Conflit israélo-palestinien : la France est-elle concernée ?

par Sylvain Rakotoarison
mercredi 22 novembre 2023

« Jamais, depuis l’attentat de Nice en 2016 autant de Français n’ont été assassinés par des terroristes. Et ce sont tous les Français, qui ce soir les pleurent. » (Allocution télévisée d'Emmanuel Macron le 12 octobre 2023).

Cela fait des décennies qu'on dit qu'il ne faut pas importer le conflit israélo-palestinien en France. Pourtant, depuis le 7 octobre 2023, beaucoup de choses ont changé, et j'écrirais même : tout a changé. La France est-elle concernée par le conflit israélo-palestinien ? La réponse est assurément oui. Indépendamment de ses valeurs humanistes qui rendent les Français proches autant des Israéliens (meurtris par le Hamas) que des Palestiniens (également victimes du Hamas), indépendamment de sa volonté, peut-être vaine mais on aura au moins essayé, de tenter de réduire les tensions et de préparer enfin les conditions pour une paix durable, la France a été touchée de plein fouet par les massacres du 7 octobre 2023.

En effet, selon le dernier décompte indiqué par la Première Ministre Élisabeth Borne le 6 novembre 2023, au moins 40 compatriotes français ont trouvé la mort le 7 octobre 2023 parmi les 1 400 victimes du Hamas, et 8 sont portés disparus, probablement otages du Hamas. Comme l'a expliqué, dans son allocution télévisée du 12 octobre 2023, le Président Emmanuel Macron, jamais la France n'a été aussi durement touchée par le terrorisme islamique depuis l'attentat de Nice du 14 juillet 2016. De plus, ces au moins 40 victimes françaises ont été assassinées parce qu'elles étaient juives.

Ce massacre a donné la démonstration qu'Israël devait se défendre et éliminer le Hamas qui ne jure que détruire Israël et les Juifs. La méthode pour cela fait beaucoup trop de victimes palestiniennes civiles (des milliers) mais les Palestiniens sont avant tout victimes de la barbarie du Hamas, celle du massacre en Israël mais aussi celle de vouloir se protéger avec des boucliers humains pour préserver leur capacité de nuire et de tuer. S'il n'y avait pas eu ce massacre du 7 octobre 2023, l'armée israélienne ne serait pas rentrée dans Gaza, comme elle s'en était désintéressée depuis une quinzaine d'années. Un accord serait quand même proche d'être conclu entre le gouvernement israélien et le Hamas pour la libération de quelques-uns des 220 otages.

Emmanuel Macron a annoncé il y a quelques jours que la République allait rendre hommage aux victimes françaises du 7 octobre dans la cour d'honneur des Invalides. Il était temps. Cet hommage manquait cruellement aux familles, la reconnaissance de victimes du terrorisme mais aussi de l'antisémitisme le plus barbare. Et l'un des premiers hommages, c'est d'abord de leur rendre leur identité, en sachant qu'il y a des victimes qui n'ont pas encore été identifiées.

Dans un reportage publié par Alexandra Saviana dans "L'Express" le 31 octobre 2023, certaines de ces 40 victimes françaises ont désormais un visage, un nom, une histoire personnelle.

C'est le cas de Noya Kalderon, une jeune fille de 12 ans atteinte d'autisme et de sa grand-mère Carmela Kalderon (80 ans). La fille était allée rejoindre sa grand-mère dans le kibboutz de Nir Oz pour profiter pendant quelque temps de la campagne. Sa mère les a enterrées le 22 octobre 2023. Le jour du 7 octobre, elle avait reçu des messages de frayeur de sa fille et de sa mère qui lui a écrit que des gens du Hamas étaient entrés chez elles. Deux cousins de Noya, Erez (12 ans), et Sahar (16 ans), ont été enlevés avec leur père Ofer (53 ans).

Avidan Tordjman (26 ans), un coorganisateur du festival Tribe of Nova, a été l'une des premières victimes françaises dont on a connu l'identité. On l'a retrouvé sous la scène du festival où il s'était réfugié pour se protéger et alerter ses proches, jusqu'à ce qu'il fût découvert. Il est né à Bordeaux et ses parents ont émigré en Israël quand il avait 5 ans.

Céline Ben David Nagar (32 ans) était la mère d'une petite fille de 6 mois, mariée depuis deux ans. Elle a vécu à Lyon jusqu'au lycée où elle a émigré en Israël. Elle travaillait dans un cabinet d'avocats de Tel-Aviv. Elle a été assassinée au même festival.


Témoin interrogé par la chaîne I24news au tout début du massacre, Rony Levy, cofondateur du kibboutz de Be'eri, pas loin de Gaza, a été assassiné un peu plus tard par le Hamas, d'après le CRIF. Il espérait pourtant une solution de paix avec les Palestiniens, et comme la plupart des membres des kibboutz proches de Gaza, il aidait les Palestiniens à vivre dans de meilleures conditions.

Nathan Liard, un soldat de presque 20 ans, a été l'une des premières victimes de l'attaque, et s'est montré héroïque, comme l'a expliqué un ami de la famille à France Info : « C’est un enfant qui a combattu le terrorisme avec toute sa force. Il était blessé. Il a demandé à l’ambulance de s’arrêter pour aller combattre à nouveau, parce qu’il a vu des terroristes entrer dans des maisons. Et, pour cela, il a perdu la vie. Il a été d’un courage exceptionnel. ».

Ancien étudiant en droit à Montpellier, Valentin Ghnassia n'a pas franchi ses 23 ans, il allait finir son service militaire trois semaines plus tard. Il a été finaliste au concours de plaidoiries de la faculté de droit de Montpellier en 2019.

Et il y a eu Ishtak Levy, un étudiant de 26 ans ; Naomie Bikhar, une esthéticienne de 23 ans de Créteil, qui est morte dans les bras de son fiancé, ils allaient se marier et vivre en Israël (elle avait déjà choisi sa robe) ; Sigal Levy, une assistante sociale de 31 ans originaire de Cherbourg qui devait se marier au début de l'année prochaine ; Dan Benhamou, directeur commercial de 25 ans originaire de Marseille ; Marc Perez, un acheteur de 51 ans originaire de Paris, qui est allé au festival parce qu'il a reçu un appel inquiétant de sa fille Maya, celle-ci a pu s'échapper après l'assaut des terroristes mais le père a été tué alors qu'il cherchait à la rejoindre ; Binyamin Loeb, un parachutiste de 23 ans originaire de Yerres, venu secourir les personnes attaquées par le Hamas, il devait retourner en France pour des études d'informatique ; Nathanel Young, un soldat franco-anglo-israélien de 20 ans qui a fait sa scolarité dans le nord de Londres ; Ruben Portechiche, soldat né en France, était le père de quatre enfants ; Ruth Perez, une adolescente de 17 ans en situation de lourd handicap, et son père Éric ont trouvé la mort au festival, etc.

Je termine avec Karin Journo, partie au festival, qui a laissé ce dernier message à ses parents, d'une terrible lucidité : « Je veux vous dire que je vous aime, parce que je ne rentre pas à la maison. ».

Ces victimes, elles rejoignent les trop nombreuses victimes du terrorisme et de la guerre. Elles seront honorées par la République française, au même titre que ceux dont les noms sont gravés sur les monuments aux morts des deux guerres mondiales dans chaque ville et village de France.


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Sylvain Rakotoarison (18 novembre 2023)
http://www.rakotoarison.eu


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