John qui rit et Jean qui pleure

par Chem ASSAYAG
jeudi 7 juillet 2005

Paris a perdu, Londres a gagné, John qui rit et Jean qui pleure. Mais au-delà de la tristesse des uns et de la joie des autres ce qui ne laisse pas de surprendre c’est l’opacité et les bizarreries du processus de sélection de la ville hôte des Jeux Olympiques.

Opacité

Le scrutin de désignation du CIO est secret, or lorsque les collèges électoraux sont très petits, dans le cas du CIO une centaine de personnes en fonction des configurations de vote, la publicité des votes est souvent la condition indispensable pour garantir un scrutin juste. En effet chaque votant pouvant être identifié, il est comptable de sa voix et doit donc être en mesure de justifier les choix qu’il fait. Ainsi par exemple comment expliquer que dans le vote de Singapour la ville de New York qui a 19 voix au premier tour n’en a plus que 16 au second - avec entre temps Moscou qui n’est plus en lice - ou que Madrid passe de 32 voix au deuxième tour à 31 avec New York qui n’est plus dans la course ! On serait curieux de connaître l’explication de certains membres du CIO... Par ailleurs l’opacité dans ce contexte est mère de toutes les rumeurs et de tous les soupçons.. et on a vu dans le passé que le CIO n’était pas exempt de tout reproche en la matière notamment avec les affaires liées à l’attribution des jeux d’hiver 2002 à Salt Lake City.

Quels critères ?

Un des autres problèmes avec le processus actuel du CIO c’est que fondamentalement on ne sait pas quels sont les critères de choix des membres : est-ce le rapport de la commission d’évaluation, mais à ce moment là pourquoi ne pas avoir déjà éliminé Moscou il y’a trois mois sachant que son dossier était très en retrait par rapport aux autres ? Est-ce la notion « d’héritage des Jeux » mise en avant par certaines candidatures ? Est-ce la manne financière promise au CIO comme l’a souligné New York ? Est-ce le strict respect du cahier des charges « technique » du CIO comme s’en est vantée Paris ? Au final on a l’impression que le réseau de relations personnelles et le lobbying géopolitiques sont les vrais clés du scrutin, sans parler du facteur émotionnel, de nombreux commentateurs mettant en avant par exemple le succès de la présentation de Sebastian Coe le 6 juillet lors du Grand Oral de Singapour. De plus il semble exister encore une grande marge d’interprétation sur ce que les villes candidates peuvent faire ou ne pas faire pour promouvoir leurs candidatures. Paris se serait ainsi interdit d’avoir recours à certaines pratiques utilisées par Londres...Dans un monde ou le juridisme à l’anglo-saxonne domine il est tout à fait paradoxal que le CIO ne soit pas plus vigilant dans la définition de ces règles de conduite.

Que faire ?

Bien sûr il n’y a jamais de processus de décision totalement rationnel et il serait vain d’essayer d’en instaurer un pour l’attribution des JO mais plus de clarté et de transparence sur les règles de choix et de vote seraient bienvenues. En effet les conséquences des votes des membres du CIO ont une portée énorme - quelle que soit l’opinion qu’on puisse avoir sur les Jeux Olympiques - sur l’évolution des villes hôtes et au-delà sur les pays d’accueil. Aussi on suggérera une mesure simple qui permettrait d’atténuer les déceptions, de clarifier les choix et d’éviter les suspicions : le votre des membres du CIO serait public, et le scrutin de désignation de la ville hôte serait un scrutin à deux tours favorisant la clarté. Mais si de nouvelles règles devaient être appliquées il faudra sans doute bien longtemps avant qu’elles concernent Paris à nouveau ...


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