuses rencontres de Danielle Mitterrand, citons le dalaï-lama, le sous-commandant Marcos, Abou Diouf, Nelson Mandela, Thabo Mbeki, Massoud Barzani, Rigoberta Menchu, Mumia Abu-Jamal, Leonard Peltier, etc. Dans leur détermination à avoir un État indépendant, elle a soutenu les Tibétains, les Sahraouis, les Kurdes, les Palestiniens (mais aussi les Israéliens), etc. En plus du droit des peuples à s'autodéterminer, Danielle Mitterrand tenait aussi à l'abolition de la peine de mort et elle faisait évidemment campagne pour cela aux États-Unis. Dans une préface d'une biographie sur elle publiée en 2012, l'historien Jean Lacouture a synthétisé ainsi : « Toujours en avance de deux pas sur notre temps. ». Elle-même disait : « Je savais que mon chemin me conduirait inéluctablement à dénoncer les atteintes à l’intégrité de la vie et à la dignité. ». En quelque sorte, comme militante internationale, Danielle Mitterrand tenait le même rôle que, pendant longtemps, Jimmy Carter, qui ont tous les deux le même âge.

Je propose deux vidéos ci-dessous, la première très hagiographique dont l'intérêt est de connaître plus précisément ses activités de militante, la seconde plus intéressante qui est une interview de près d'une heure accordée à la chaîne catholique KTO le 12 avril 2008.

Danielle Mitterrand a survécu plus d'une quinzaine d'années à son époux de Président, partant sur la pointe des pieds le matin du 22 novembre 2011 à l'hôpital Georges-Pompidou de Paris, à l'âge de 87 ans. Cette nouvelle a ému beaucoup de personnalités étrangères avec qui elle avait tissé des liens profonds. Elle n'a pas rejoint François Mitterrand à Jarnac mais sa sœur Christine au cimetière de Cluny.

Le 27 octobre 2011 à son domicile parisien (rue de Bièvre), Danielle Mitterrand avait accordé sa dernière interview aux journalistes Corine Chabaud et Élisabeth Marshall pour l'hebdomadaire catholique "La Vie" (l'entretien a été publié dans son intégralité le 24 novembre 2011, donc après sa mort). Fatiguée mais sereine, elle y donnait en guise de testament politique cette réflexion personnelle : « La vie est la valeur la plus importante. Le XXe siècle a apporté beaucoup de progrès en matière de technologies. Mais elles doivent être au service de la vie. J’attends que l’on sorte de la croissance, qui amplifie la pauvreté et les inégalités. Je milite pour une société nouvelle. L’argent rend fou. Il n’est pourtant qu’un outil. Il faut que les valeurs marchandes ne comptent que ce pour quoi elles doivent compter. Il faut que la peur recule. Aujourd’hui, on a peur de perdre sa maison, son travail, sa santé, d’aller dans la rue, de rencontrer son voisin. On a peur de vivre. À tort. Il faut bâtir un monde solidaire. ». L'Insoumise en Utopie ! Utopie un jour, Utopie toujours.


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Sylvain Rakotoarison (26 octobre 2024)
http://www.rakotoarison.eu


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