Le Sang de la terre - 2 -

par C’est Nabum
jeudi 22 août 2013

Vins de Loire

Vigneron la passion !

Poursuivant ce tour des appellations locales, je franchis la Loire pour aller voir de l'autre côté si la vigne est aussi jolie ! Après une escapade à Guédelon, magnifique folie d'hommes qui ont encore des rêves dans les yeux et la grâce de les faire sortir de terre, un passage chez les frères Quintin, vignerons à Cours sur Loire, au lieu dit le Chétif Bois s'imposait. Il me fallait reprendre des forces …

Je connaissais le vin de la maison pour avoir croisé sa route, un jour sur le canal latéral à la Loire. Une livraison sur un bateau insolite que nous conduisions en Orléans, un joli coteau du Giennois qui ne resta pas bien longtemps en cave. Il me fallait refaire les stocks et découvrir d'un peu plus près la production de la maison.

C'est Gérard, le responsable de la vinification qui me reçut. Cet homme jovial, aime son métier et tous ses à- côtés. Je me souvenais encore de la joie qu'il avait eue à venir nous livrer sur l'eau et de sa gourmandise à partager quelques huîtres en débouchant une bouteille. Je le retrouvais tel quel, avenant et disponible, ravi de recevoir du monde et de faire goûter le résultat de son travail.

Nous nous attablâmes, Gérard sortit quelques verres et de nombreuses bouteilles. D'autres se joignirent à nous. Si Gérard nous tint le crachoir, bien peu consentirent à y vider leurs verres. Ce que nous avions en bouche méritait d'être gardé. À défaut, notre hôte nous expliquait avec faconde son travail, le domaine de ses patrons et l'histoire de son créateur …

Il y a cent ans, monsieur Buchet-Desforges, riche propriétaire terrien, organise une foire aux vins. L'homme a des idées, il veut innover et faire de la bouteille un objet qui attire l'œil. Il y grave son nom, il impose une belle éthique pour son vin « Les Violettes ». Cent un ans plus tard, c'est par cette même cuvée que nous débuterons la dégustation ; un pinot noir de belle tenue, léger et fruité, long en bouche. Un petit bonheur à un prix qui ne chagrine pas !

À la suite de Buchet-Desforges, ce lieu devint un espace d'innovation et de progrès. Le laboratoire œnologique de la Sicav prit le relais dans les locaux construits par le fondateur. Puis c'est l'INRA qui prit possession du domaine pour continuer à faire évoluer la culture de la vigne. Pendant ce temps, le brave bonhomme avait fait don à sa ville d'une partie de ses terres, la maison de retraite de Cours sur Loire fut bâtie sur un terrain qu'il avait donné et porte maintenant son nom. Le vin se bonifie toujours avec l'âge !

Nous débouchâmes un autre Pinot noir, travaillé cette fois en barrique de chêne, de belles pièces produites par la maison Gauthier à Ménetou avec des arbres de la forêt de Vierzon. Du nez, de la délicatesse dans le boisé, du corps, la cuvée du Chalet a un belle tenue. J'étais venu pour le blanc, ce merveilleux sauvignon qui trouve sa plus belle expression le long de la Loire.

C'est par la cuvée Rive droite, le produit phare de la maison Quintin que nous ouvrîmes le voyage au pays des saveurs minérales. Un tenue parfaite, une petite acidité réjouissante, le goût de la pierre et du fruit pour six petits euros, que demander de mieux ? Le Coteau du Giennois demeure encore une bien belle affaire, un formidable rapport qualité-prix, il faut en profiter avant que les petits cochons ne le boivent …

Puis nous explorâmes d'autres vins. Un Chapeau Bas qui s'était offert une année de fût et un Pouilly fumé qui ne demandait qu'à se boire. Je ne changeais pas d'avis, j'étais venu pour ce petit Rive Droite qui vaut bien des grands Sancerre. C'est à ce moment que la patronne vint nous rendre visite. Nous évoquâmes alors Nevers et le festival d'Orléans, le restaurant le Girouet et la marine de Loire. Bien vite, le courant passa et elle proposa à Gérard de nous conduire dans le secret de sa cave.

La pipette à la main, le sourire aux lèvres, les yeux brillants de malice, Gérard nous conduisit vers les fûts, là où sont en train de naître ses futures cuvées. Il expérimente, il cherche, il observe les meilleures conditions. Les fûts de trois cents litres boisent trop le vin, ceux de six cents litres sont parfait, ils offrent un compromis parfait. Les fûts trop jeunes marquent beaucoup le vin, quand ils ont quatre ans, ils sont parfaits.

Preuve à l'appui, les verres se remplissent. Nous apprécions les nuances, le vin qui est en plein travail. C'est beau, c'est bon, c'est incroyablement vivant et si différent de ce que nous avons bu jusque là. Gérard est déjà à envisager la cuvée finale, il anticipe une évolution qui nous échappe. Nous goûtons modérément, nous essayons toutes les variations que ce diable d'homme est en train de mettre en œuvre.

Nous assistons médusés et comblés à l'expression du métier passion. Depuis longtemps Gérard a terminé sa journée. Il ne part pas, il reste encore à nous raconter la vendange, l'histoire de la maison, le mystère des tonneaux, l'évolution des techniques, les tentatives de macération avec les pépins, le travail dans la cave, la part des anges. Un bonheur rare, une passion communicative.

C'est à regret que je quitte l'endroit. J'espère que vous pourrez à votre tour bénéficier d'un tel accueil. Maison Quintin frères à Cours sur Loire, le coteau du Giennois y a trouvé de merveilleux ambassadeurs et un amoureux pétillant de malice et de plaisir. Passez donc de ma part, vous serez bien reçus !

Gourmandement leur.


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