Quand le rien est l’ami du bien

par C’est Nabum
mardi 25 février 2025

 

Un temps suspendu

 

Privilège de la retraite ou bien présente lors des vacances, elle n'est pourtant pas unanimement appréciée sauf quand elle se fait graveleuse ! Elle se pratique selon des codes et des rituels qui en disent beaucoup de nos amis les humains. Chacun y va de son repos digestif en fonction de son humeur, de son repas, de ses préférences, de ses habitudes. Seul le silence est de mise pour ceux qui cèdent à ses attraits.

Les plus perfectionnistes s'isolent dans une chambre, se dévêtent presque entièrement pour retrouver la fraîcheur du drap et l'abandon du soir. Ils ferment porte et volets, se coupent de la bonne société qui doit encore s'affairer à d'autres tâches. Ils s'offrent ainsi un petit supplément à la nuit, un temps de sommeil profond, pour fuir un temps suspendu, ce monde qui nous impose un rythme déraisonnable…

D'autres aiment à jouir d'un rayon de soleil quand cela est possible. Sur un transat ou bien derrière la véranda, la caresse bienveillante des rayons procure un plaisir ineffable. C'est une douce torpeur, un abandon qui permet de faire provision de vitamine D3 qui le plus souvent vous fait sombrer dans les abysses d'un profond apaisement. L'été, la pratique impose une petite négociation entre ombre et lumière pour supporter les brûlures d'un astre qui darde à qui mieux mieux.

L'imperturbable recherche le confort immédiat, sans se soucier des uns et des autres. Il se bauge au milieu de ceux qui se refusent à la pratique. Prend place sur un canapé ou bien un fauteuil confortable, au milieu des conversations qui ne perturberont nullement son évasion. Rien ne peut le détourner de son petit somme. Il ferme les yeux et se laisse emporter sans craindre les derniers soubresauts d'une maisonnée qui va s'enfoncer dans le calme.

D'autres feignent de s'offrir un temps calme en prenant un livre ou bien un jeu quelconque. Une occupation feinte pour garder bonne conscience avant que le prétexte finisse par leur tomber des mains. C'est alors un abandon ouaté qu'ils prétendront plus tard, impromptu ou bien imprévu. Autour d'eux, on feint de croire à cette excuse fallacieuse...

Le désinvolte se love au fond de son lit, fenêtre ouverte, porte ouverte sur la maisonnée qui s'affaire. Il entend démontrer ainsi qu'il n'entend nullement sacrifier à cette coupable faiblesse. Il écrase pourtant du sommeil de celui qui a trop profité de l'apéritif. Il peut tout aussi bien accompagner sa plongée chez Morphée de quelques grognements du fond de la gorge pour attester de la profondeur de sa fatigue. Il se réveillera la tête encore plus lourde sans vraiment comprendre ce qui occasionne cet étrange phénomène.

Il y a toujours quelqu'un pour se plaindre de ce temps suspendu, de ces instants dérobés par tous ces hédonistes alors qu'il y aurait tant à faire. C'est alors que, maudissant ces paresseux qui ferment les yeux sur toutes les beautés qui nous entourent, celui ou celle qui ne conçoit pas cette perte de temps, fait le décompte des occasions perdues en visites touristiques ou bien activités culturelles. Après avoir respecté un peu le silence des dormeurs, l'agité trouve prétexte à des tâches bien bruyantes pour sonner le rappel et relever le niveau.

D'autres s'offrent la sieste conjointe. Ils prétendent à l'assemblée moqueuse qu'ils ont besoin d'un repos mérité. Le mensonge est illusoire et les clins d'yeux complices ne méprennent personne. Les joues sont plus empourprées au réveil qu'au coucher. Chacun s'étonne encore qu'il y en ait qui osent ce plaisir défendu, cette « mésienne » graveleuse qui se fait libertine à ceux qui savent trouver une bulle.

Puis ce plaisir consommé, la journée peut reprendre avec parfois ce vague sentiment d'avoir trop abusé de la chose. L'esprit vaseux, la tête lourde, le corps las, il convient pour éviter pareil écueil, de limiter cette sacro-sainte sieste, de ne pas lui donner trop d'importance, de la limiter à sa juste valeur.


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