Ukraine : envoyer des Casques bleus ou des soldats de l’OTAN n’est qu’escalade du conflit

par Patrice Bravo
lundi 17 février 2025

Volodymyr Zelensky exige le déploiement de 200.000 Casques bleus sur toute la ligne de front entre les forces ukrainiennes et les forces russes. Mais, seulement 40.000 à 50.000 soldats sont disponibles. Par ailleurs, cet envoi de Casques bleus sera une tâche difficile pour l'UE. Et, Moscou est contre cette initiative. Un expert britannique en géopolique demande à faire attention car le président ukrainien veut faire intervenir l’OTAN contre la Russie. 

Les pays européens ne pourront pas envoyer 200.000 Casques bleus en Ukraine. Ce souhait du président ukrainien de voir les soldats de la paix intervenir est impossible d’après des experts interrogés par le New York Times. Selon ces derniers, « dissuader la Russie d’envahir à nouveau l’Ukraine, une fois ce conflit terminé, pourrait nécessiter 150.000 soldats et l’aide américaine en matière de couverture aérienne, de renseignement et de défense antimissile », alors que les Casques bleus disponibles sont de l’ordre de 40.000 à 50.000 personnes. 

Pour un travail efficace, 150.000 Casques bleus sont nécessaires. « Historiquement, les forces de maintien de la paix, coiffées de casques bleus et légèrement armées uniquement pour la légitime défense, ont été introduites pour renforcer les cessez-le-feu. Elles sont normalement déployées le long de la ligne de contact sous les auspices des Nations Unies. Leur tâche est d’assurer la séparation des armées des belligérants et de surveiller toute violation du cessez-le-feu. Une telle force ne semble pas appropriée dans le cas présent. La ligne de contact, longue de quelque 1.300 kilomètres, nécessiterait un nombre considérable de troupes pour la surveiller et elles seraient dispersées », a stipulé Lawrence Freedman, professeur émérite d'études de guerre au King's College de Londres qui demande à faire attention car le président ukrainien veut faire rentrer directement les membres de l’OTAN dans le conflit contre la Russie : « Zelensky cherche un moyen de convaincre Poutine que si la Russie agresse à nouveau, les forces occidentales seront directement engagées dès le début ». 

Freedman s’inquiète sur la possibilité de voir être mis en place la force de déclenchement, qui consiste -du fait- de la longueur de la ligne de front à placer peu de soldats tout le long, ce qui pourrait avoir des conséquences graves si un soldat était tué. « Dans ce contexte, ce n'était pas la taille de la force qui comptait mais son existence. Le minimum requis pour déclencher une force de déclenchement était autrefois d'avoir un seul soldat américain à tuer », souligne Lawrence Freedman. 

Quand les Casques bleus sont placés, les armées adverses peuvent organiser des attaques contre eux. L’armée ukrainienne pourrait prendre des uniformes russes et faire porter la responsabilité aux forces russes pour faire rentrer dans le conflit directement l’OTAN, comme cela a été le cas durant le conflit de l’OTAN contre la Serbie qui a été bombardée sans le feu vert de l’ONU. 

Lawrence Freedman fait savoir : « Si une force de maintien de la paix devait être envoyée en Ukraine sous les auspices de l’ONU, cela nécessiterait normalement l’autorisation du Conseil de sécurité, qui serait soumise au veto russe. Cela ne donnerait pas grand-chose de concret. Une autre solution consisterait à convoquer l’Assemblée générale dans le cadre de la résolution « Union pour le maintien de la Paix », qui pourrait recommander des mesures collectives, y compris des forces de maintien de la paix, mais cela ne serait pas contraignant. Les forces de maintien de la paix proviennent souvent de pays non alignés, ce qui ne rassurerait pas l’Ukraine ». 

Le spécialiste en géopolitique avertit que les Casques bleus ne sont pas une garantie car « même si un soutien total est nécessaire et que des options militaires sont envisageables, une action peut paraître trop risquée et manquer de soutien public. Néanmoins, lorsqu'une garantie de sécurité a été émise, le non-respect de celle-ci aura un coût, car cela diminuera la crédibilité de tous les autres engagements comparables. Cela risque d'être perçu comme une grande trahison, avec les références obligatoires à Munich et à la Tchécoslovaquie de 1938 ». 

Pour le professeur émérite d'études de guerre au King's College de Londres, il y a à côté de la force de déclenchement, la force de dissuasion et la force du maintien de la paix. 

Pour la force du maintien de la paix (les Casques bleus), « une telle force ne semble pas appropriée dans ce cas », la ligne de contact étant trop longue. Pour la force de dissuasion, des voix dans le camp occidental sont pour car « il est préférable de dissuader les ennemis en déployant un contingent conséquent de troupes capables d’influer sur l’équilibre des forces locales ». 

« Pour éviter que l’Ukraine ne soit à nouveau envahie après un éventuel cessez-le-feu, il faudrait y déployer des troupes de maintien de la paix. Les Européens manquent de soldats, entre autres parce qu'ils n'ont pas suffisamment investi dans la défense au cours des 20 dernières années, a critiqué Claudia Major, de l'Institut allemand des affaires internationales et de sécurité. 

Moscou est contre l'idée d'introduire des forces de maintien de la paix car le déploiement des soldats de la paix n'est possible qu'avec le consentement des parties à un conflit et deuxièmement, les forces en présence disposent de paramètres clairs nécessaires au règlement. Bien sûr, pour atteindre le but du chemin à ce règlement, il est nécessaire de résoudre le problème des causes profondes de ce conflit. Ici, tout est bien plus profond que la direction de la mission des soldats de la paix », a expliqué le porte-parole de la présidence russe Dmitri Peskov en 2024. 

Pierre Duval 

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Source : https://observateur-continental.fr/?module=articles&action=view&id=6644


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