Séismes en Afghanistan : « plus de 1 000 victimes » près d’Hérat

par Sylvain Rakotoarison
jeudi 12 octobre 2023

« Des volontaires, munis de pelles et de pioches, ont travaillé sans répit pour trouver des survivants à la suite du séisme de samedi, qui a entièrement détruit six villages du district rural de Zenda Jan et affecté plus de 12 000 personnes, selon l’ONU. Fournir des abris en grande quantité, à l’approche de l’hiver, sera un défi pour les autorités talibanes, qui ont pris le pouvoir en août 2021 et entretiennent des relations tendues avec les organisations d’aide internationale. » ("Le Monde" du 11 octobre 2023).

Au même moment que les terroristes du Hamas massacraient la population civile israélienne, des séismes de forte magnitude ont dévasté une partie de l'Afghanistan. Cela s'est passé le samedi 7 octobre 2023 dans la matinée au nord-ouest de la ville d'Hérat. Hérat est une agglomération urbaine de près de 500 000 habitants, près de la frontière de l'Iran et du Turkménistan, la troisième ville d'Afghanistan après Kaboul et Kandahar.

Un premier tremblement de terre a eu lieu de magnitude 6,3, puis quelques minutes plus tard, une réplique de magnitude 5,5, et deux autres séismes de magnitude 6,3 et 5,9 dans l'heure qui a suivi. Un autre séisme, avec des répliques, a encore secoué la région d'Hérat dans la nuit du 10 au 11 octobre 2023, de magnitude 6,3 qui a, semble-t-il, provoqué peu de victimes (1 mort et 130 blessés selon les autorités).

Selon Sarah Château, responsable des opérations en Afghanistan pour Médecins Sans Frontières, interrogée par France Culture le 11 octobre 2023, la ville d'Hérat a été plutôt épargnée et c'est la campagne rurale autour qui a été beaucoup touchée : « Ce sont des habitats traditionnels construits avec des matériaux rudimentaires qui ont été touchés. Énormément de femmes et d’enfants sont morts dans les secousses. ».

L'Afghanistan est situé dans une zone à tremblements de terre, coincée entre la plaque eurasienne et la plaque indienne. Sept séismes de magnitude supérieure à 6,0 ont déjà eu lieu récemment dans la région. En plus d'être situé sur une faille sismique, le pays est aussi composé d'un relief très difficile pour l'accès aux secours. Les montagnes en effet rendent difficiles les opérations de sauvetage dans des villages complètement détruits par le tremblement de terre.

Les bilans généralement augmentent toujours au fil du temps, celui de découvertes de nouvelles victimes. C'était un peu différent pour ce séisme puisque les autorités afghanes (désormais sous domination talibane depuis deux ans) ont d'abord communiqué sur 2 053 morts du premier séisme (puis, il était question de 2 400 morts et de 9 000 blessés). Le 11 octobre 2023, elles ont rectifié à la baisse le bilan, en étant cependant assez vague, avec « plus de 1 000 morts » (ce qui n'est pas vraiment contradictoire avec 2 000), et 2 400 blessés. L'erreur du premier bilan provient d'un comptage double de victimes issus de plusieurs organismes de secours.



Il y a plusieurs problèmes pour secourir les rescapés de ces nouveaux séismes. Le premier est de faire arriver l'aide internationale, or le gouvernement taliban est en froid depuis son arrivée au pouvoir avec les organisations d'aide humanitaire qui essaient de faire prévaloir leurs urgences. En outre, la mobilisation de la solidarité internationale est difficile à amorcer dans le contexte de sidération mondiale de l'attaque terroriste du Hamas en Israël et de la succession des horreurs qui sont découvertes jour après jour.

Sarah Château a ainsi précisé les relations entre les ONG et les talibans : « C’est une collaboration qui dure depuis plusieurs années, car les talibans étaient présents sur le territoire afghan avant leur prise de pouvoir. Ils nous connaissent et nous laissent travailler, même s’ils imposent un cadre et certaines restrictions. S’ils nous ont demandé de mettre en place une ségrégation entre les hommes et les femmes, Médecins Sans Frontières a continué à fonctionner normalement. Nous n’avons rien changé, mais c’est une lutte permanente avec les talibans. ». Le principal problème des organisations humanitaires, c'est le manque de soignants : les talibans interdisent aux femmes de travailler au sein de ces ONG et il y a donc un manque cruel de soignants.


Enfin, la situation humanitaire avant le séisme était déjà très délicate en Afghanistan (en raison de la crise économique) et la catastrophe naturelle vient encore un peu plus assombrir une situation très noire. L'objectif des secours est, d'une part, de retrouver le maximum possible de survivants dans les villages reculés, d'autre part, de permettre aux dizaines de milliers de rescapés, qui n'ont plus d'abri, de trouver une solution d'hébergement avant l'arrivée de l'hiver toujours très rude dans ces régions montagneuses.

La responsable chez MSF a poursuivi : « Nous avons doublé le nombre de patients admis dans nos consultations cette année. De janvier à juin 2023, plus de 150 000 personnes sont arrivées en urgences pédiatriques. On a une augmentation des personnes malnutries, avec des maladies chroniques qui ne sont pas prises en charge. Il n’y a plus de vaccination non plus. La situation était tout de même fragile avant l’arrivée des talibans et 75% du système de santé était financé par une aide internationale. Le système de santé a toujours été précaire en Afghanistan. ». La situation désastreuse de l'Afghanistan appelle donc à une mobilisation accrue de la "communauté internationale" comme on a pu heureusement l'observer pour le Maroc.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (11 octobre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Kaboum.
Emmanuel Macron sur les Talibans à Kaboul.
Les Talibans à Kaboul en 2021.
Les soldats français morts en Afghanistan.
Chasseur alpin en Afghanistan.
L’invasion de l'Afghanistan par l'armée soviétique.
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Inondations en Libye : la ville de Derna dévastée.
Séisme au Maroc.
Fukushima, dix ans après.
Apocalypse à la Toussaint ?
Haïti, cauchemars et espoirs.
Erika (12 décembre 1999).
Le tsunami des Célèbes (28 septembre 2018).
Le tremblement de terre à Haïti (12 janvier 2010).
L'incendie de Notre-Dame de Paris (15 avril 2019).
Le syndrome de Hiroshima.
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Fukushima (11 mars 2011).


 


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