Les gardiens de l’Holocauste : la face sombre de la collaboration ukrainienne

par Giuseppe di Bella di Santa Sofia
samedi 15 février 2025

Au cœur de la tourmente de la Seconde Guerre mondiale, alors que l'Europe était plongée dans les ténèbres de l'Holocauste, des milliers d'hommes, issus de diverses nations, ont été enrôlés pour servir de gardiens dans les camps de concentration et d'extermination nazis. Parmi eux, un nombre significatif d'Ukrainiens, dont la présence et les actions demeurent un sujet d'étude et de débat historique complexe. Leur histoire, souvent méconnue, révèle une facette sombre de la collaboration et des responsabilités individuelles dans le contexte de la barbarie nazie.
 

 

Le contexte ukrainien : un territoire divisé et une population prise dans la tourmente

L'Ukraine, au cours de la Seconde Guerre mondiale, était loin de former une entité homogène. Son territoire était divisé entre différentes puissances et factions, ballotté entre l'occupation allemande, le contrôle soviétique et les aspirations nationalistes. Cette fragmentation a engendré une mosaïque de situations et de motivations pour les Ukrainiens, pris au piège des conflits idéologiques et des luttes de pouvoir.

L'occupation allemande, marquée par la brutalité et la terreur, a suscité des réactions diverses au sein de la population ukrainienne. Certains ont choisi de collaborer avec les nazis, y voyant une opportunité de servir leurs propres intérêts ou de lutter contre le régime soviétique. D'autres ont rejoint les rangs de la résistance, combattant clandestinement pour la libération de leur pays.

Au milieu de ce chaos, le recrutement de gardes ukrainiens pour les camps nazis s'est inscrit dans une logique complexe de collaboration et de survie. Les motivations de ces hommes étaient variées, allant de l'opportunisme à l'idéologie, en passant par la contrainte et la peur.

 

Le recrutement et la formation : des hommes au service de la machine de mort

Les gardes ukrainiens étaient recrutés parmi différentes catégories de personnes, souvent issues des marges de la société. Les prisonniers de guerre soviétiques, dont beaucoup étaient d'origine ukrainienne, constituaient une source importante de recrutement. Affamés, désespérés et soumis à un régime de terreur, certains prisonniers ont accepté de collaborer avec les nazis pour améliorer leurs conditions de survie.

D'autres recrues étaient des volontaires, motivés par des convictions nationalistes, anti-communistes ou antisémites. Ils voyaient dans la collaboration avec les nazis une occasion de servir leur pays ou de lutter contre leurs ennemis.

Enfin, les nazis ont également recruté des auxiliaires parmi la population locale ukrainienne, parfois enrôlés de force, parfois motivés par l'appât du gain ou la volonté de protéger leurs proches.

 

La formation de ces gardes était assurée dans des centres spéciaux, tels que le centre de formation de Trawniki, situé près de Lublin, en Pologne. Ils y apprenaient les techniques de surveillance, de torture et d'exécution, devenant les rouages d'une machine de mort implacable.

 

 

Rôles et responsabilités : au-delà de la surveillance, la participation active à l'extermination

Les gardes ukrainiens ont joué différents rôles dans les camps de concentration et d'extermination nazis, allant de la surveillance des détenus à la participation active aux exécutions et aux atrocités.

Ils étaient chargés de maintenir l'ordre dans les camps, d'empêcher les évasions et de réprimer les révoltes. Leur présence était synonyme de terreur pour les prisonniers, très régulièrement soumis à leur brutalité et à leurs humiliations. 

Mais leur rôle ne se limitait pas à la surveillance. De nombreux gardes ukrainiens ont participé activement aux exécutions massives, aux tortures et aux autres atrocités commises dans les camps. Ils étaient les bras armés de la machine de mort nazie, mettant en œuvre les ordres de leurs supérieurs avec une cruauté très souvent glaçante.

Certains gardes ukrainiens ont même été affectés à des unités spéciales, chargées de l'extermination des Juifs dans les camps de Belzec, Sobibor et Treblinka, dans le cadre de l'opération Reinhard. Leur participation à ce génocide systématique témoigne de leur implication profonde dans la Shoah. D'autres ont également participé à la liquidation de plusieurs ghettos juifs en Pologne, dont celui de Varsovie en particulier. 

 

 

Responsabilité et culpabilité : un débat historique complexe

La question de la responsabilité et de la culpabilité des gardes ukrainiens dans les crimes nazis est un sujet de débat historique complexe. Il est essentiel de distinguer les individus qui ont agi de leur propre volonté, motivés par des convictions idéologiques ou des motivations personnelles, de ceux qui ont été contraints de servir comme gardes, sous la menace ou la contrainte.

Cependant, il est indéniable que tous les gardes ukrainiens, quel que soit leur statut ou leurs motivations, ont participé à des degrés divers aux atrocités commises dans les camps de concentration et d'extermination nazis. Ils ont tous une part de responsabilité dans ces crimes, même ceux qui ont agi sous la contrainte.

Le nombre de gardes ukrainiens ayant servi dans les camps nazis, bien qu'il soit difficile à établir avec précision, témoigne de la collaboration significative de plusieurs milliers d'Ukrainiens avec le régime nazi dans la commission de crimes contre l'humanité. Cette réalité historique, très souvent occultée ou minimisée, doit être reconnue et assumée pour comprendre pleinement les complexités de cette période sombre de l'histoire de l'humanité.

 

Après la guerre : la justice et la mémoire

Après la guerre, des gardes ukrainiens ont été jugés et condamnés pour leurs crimes atroces. Certains ont été exécutés, tandis que d'autres ont été emprisonnés pendant de longues périodes. Cependant, beaucoup ont réussi à échapper à la justice et ont vécu le reste de leur vie sans amais être inquiétés.

La traque des criminels de guerre nazis, menée par des organisations telles que le Centre Simon Wiesenthal, a permis de traduire en justice certains gardes ukrainiens, même des décennies après la fin de la guerre. Ces procès, bien que tardifs, ont rappelé l'importance de ne pas oublier les crimes nazis et de poursuivre les responsables, où qu'ils se trouvent, comme ce fut le cas pour John Demjanjuk, ex-garde ukrainien du camp d'extermination de Sobibór et complice de la mort de 29 700 Juifs.

 

 

Aujourd'hui, la mémoire des gardes ukrainiens et de leur rôle dans les camps nazis reste un sujet sensible, presque tabou, source de controverses et de débats passionnés. Certains cherchent à minimiser leur responsabilité, en mettant en avant le fait qu'ils ont été recrutés de force ou qu'ils ont agi sous la contrainte. D'autres insistent sur leur culpabilité et leur complicité dans les crimes nazis, soulignant leur participation active aux exécutions et aux autres nombreuses atrocités.

 


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