Bouillonnement d’idées sur la fiscalité !

par ÇaDérange
vendredi 9 septembre 2005

Nous assistons à l’heure actuelle à des grandes manoeuvres sur la fiscalité en Europe.

Pour plusieurs raisons. D’abord parce que l’Europe a une ambition affichée d’harmoniser les fiscalités dans tous les pays de l’Union européenne pour éviter les distorsions de concurrence entre ses différents membres. A dire vrai, ce principe d’harmonisation entre pays européens ne donne pas l’impression d’être un moteur très puissant de changement. Même si de-ci, de-là, des manifestations ou des protestations comme celles des routiers rappellent que l’harmonisation de la fiscalité indirecte (la TVA) ou de celle des produits pétroliers serait la bienvenue pour éviter que certaines professions ne subissent des concurrences biaisées venant de pays dont les conditions fiscales sont plus favorables.

Une autre raison tient à la philosophie plus ou moins libérale qui inspire les sytèmes de taxation dans les différents pays européens. D’un côté, il y a les pays très contrôlés, très administratifs et d’un haut niveau de développement, comme la France, qui ont bâti des systèmes de taxes directes très sophistiqués, mais compliqués à appliquer et dissuasifs pour certaines classes de la société, malheureusement les entrepreneurs. C’est le résultat d’un choix de politique fiscale de redistribution des richesses qui peut avoir des aspects confiscatoires ou du moins être ressenti comme tel.

Dans la même Europe nous trouvons, d’un autre côté, des pays de la "Vieille Europe" plus libéraux d’inspiration, comme la Grande-Bretagne et ceux de la "Jeune Europe", pays de l’est en particulier, qui n’ont pas de tradition fiscale de par leur histoire communiste , qui sont en grand besoin de développement, et donc qui sont attirés par les systèmes de taxation susceptibles de favoriser l’entrepreneuriat. Vous vous doutez que les approches de ces deux catégories de pays ne peuvent être qu’assez éloignées.

Ces pays de la "Jeune Europe" semblent être des adeptes de la "Flat Tax", c’est-à-dire de l’impôt sur le revenu à un seul niveau assez bas, par exemple 10 ou 12pct sur la totalité de vos revenus déclarés. Très facile à appliquer, peu administratif, ce système d’impôt sur les revenus a surtout l’avantage que les entrepreneurs, ceux qui contribuent à un développement rapide du pays, voient immédiatement leurs efforts récompensés avec une taxation minimale des augmentations de revenus qu’ils engrangent d’une année sur l’autre du fait du développement de leurs affaires. Et les pousse donc à poursuivre leurs efforts de développement pour le plus grand bien de l’emploi.

C’est évidemment une philosophie très éloignée du système français où ces entrepreneurs, que l’on désigne parfois sous le vocable de "nouveaux riches", vont voir l’augmentation de leurs revenus d’une année sur l’autre tomber au contraire dans des tranches d’imposition de 50pct et plus. Comme le dirait Monsieur Ducros, pourquoi donc se décarcasser à faire progresser ses affaires- et l’emploi qui va toujours avec- si l’Etat vous confisque la moitié de ce que vous allez y gagner, en prenant tous les risques ? Surtout que vous avez parfois l’impression, dans la société française, que vous volez ce que vous gagnez...

La "flat tax" pure et dure, dans son concept, ne comprend qu’un seul niveau de taxation. Il y a déjà des formules intermédiaires à deux ou trois niveaux de taxation pour essayer de profiter des avantages des deux systèmes. Le "futur" ministre des Finances allemand, si Angela Merkel et la CDU/CSU passent aux prochaines élections allemandes, prévoit ainsi un système à trois étages,15pct au-dessus de 8000 euros de revenus annuels, 20 pct et 25pct maximum au-delà de 20 000 euros par an.

Vous comprenez mieux maintenant d’où sort la réforme de Dominique de Villepin. Elle est en droite ligne de cette nouvelle philosophie, sans oser néanmoins aller très loin, à la française en quelque sorte. D’ailleurs le document qui l’a inspirée, qui est un rapport du Conseil d’Analyse Economique intitulé "Croissance équitable et Concurrence fiscale", suggérait trois tranches de taux de l’impôt sur le revenu, 0pct jusqu’à 10 000 ?,12pct de 10 à 50 000 ? et 27pct au-delà de 50 000 ?.

Un troisième débat sur la fiscalité en Europe est celui qui a été suscité par le Premier ministre belge Monsieur Verofstadt (cf mon message du 15/03/05), et porte sur la balance entre la fiscalité du travail et la fiscalité indirecte sur la consommation, c’est- à-dire la TVA. Ce débat est lié aux problèmes de compétitivité de l’industrie européenne dont on sait qu’ils sont liés au coût très élevé du travail en France, en Allemagne ou ailleurs. Il consiste à constater qu’il vaudrait mieux diminuer la fiscalité du travail et augmenter celle de la consommation. Pour l’argumentaire détaillé ,voir mon message précédent ci- dessus mais en gros la diminution du coût du travail abaisserait nos prix de revient, qui deviendraient plus compétitifs, tandis que l’augmentation de la TVA rendrait au contraire moins compétitifs les prix des produits importés auxquels elle s’applique. Double effet positif donc pour l’économie. Une opposition idéologique de principe des socialistes (français en tous cas) qui n’aiment pas la TVA, qui s’applique davantage aux pauvres qu’aux riches, mais notons que DSK lors de l’Université d’été du PS a publiquement indiqué un revirement possible de sa part.

Toujours en Allemagne, dans le cadre de la campagne pour les législatives, Angela Merkel et la CDU/CSU ont déjà annoncé un passage du taux de TVA de 16 à 18pct, et en même temps une baisse des cotisations chômage de 6.5pct à 4.5 pour application fin 2005. Sur ce sujet en France, rien de nouveau en gestation pour l’instant, mais il m’étonnerait fort que cette idée ne soit pas à l’étude.

Bouillonnement d’idées donc sur les taxes en ce moment, dans le but d’améliorer tout ce qui peut être favorable à la compétitivité, au développement et donc à l’emploi. A suivre avec attention, car l’avenir de l’Europe en dépend un peu...


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