« Lettres d’excuses » Patrick Chesnais (se livre) tel qu’en lui-même au Lucernaire

par Theothea.com
samedi 5 octobre 2024

Micro-cravaté sur la scène du Lucernaire, l'excellente nouvelle dès le début du spectacle c'est que, pour la première fois depuis longtemps, nous sommes assurés d'entendre correctement les propos sonorisés de Patrick Chesnais voire même ses borborygmes... cela va donc être un régal pour l'oreille et pour l'esprit.

  

LETTRES D’EXCUSES
© Captavidéo

  

Son livre d'excuses épistolaires étant paru en 2023, en voici désormais son adaptation sur les planches grâce à une sélection savamment ordonnée mise en espace artistique par sa fille Émilie.

A 78 ans, le comédien poursuit, en pleine forme physique, son artisanat perspicace qui ne lui a jamais fait défaut depuis son entrée en sacerdoce théâtral lors de sa sortie du conservatoire d'art dramatique.

Mais, cependant au cours de sa carrière, l'artiste a accumulé de multiples fautes ou surtout des manquements à se faire pardonner alors c'est par la tangente qu'il tente de se raconter ou plutôt d’élaborer une sorte d'état des lieux autrement dit celui de l’état de l’homme de spectacle ayant tracé jusqu'ici sa route sans vraiment se retourner.

  

LETTRES D’EXCUSES
© Captavidéo

  

Et pourtant des ruptures dans ce cheminement se sont dressées avec la première d'entre elles par laquelle il débute ses lettres d'excuses, adressée à Ferdinand son fils qu'il pense n'avoir pas su suffisamment protéger...

Ainsi, au-delà de l’accident fatal, c'est l'absence elle-même du fils qui prédomine actuellement et qui envahit son ressentiment de père, peut-être, négligent.

Cependant rien n'arrête la vie ou la survie, c'est délibérément volontariste que l'acteur attaque chaque petit matin d'autant plus vigilant que le doute tenterait de faire effraction.

  

LETTRES D’EXCUSES
© Captavidéo

  

A l’oral du seul en scène, celui-ci passe d'une lettre à l'autre sans jamais insister sur la chute du propos, son apothéose ou le point final.

C'est le fondu enchaîné qu'adopte la scénographie du récit conjugué à la première personne du singulier ; c'est bien de Patrick Chesnais dont il est question existentielle mais se racontant avec ses faiblesses assumées sans aucun pathos et même, pour le fond, sans véritables regrets exprimés clairement.

Tel un philosophe en activité conceptuelle, il observe, il constate & déduit de son analyse que force est de renouveler en permanence l'expérience des planches car c'est le seul véritable outil d'évaluation de son potentiel, de ses forces réelles, ses compétences et de leur impact sur le public.

  

LETTRES D’EXCUSES
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Tout autre état d'âme pourrait être trompeur ou fallacieux, mieux vaut se fier à l'acte de présence scénique pourvu que celui-ci soit nourri par la vie elle-même et toutes ses incidences.

Alors d'anecdotes professionnelles jusqu'aux considérations sur la naissance, la mort et entre-temps les anniversaires, c'est la vie vécue sous toutes ses formes qui dicte sa loi universelle.

Patrick Chesnais aura décidé une fois pour toutes d’affronter toutes ces facettes de front avec leurs joies et leurs peines respectives.

Alors s'il s'excuse entre autres auprès de Delphine Seyrig, Mathilda May, Michel Bouquet ou Jack Nicholson... ce n'est pas tant pour leur avoir fait un tant soit peu d'ombre, c'est de s'être pris lui-même au piège du manque d’anticipation et donc de s'être montré insuffisamment prévoyant face aux conséquences de son attitude pouvant apparaître quelquefois indolente.

  

LETTRES D’EXCUSES
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Si, par ailleurs, il en veut à sa jeunesse maintenant estompée et à sa vieillesse encore virtuelle, c'est de leur tentative insidieuse à s’efforcer de masquer l'intérêt prioritaire de l'instant présent... Carpe diem !

De surcroît, ayant compris qu’en s’étourdissant d’activités, le risque de voir lui échapper tout contrôle sur le flux du ressenti se faisait menaçant, il est prêt désormais à accorder une valeur relative à l’ennui et s’efforce donc, quand il le peut, de cultiver cette prédisposition qui lui avait, jusque-là, toujours fait défaut.

C’est, cependant, avec son deuxième fils qu’il aura eu le plus de difficultés à se mouvoir sur les mêmes longueurs d’ondes. De toute évidence par exemple, Victor ne partage point les mêmes appétences que son père en matière d’humour et aura préféré de loin la compagnie de ses propres amis pour se laisser aller à rire sans aucunement autoriser son père à participer de cette complicité générationnelle...

  

LETTRES D’EXCUSES
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En revanche, parmi ses victoires sur la fatalité, le compagnon de route perspicace aura su transgresser le masque du COVID ravageur en découvrant in situ la vérité sur l’Amour et, ainsi, pouvoir en reconnaître son insondable profondeur... auprès de sa femme Josiane Stoléru.

Définitivement, c’est donc selon un esprit sain dans un corps sain qu’il souhaite poursuivre son cheminement d’homme... au rythme du comédien renvoyant en miroir, selon la plus grande justesse possible, son interprétation distanciée du vivant... reçue, bien entendu, par le public au diapason de son charme nonchalant bel et bien indéfinissable.

photos 1 à 3 © Captavidéo
photos 4 à 7 © Theothea.com
  
LETTRES D'EXCUSES - ***. Theothea.com - de & avec Patrick Chesnais - 
mise en scène Emilie Chesnais - Théâtre du Lucernaire

  

LETTRES D’EXCUSES
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